Dictionnaire en ligne: DOUX, DOUCE, adjectif et adverbe. I.— Adjectif. A.— [En parlant d'un inanimé en général concret] (Quasi-)antonyme : dur. 1. [En parlant d'une réalité perceptible par tel ou tel sens] Qui n'est ni rude ni âpre, (par ce qu'il) fait sur les sens une impression agréable. a) Domaine du goût. Qui a une saveur agréable sans être forte ni piquante. a ) Qui a une saveur sucrée et agréable. Amande, patate, pomme douce; fruits doux. (Quasi-)antonymes : acide, âcre, amer. Le séné d'Italie ou de Provence (...) leur saveur est plutôt douce et muqueuse qu'amère (JEAN-BAPTISTE KAPELER, JOSEPH-BIENAIMÉ CAVENTOU, Manuel des pharmaciens et des droguistes, tome 2, 1821, page 662) : Ø 1.... sous la dénomination « sucres » on désigne certains corps qui, extraits des plantes, sont cristallins, solubles dans l'eau et qui communiquent au liquide de dissolution une saveur douce, agréable, dite « saveur sucrée ». J. ROUBERTY, Manuel de sucrerie, 1922, page 68. — OENOLOGIE. Vin doux. · Jus de raisin qui n'a pas encore fermenté et dont la saveur est très sucrée. (Quasi-)synonyme : moût. La levure de vin (...) ensemence d'elle-même le vin doux et y transforme le glucose en alcool (LUCIEN PLANTEFOL, Cours de botanique et de biologie végétale, tome 2, 1931, page 115 ). Les cépages à vins doux naturels (...) du Roussillon sont également tous de troisième époque. Le plus répandu est le grenache (LOUIS LEVADOUX, La Vigne et sa culture, 1961, page 43 ). Par métaphore. Ta bouche, sanguin piment, Douce comme le moût de première cuvée (JEAN PAPADIAMANTOPOULOS, DIT JEAN MORÉAS, Le Pèlerin passionné, 1891, page 90 ). · Vin (blanc) très sucré. (Quasi-)antonyme : vin sec. Le vin blanc doux est nourrissant et diurétique, mais il donne mal à la tête (EDMOND FARAL, La Vie quotidienne au temps de Saint Louis, 1942, page 190 ). Par ellipse du déterminé, emploi substantif masculin. [Généralement en parlant d'une liqueur sucrée par opposition à une liqueur forte ou rude] Un verre de doux; préférer le doux. Prendre du sec (du vin sec) plutôt que du doux (DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE (PAUL ROBERT) ). Pendant que les hommes humaient le marc ou le kirsch, le doux circulait parmi les femmes : vin cuit, cassis, eau-de-coing, angélique ou trois plantes (CLAUDE THOUVENOT, Le Pain d'autrefois, Paris, André Leson, 1977, page 107 ). ß ) Qui a une saveur peu relevée sans trop d'assaisonnement. Moutarde douce; piment doux. (Quasi-)antonymes : épicé, fort, salé. — GASTRONOMIE. Sauce douce. " Sauce faite avec du sucre et du vinaigre " (Dictionnaire de l'Académie Française). — Parfois péjoratif. Qui manque de sel ou d'assaisonnement. Plat, potage (trop) doux; salade (trop) douce. Synonymes : douceâtre, fadasse, (familier) fade. Ta sauce est un peu douce, il faut la saler davantage (DICTIONNAIRE DU FRANÇAIS CONTEMPORAIN (JEAN DUBOIS) ). ? ) En particulier. Eau douce. Eau contenant peu ou pas de sel; eau des rivières, des étangs, des fleuves, etc. Poisson d'eau douce. (Quasi-)antonyme : eau de mer. Plusieurs espèces [de poissons voyageurs] prennent naissance dans les eaux douces, vont se développer et grandir dans les eaux salées (Code de la pêche fluviale. 1875, page 45) : Ø 2. Les marais salants installés sur les côtes à proximité de l'embouchure d'un fleuve doivent prendre des précautions particulières pour établir leurs prises d'eau de mer sous peine d'avoir des eaux trop douces et un mauvais rendement. Il semble que la salinité des couches profondes soit plus constante que celle des eaux de surface, car les facteurs climatiques ou locaux n'interviennent pas. JEAN STOCKER, Le Sel, 1949, page 18. — Péjoratif, familier. Marin d'eau douce. Marin qui n'a, en général, navigué que sur rivières ou peu sur mer ou qui n'a navigué qu'en Méditerranée; marin qui n'est pas un vrai marin. — Vieux. Médecin d'eau douce. Mauvais médecin; médecin qui soigne de façon peu énergique, prescrit peu de remèdes ou en prescrit d'inefficaces : qui ne prescrit que de l'eau claire. Remarque : Attesté dans Dictionnaire de l'Académie Française 1835, DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965, DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE (ÉMILE LITTRÉ), Dictionnaire général de la langue française (Adolphe Hatzfeld, ARSÈNE DARMESTETER), DICTIONNAIRE DES DICTIONNAIRES (SOUS LA DIRECTION DE PAUL GUÉRIN) 1892. b) Domaine de l'odorat. Qui a une odeur délicate, légère et agréable. (Quasi-)synonymes : délicat, suave. La douce odeur des roses (ROBERT BRASILLACH, Pierre Corneille, 1938, page 202) : Ø 3. Triste en sa frénésie, Le beau Dionysos pleure la molle Asie; Et ce hardi troupeau, les femmes au sein nu Qui le suivaient naguère au pays inconnu, Folles, aspirant l'air avec ses doux aromes, Ne sont plus à présent que spectres et fantômes. THÉODORE DE BANVILLE, Les Exilés, L'Exil des Dieux, 1874, page 9. c) Domaine de la vue. a ) [En parlant d'une source lumineuse, d'une couleur] Qui offre une luminosité, des teintes estompées. Lumière douce; douce clarté. (Quasi-)synonymes : délicat, tendre. La teinte uniforme et douce des maisons de Berlin (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Histoire de la peinture en Italie, tome 1, 1817, page 47 ). La douce lumière des abat-jour (JACQUES CHARDONNE, L'Épithalame, 1921, page 189 ). ß ) [En parlant d'une forme] Qui est agréable à voir en raison de sa régularité et de son harmonie. Nanette embellit beaucoup (...) Les lignes sont plus douces, plus fondues (GUY DE MAUPASSANT, Fort comme la mort, 1889, page 147 ). — En particulier. [En parlant d'un élément du relief] Qui n'est pas abrupt, escarpé ni heurté (Confer infra 2 b) : Ø 4.... le pays de Châtellerault, dont l'aspect verdoyant et les douces collines ménagent une transition aimable vers les raides et secs escarpements du Poitou calcaire. PAUL VIDAL DE LA BLACHE, Tableau de la géographie de la France, 1908, page 169. · Par analogie. Les cheveux sur les épaules, sur les seins et leur douce ondulation de dunes (HENRI DE MONTHERLANT, Pitié pour les femmes, 1936, page 1094 ). d) Domaine du toucher. Qui est agréable au toucher par un contact sans aspérités, une surface lisse, une consistance souple, moelleuse. (Quasi-)synonymes : lisse, tendre. Le séné d'Alexandrie (...) Ses feuilles sont (...) lisses et douces au toucher (JEAN-BAPTISTE KAPELER, JOSEPH-BIENAIMÉ CAVENTOU, Manuel des pharmaciens et des droguistes, tome 2, 1821, page 662 ). Ce doux museau de velours cotonneux [d'une biche] (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Vagabonde, 1910, page 220) : Ø 5.... il s'aperçut enfin qu'une peau douce et fine, tendue sur une chair ferme et élastique, apanage exclusif de la fraîcheur, suite ordinaire de la jeunesse, lui procurait un toucher plus agréable, en le faisant reposer plus doucement;... PIERRE-AMBROISE-FRANÇOIS CHODERLOS DE LACLOS, De l'Éducation des Femmes, 1803, page 462. — BEAUX-ARTS. " Léger, moelleux, touché, indiqué plutôt que marqué " (Nouveau Larousse illustré; attesté aussi dans Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse)20e, Dictionnaire universel de la langue française (Louis-Nicolas Bescherelle) 1845). Pinceau doux; touche douce. · Spécialement. Taille-douce*. e) Domaine de l'ouïe. Qui est agréable à l'oreille en raison de son harmonie, de sa faible intensité. (Quasi-)synonymes : mélodieux, suave. L'orchestre de Milan, admirable dans les choses douces, manque de brio dans les morceaux de force (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Rome, Naples et Florence, 1817, page 21 ). Une musique douce et mélodieuse (GÉRARD DE NERVAL, Le second Faust, Hélène, 1840, page 258 ). Un très joli timbre de voix, doux avec un peu d'acidité dans le haut (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Julie de Carneilhan, 1941, page 184 ). — Emploi comme substantif. Le doux. Le ton doux (DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE (PAUL ROBERT) ). (Quasi-)antonyme : le fort. — PHONÉTIQUE. Consonne douce, ou, par ellipse une douce, substantif féminin Consonne dont l'articulation n'exige qu'une faible tension musculaire et dont le son est relativement doux. (Quasi-)synonyme : consonne sonore; (quasi-)antonymes : consonne forte ou sourde (confer adoucissement B spécialement 6 phonétique). 2. Par extension. [En parlant d'une réalité qui affecte l'ensemble de la personne] a) [En parlant d'un moyen de locomotion] Qui ne fatigue pas par un rythme suivi, peu saccadé ni cahotique. " Cheval doux, monture douce, cheval, monture qui ne fatigue point le cavalier " (Dictionnaire de l'Académie Française). (Quasi-)antonyme : pénible. Il [Denoisel] allait retenir chez un loueur une voiture douce et bonne à ramener un blessé (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Renée Mauperin, 1864, page 266 ). — Par métonymie. Cahot, choc doux; secousses douces. La voiturette filait par les larges avenues, de son train si rapide et si doux (ÉMILE ZOLA, Travail, tome 2, 1901, page 258 ). Le cheval a une allure douce, les allures fort douces, des mouvements doux (Dictionnaire de l'Académie française. 1932) : Ø 6. Au moment de l'embrayage, la garniture, coincée entre le volant et le plateau d'embrayage, aplatit progressivement les plaquettes-ressorts procurant ainsi au véhicule un démarrage beaucoup plus doux. CHARLES CHAPELAIN, Cours moderne de technique automobile, 1956, page 69. b) [En parlant d'un lieu, d'une pente, d'une construction, etc.] Qui n'est pas brusque; qui est facile à gravir; qui reste modéré, sans écart important (Quasi-)antonymes : abrupt, escarpé, raide. Escalier doux; montée, pente douce. — Par analogie. Qui est peu pénible à supporter. (Quasi-)antonymes : rigoureux, sévère. C'est un devoir bien doux à remplir (Dictionnaire de l'Académie française. 1835-1932). Ô mathématiques sévères, je ne vous ai pas oubliées, depuis que vos savantes leçons, plus douces que le miel, filtrèrent dans mon coeur, comme une onde rafraîchissante (ISODORE DUCASSE, DIT COMTE DE LAUTRÉAMONT, Les Chants de Maldoror, 1869, page 190 ). c) [En parlant des conditions atmosphériques] Qui produit une sensation de bien-être. (Quasi-)synonymes : modéré, tempéré, tiède; (quasi-)antonymes : aigre (confer aigre I A 1 e), cinglant, cuisant, glacial. Malte où les nuits sont douces comme le lait (VICTOR HUGO, La Légende des siècles, tome 6, 1883, page 382 ). La soirée était douce, tiède encore, malgré la saison (HENRI PETIOT, DIT DANIEL-ROPS, Mort, où est ta victoire?, 1934, page 4) : Ø 7. Les vents bruyans ont fait place aux zéphirs, dont la douce haleine respecte le feuillage tendre qui s'abreuve encore de rosée, et qui joue légèrement sur le berceau des enfants du printems;... CHARLES-FRANÇOIS DUPUIS, Abrégé de l'origine de tous les cultes, 1796, préface, page 146. — Par ellipse " Faire doux, faire un temps doux. Il fait bien doux " (Dictionnaire de l'Académie Française 1798-1878, Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse), Grand Larousse encyclopédique en dix volumes, Dictionnaire encyclopédique Quillet, 1965). 3. [En parlant d'une réalité abstraite ou concrète en rapport avec une certaine gradation, avec une échelle de valeurs] Qui est, reste modéré, sans écart important La taille (...) doit être un passage lent, insensible et doux entre les deux gloires de la femme, sa poitrine et son ventre (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Histoire comique, 1903, page 4) : Ø 8. Et toujours, et du même pas, avec le même geste, il [le semeur] allait (...) derrière, la herse, sous les claquements du fouet, enterrait les germes, du même train doux et comme réfléchi. ÉMILE ZOLA, La Terre, 1887, page 11. — Domaines culin. et techniques Feu doux. Feu donnant une chaleur modérée. Chauffer, cuire, faire fondre à feu doux. (Quasi-)antonyme : feu vif. Auto-cuiseur (...). — Marmite norvégienne pot-au-feu. Récipient entouré d'une forte enveloppe isolante, (...). Il convient spécialement à toutes les cuissons longues à feu doux (boeuf à la mode, pot-au-feu, légumes secs, etc.) (Larousse mensuel illustré. 1926, page 471) : Ø 9. Couvrez parfaitement la marmite de son couvercle, faites bouillir, et après le premier bouillon, laissez sur un feu très doux pour obtenir un mijotement imperceptible pendant trois heures;... Les Grandes heures de la cuisine française, Jules Gouffé, 1877, page 184. 4. Emplois spéciaux. a) Domaine économique. Prix doux. (Quasi-)antonymes : prix fort, élevé. Un architecte de ses amis vint lui demander [à Anatole] , de la part d'un curé, un Christ pour une chapelle de couvent « dans les prix doux » (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Manette Salomon, 1867, page 97 ). b) MÉTALLURGIE. [En parlant d'un métal] Malléable, ductile, dont les parties sont bien liées; non fragile, qui se plie aisément sans se casser. Minerai doux. Un morceau de fer doux (HENRI POINCARÉ, Électricité et optique, 1901, page 35) : Ø 10.... si le métal s'est rompu, c'est qu'il a pris la trempe et que, par conséquent, on a affaire à un acier dur; si, au contraire, l'éprouvette s'est repliée sur elle-même, c'est que l'acier est de nuance douce non trempante; avec un acier extra-doux, il sera possible d'exécuter un nouveau pliage dans un sens perpendiculaire au premier, sans arriver à la rupture. ROBERT BARNERIAS, Manuel des aciéries, 1934, page 154. c) TECHNOLOGIE. Lime douce. Lime dont les dents sont fines, peu saillantes, mordant légèrement et en surface, permettant un travail plus délicat. Remarque : Attesté dans Dictionnaire de l'Académie Française 1835-1932, Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse)-Grand Larousse encyclopédique en dix volumes, DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965. B.— Au figuré. 1. [En parlant d'un état de choses, d'une situation, etc.] Qui est agréable en raison de son calme, de sa tranquillité, etc. Un doux repos, une douce tranquillité. Il jeta un dernier regard sur toutes ces richesses qui lui avaient fait la vie si douce et si heureuse depuis son enfance; il regarda encore une fois ces tableaux (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Christo, tome 2, 1846, page 451) : Ø 11.... ma femme avait souvent l'attention de se promener au soleil et à l'air, à l'heure de midi, en tenant ma fille bien couverte dans ses bras; elle était alors âgée de six mois. Elle jetait souvent des cris dans la chambre, sans doute par le besoin de respirer le grand air; car, dès qu'on l'y portait, elle devenait tranquille, et bientôt elle était saisie d'un sommeil doux et paisible, qui la faisait profiter à vue d'oeil. JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature, 1814, page 157. — Il est doux de (avoir, être, faire, etc.). Il est agréable de... : Ø 12.... « il m'est doux de dormir, il m'est plus doux d'être de pierre, tant que le malheur et la honte durent. Ne rien voir, ne rien sentir, c'est là mon plus grand bonheur. Ne me réveille pas, de grâce! Parle bas!... » ÉLIE FAURE, Histoire de l'art, 1914, page 410. 2. [En parlant d'une personne, d'un trait de son attitude ou de son comportement] a) [En parlant d'une personne] a ) Qui agit sans brusquerie, qui a des mouvements, des gestes mesurés, des manières délicates; qui est d'un caractère facile, d'une humeur égale, qui montre de la modération, de la bienveillance envers autrui. Caractère doux. (Quasi-)synonymes : affable, bon, humain, paisible. Il s'entête, mais quinze jours de régime du bord et des colonies, il deviendra doux comme une gazelle (EUGÈNE SUE, Atar Gull, 1831, page 7 ). Tsilla, l'enfant blond, la fille de ses fils [de Caïn] , douce comme l'aurore (VICTOR HUGO, La Légende des siècles, tome 1, 1859, page 49) : Ø 13.... « je vivais en Suisse, commence-t-il, en homme doux et paisible, fuyant le monde, ne me mêlant de rien, ne disputant jamais, ne parlant pas même de mes opinions... » JEAN GUÉHENNO, Jean-Jacques, Grandeur et misère d'un esprit, 1952, page 206. — Emploi comme substantif. · Domaine de la spiritualité. Les doux. Les débonnaires. [Par référence à la Bible, Matthieu 5, 4] Heureux les doux. Fût-il [l'abbé Donissan] devenu l'un de ces saints dont l'histoire ressemble à un conte, de ces doux qui possèdent la terre, avec un sourire d'enfant-roi? (GEORGES BERNANOS, Sous le soleil de Satan, 1926, page 147 ). · Familier, péjoratif. Faire le doux/la douce. Affecter une fausse douceur. Il fait le doux mais il est au fond très-irascible (Larousse du 19e. siècle. ). Remarque : Attesté aussi dans DICTIONNAIRE DES DICTIONNAIRES (SOUS LA DIRECTION DE PAUL GUÉRIN) 1892, Nouveau Larousse illustré-Larousse du xxe. siècle en six volumes. ß ) Par analogie. [En parlant d'un animal] Qui n'est pas féroce, méchant Un chien doux et caressant (DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE (PAUL ROBERT) ). Cet animal est fort doux (Dictionnaire de l'Académie française. 1932). b) [En parlant d'un trait physique ou moral] Qui exprime un caractère doux. Air doux; douce affabilité, douce bienveillance. À quoi bon chercher tes beautés langoureuses Ailleurs qu'en ton cher corps et qu'en ton coeur si doux? (CHARLES BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal, 1857-61, page 60 ). La bonne et douce figure du docteur disait un peu de ses inépuisables charités (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1893, page 452) : Ø 14. Mais Lucette avait bonne mine, et l'oeil doux, l'oeil d'une femme qui n'a pas de femmes à combattre. GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Chambre d'hôtel, 1940, page 11. — En particulier, littéraire. Style doux. Style aisé, coulant, facile, sans rudesse. Jaufred, Arnaud Daniel Au style doux comme miel (JEAN PAPADIAMANTOPOULOS, DIT JEAN MORÉAS, Sylves, 1896, page 178 ). c) [En parlant généralement d'un trait ou d'un aspect du comportement] Qui touche agréablement l'esprit, le coeur, l'imagination. a ) Domaine affectif. Douce affection, émotion, gaîté, mélancolie; doux souvenir. La douce égalité et la liberté (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Vie de Henry Brulard, tome 1, 1836, page 138) : Ø 15. Oh! la douce journée que celle d'hier, comme elle a été pleine, comme elle a débordé des plus pures joies! Je l'ai passée presque tout entière avec cet inestimable ami, et vous pouvez juger si la causerie et l'imagination ont été bon train. DICTIONNAIRE DES DICTIONNAIRES (PAUL GUÉRIN), Correspondance, 1834, page 133. ß ) Domaine amoureux. Qui est tendre, inspiré par l'amour. Douces paroles, doux propos. Paroles de galanterie, d'amour; propos tendres, galants (attesté dans le Dictionnaire de l'Académie Française 1798-1932, Dictionnaire universel de la langue française (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, Dictionnaire encyclopédique Quillet, 1965, Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse)). Aurai-je ce soir quand je te quitterai le bonheur de te retrouver dans une douce lettre bien tendre et plus précieuse encore pour ton mari? (VICTOR HUGO, Lettres à la fiancée, 1822, page 180 ). Les arbres pleins de doux ébats (VICTOR HUGO, Chansons des rues et des bois, 1865, page 144) : Ø 16. Que de larmes me viennent en pensant à vous, à votre petite Marie, à sa mère qui m'a aimée! Combien son amitié m'était chère, et que les témoignages que j'en ai reçus m'allaient profondément au coeur! Rien ne peut les en effacer, non plus que son souvenir. Je me souviendrai toujours d'elle, et que sa belle âme s'était penchée vers moi pour m'aimer. Que je l'aimais aussi et quel bonheur je trouvais dans notre douce correspondance! EUGÉNIE DE GUÉRIN, Lettres, 1835, page 81. — Vieux, littéraire. Un doux penchant Un penchant amoureux (attesté dans Larousse de la langue française en six volumes). — Spécialement. Un billet doux. Un billet d'amour, de galanterie. C'est une lettre de Camille, seigneur, de votre fiancée. Maître Blazius. C'est un billet doux à un gardeur de dindons (ALFRED DE MUSSET, On ne badine pas avec l'amour, 1834, III, 2, page 55) : Ø 17. Alors, les filles s'en vont avec un baiser sur le cou et un billet doux dans la poche. ÉMILE ZOLA, Nouveaux contes à Ninon, 1874, page 142. — Locution familière. Faire les yeux doux/les doux yeux. Chercher à plaire, chercher à gagner les bonnes grâces, regarder amoureusement. Faire les yeux doux à une femme : Ø 18. Le meunier guetta et il aperçut le galant (...) couché dans l'herbe et feignant de dormir. Françoise, de sa chambre, pouvait le voir. La chose était claire, ils avaient dû s'aimer, en se faisant les doux yeux pardessus la roue du moulin. ÉMILE ZOLA, Les Soirées de Médan, L'Attaque du moulin, 1880, page 9. II.— Locutions diverses. A.— Familier, locution adverbiale. 1. Tout doux. a) Tout doucement, lentement, sans se hâter, se précipiter. Voici qu'un soir, lorsque je marchais tout doux sur les pelouses de Twickenham, apparaît Peltier (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1, 1848, page 521 ). b) Tranquillement, sans s'emporter. S'éclaircir tout doux d'une affaire. c) En exclamation. Invitation au calme, à la modération. — Il faudrait, dit une vieille, lui jeter de l'eau bénite (...) Tout doux! la vieille (...) le jeune seigneur est aussi vivant (...) que vous et moi (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Balthasar, L'Abeille, 1889, page 269) : Ø 19. CLORINDE. — Ne peux-tu te hausser à d'autre ambition Qu'à celle de gagner un méchant million? ANNIBAL. — Tout doux! les millions sont de bonnes personnes Qui ne méritent pas le nom que tu leur donnes... GUILLAUME-VICTOR-ÉMILE, DIT ÉMILE AUGIER, L'Aventurière, 1848, I, page 180. 2. En douce. Sans bruit, de façon discrète, dissimulée en cachette, sans se faire remarquer. Faire (quelque chose), partir en douce. La destinée l'avait mis [Arzaman] , à l'occasion d'un joyeux repas, en face de l'homme qu'il s'agissait de supprimer, comme dit l'argot, « en douce » (LÉON DAUDET, Ciel de feu, 1934, page 251) : Ø 20. Trois grosses péniches vides flottaient de toute la hauteur de leur coque brune sur l'eau presque immobile. — « Tu aimerais faire un voyage en péniche? » demanda gaiement Antoine. « Glisser en douce sur les canaux, entre les peupliers,... » ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, Le Pénitencier, 1922, page 703. 3. À la douce (populaire). Tout doucement, d'une manière douce, modérée; assez bien. Aller (tout) à la douce, faire (quelque chose) à la douce : Ø 21. C'étaient en général « M. Schmoll » ou Gaston Pollonais petit israélite malingre et bafouilleur, qui se chargeaient de ces réquisitions à la douce, dont le patron se montrait fier. LÉON DAUDET, Salons et journaux, 1917, page 128. B.— Locutions verbales figurées. 1. Avaler doux comme lait. " Être crédule ou sans rancune " (Dictionnaire des dictionnaires (SOUS LA DIRECTION DE PAUL GUÉRIN) 1892). Remarque : Attesté aussi dans Dictionnaire de l'Académie Française 1798-1932, DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965, Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse), Nouveau Larousse illustré. 2. Filer doux. Se soumettre, obéir humblement, n'opposer aucune résistance à... Elle [Gervaise] filait doux maintenant, elle pliait ses grosses épaules, ayant compris qu'ils [Coupeau et Lantier] s'amusaient à la bousculer (ÉMILE ZOLA, L'Assommoir, 1877, page 621 ). Insolent avec les timides ou les malades, il [La Jeunnesse] était peureux comme une larve et filait doux avec les gens décidés et solides (LÉON DAUDET, Au temps de Judas, 1920, page 108) : Ø 22. Et nous filerons doux nous autres les malins. Et le plus assuré fera le bon apôtre. Et nos derniers soleils seront sur leurs déclins. Et nos bergers seront deux uniques bergères. Et nous filerons doux par devant ces houlettes. Et nous serons menés par des mains plus légères. CHARLES PÉGUY, Ève, 1913, page 930. STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 18 840. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 37 504, b) 32 754; XXe. siècle : a) 24 844, b) 15 626.