Dictionnaire en ligne: DOUBLÉ, -ÉE, participe passé, adjectif et substantif.

Dictionnaire en ligne: DOUBLÉ, -ÉE, participe passé, adjectif et substantif. I.— Participe passé de doubler* II.— Emploi adjectival. A.— [Avec l'idée de quantité; correspond à doubler I] Qui a été multiplié par deux. Effectifs doublés. Votre garde est doublée. Renvoyez la relève (JEAN ANOUILH, Antigone, 1946, page 164 ). B.— [Avec l'idée d'identité, de complémentarité; correspond à doubler II] 1. [En parlant d'objets] Mis en double. Une reliure en maroquin doublé (Dictionnaire de l'Académie Française). — Spécialement. Garni d'une doublure. Elle prend sur la chaise un kimono de soie nagasaki, doublé soie, et s'y enveloppe (LOUIS FARIGOULE, DIT JULES ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, 1932, page 121 ). 2. Par analogie. Qui est aussi, en même temps. — Un niais doublé d'un poltron! Car! Monsieur! Vous êtes un lâche (GEORGES DUHAMEL, Le Notaire du Havre, 1933, page 227 ). « King Lear » est un grand poème doublé d'un mélodrame (JULIEN GREEN, Journal, 1944, page 152 ). III.— Substantif. A.— Chose, événement qui se répète deux fois de suite. 1. Domaines spécifiques. — BOXE. Répétition rapide du même coup. Un double du droit, du gauche. [Il] boxa souplement, et réussit de merveilleux « doublés » et même « triplés » gauche (L'Œuvre. 18 mai 1941). — CHASSE. Fait de tirer deux pièces l'une à la suite de l'autre, sans prendre le temps d'épauler. Réussir un doublé. Synonyme : coup double. Un curieux homme ce Champion (...). Capable (...) de rater trois perdreaux de suite comme des plus sublimes doublés (PAUL VIALAR, L'Homme de chasse, 1961, page 13) : Ø 1. Mais les deux coups ont été séparés par un intervalle si long, si insolite, qu'il est bien difficile de croire au doublé d'un chasseur... GEORGES BERNANOS, Nouvelle Histoire de Mouchette, 1937, page 1279. — ESCRIME. Coup répété deux fois de suite en trompant la parade de contre. Maurice d'Esparvieu attaqua par des doublés et des battements de fer (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Révolte des anges, 1914, page 332 ). — JEUX (billard). Jouer au doublé (Dictionnaire de l'Académie Française). En atteignant la bille seulement après avoir frappé la bande. 2. Moderne, particulier dans le langage du sport. Série de deux réussites successives. Elle [Marie-Thérèse Nadig] remportait sa deuxième médaille d'or consécutive. On n'avait plus vu ça depuis le doublé de Andy Mead, à Oslo, en 1952 (Ski français. 1972, no. 200 ). B.— ORFÈVRERIE. vieilli. Placage d'une couche d'or, d'argent ou d'un autre métal précieux. Synonyme : plaqué. Il y a très peu [de brunisseuses] qui sachent très bien faire le doublé d'or des tasses (ADOLPHE BRONGNIART, Traité des arts céramiques ou des poteries considérées dans leur histoire, leur pratique et leur théorie, tome 2, 1844, page 647) : Ø 2. À plusieurs reprises, il lui vit ainsi dans les mains des objets gentils, une bague de cornaline, une paire de manches avec une petite dentelle, un de ces coeurs en doublé, des « Tâtez-y », que les filles se mettent entre les deux nénais. ÉMILE ZOLA, L'Assommoir, 1877, page 723. Fréquence absolue littéraire : 666. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 1 111, b) 1 230; XXe. siècle : a) 735, b) 782. Forme dérivée du verbe "doubler" doubler DOUBLER, verbe transitif. I.— [L'opération met en jeu un aspect quantitatif ou mesurable de l'objet] A.— Emploi transitif direct. [Le complément direct désigne une quantité mesurable] 1. Multiplier par deux. Doubler le montant, le prix de quelque chose Lorsque les gens des faubourgs se renfermèrent dans la cité à l'approche des Anglais, le nombre des habitants fut plus que doublé (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Vie de Jeanne d'Arc, tome 1, 1908, page 131 ). Il fallut établir douze cents pilotis de béton. Cela doubla le devis de la bâtisse (MAXENCE VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, page 308 ). Battez l'air avec une lame vibrante, dix fois la seconde, vous avez une forme rythmique. Doublez la fréquence, vous commencez à avoir un son (PIERRE SCHAEFFER, À la recherche d'une musique concrète, 1952, page 51) : Ø 1. La France ne lui demande pas d'armer les citoyens. Ni de doubler les forces de police, et encore moins d'improviser des tribunaux expéditifs. FRANÇOIS MAURIAC, Le Bâillon dénoué, 1945, page 450. SYNTAXE : Doubler la surface, l'intensité, la longueur, le volume de quelque chose; doubler la mise, le loyer. — Spécialement. · Dans le langage scolaire, vieilli. Doubler une classe. " En suivre le cours une seconde année " (Dictionnaire de la langue française (ÉMILE LITTRÉ)). Synonyme moderne : redoubler. · " Doubler l'étape " (Dictionnaire de l'Académie Française). Faire deux étapes au lieu d'une dans la même journée (Dictionnaire de l'Académie française. ). · Doubler la garde, le quart. Multiplier par deux l'effectif de la garde. Il n'y avait plus moyen de fermer l'oeil. On devait doubler les quarts (ÉDOUARD PEISSON, Parti de Liverpool, 1932, page 124 ). · CHASSE. Doubler une pièce de gibier. La tirer une seconde fois (confer Dictionnaire de la chasse (PIERRE-LOUIS DUCHARTRE)) 1973). 2. Par extension. Augmenter beaucoup. — Locutions. · Doubler le pas, l'allure. Augmenter le pas. Dom Claude entendit l'officier qui disait à l'écolier : — Tonnerre! doublons le pas (VICTOR HUGO, Notre-Dame de Paris, 1832, page 329 ). · MARINE. Doubler sur les avirons. Redoubler d'ardeur et de force dans la manoeuvre des avirons (d'après Le dictionnaire de la marine à voile (PIERRE-MARIE-JOSEPH DE BONNEPOUX), Edmond Paris), 1859). — Au figuré. Synonymes : accroître, redoubler. Puis la conversation devient sérieuse et l'on s'entretient de la force vitale du mal, (...) comme pour le réengendrer en le doublant, ce mal (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1888, page 846 ). De le voir si courageux doublait la force des matelots (ÉDOUARD PEISSON, Parti de Liverpool, 1932, page 189 ). B.— Emploi intransitif. Être multiplié par deux. Les salaires ont doublé. On ne construit pas assez vite et le prix des loyers a doublé en peu de temps (PAUL MORAND, New-York, 1930, page 56 ). Mais enfin, nous n'allons pas perdre le contrôle de Sonchelles au moment où cette affaire est en plein essor, s'écria-t-il. Le rendement va doubler (MAURICE DRUON, Les Grandes familles, tome 2, 1948, page 44) : Ø 2. Dans le même temps, la population doublait en Angleterre, triplait en Allemagne et en Italie, quadruplait en Russie, décuplait en Amérique... CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1959, page 236. — [Avec un complément prépositionnel de] Devenir deux fois plus grand, plus important (par son coût, son poids, sa surface, etc.). Les loyers ont doublé de prix : Ø 3. Une sorte de fureur sacrée gonflait Joseph à de tels instants. Son poil se hérissait. Il semblait soudainement doubler de volume, comme certains animaux en posture de combat. GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Suzanne et les jeunes hommes, 1941, page 205. II.— [L'opération de nature concrète ou abstraite, met en jeu deux choses dont l'une est ajoutée à l'autre] A.— [Le sujet est l'agent qui effectue l'opération] 1. [Le double et l'objet doublé sont de nature identique] Mettre en double (en pliant, repliant, etc.). Doubler du fil, de la laine; doubler une feuille de papier, une serviette. Elle [Fanny] baissa le front comme un cheval qui s'encapuchonne, et doubla son menton (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Seconde, 1929, page 224 ). — Spécialement. · CINÉMA. Substituer au dialogue original d'un film un dialogue adapté en une autre langue. Confer doublage. Au participe passé. Quand j'assiste à la projection d'un film doublé en français, je ne constate pas seulement le désaccord de la parole et de l'image (MAURICE MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception, 1945, page 271 ). · MARINE. Doubler les amarres, les cordages, les manoeuvres. Les disposer en double pour les rendre plus solides. Vienne la tempête, on double les amarres (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos, 1935, page 1274 ). · Dans le langage militaire " Doubler les rangs " (Dictionnaire de l'Académie Française). Mettre un seul rang sur deux (Dictionnaire de l'Académie française. ). · MUSIQUE. Doubler une note, une partie. La faire répéter à l'unisson ou à l'octave supérieure. On double quelquefois la quinte, mais il faut faire toujours la tierce (CHARLES MASSON, Nouveau Traité des règles pour la composition, ). · VÉNERIE. [En parlant du cerf] Doubler ses voies. Parcourir deux fois les mêmes voies, revenir sur ses pas, pour tromper ses poursuivants (confer Dictionnaire de la chasse (PIERRE-LOUIS DUCHARTRE)) 1973). — Emploi pronominal à sens passif. Devenir double. Les transepts [des églises gothiques anglaises] se doublent quelquefois vers le choeur (ALBERT LENOIR. L'Architecture monastique, 1856, page 211 ). Et l'étoile se double au flot de la fontaine (HENRI DE RÉGNIER, Poèmes anciens et romanesques, 1890, page 82 ). 2. [Le double et l'objet doublé sont de nature différente] a) Emploi transitif. a ) [Avec un complément prépositionnel de ou avec] Associer (une chose à une autre) dans une forme et une dimension égales, de manière à garnir, orner, renforcer. Doubler une porte d'une tenture; doubler un mur d'une haie. Le bruit assourdissant des charpentiers doublant la coque des navires avec de grandes plaques de cuivre (ALPHONSE DAUDET, Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon, 1872, page 51 ). — Par extension. Associer (une chose complémentaire à une autre). Possédant (...) un talent sans rival pour les conserves de fruits elle [Ursule] s'avisa de doubler la librairie d'une épicerie mystérieuse ouverte aux seuls initiés (ÉDOUARD ESTAUNIÉ, Madame Clapain, 1932, page 2 ). Les émissions radiophoniques secrètes (...) doivent être doublées d'un service de distribution de tracts, de journaux (CHARLES DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1954, page 626 ). · Dans le domaine abstrait Il y a ici deux erreurs à éviter : (...) l'autre est de doubler ce contenu manifeste d'un contenu latent (MAURICE MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception, 1945, page 196 ). ß ) [Sans complément prépositionnel] — JEUX (billard). " Doubler la bande. Frapper la bande avant de frapper la bille " (Dictionnaire de l'Académie Française). — COUTURE. Garnir d'une doublure. Doubler un manteau, une jupe, une veste. Je doublai la pochette avec du satin cerise (SIMONE DE BEAUVOIR, Mémoires d'une jeune fille rangée, 1958, page 121 ). Remarque : Dictionnaire de l'Académie Française enregistre aussi les syntagmes doubler de soie, de toile, de taffetas. — MARINE. Doubler un navire. " Lui faire un doublage de feuilles de cuivre ou de planches " (Dictionnaire de l'Académie Française). b) Emploi pronominal à sens passif. Se doubler de + substantif. a ) [Le sujet désigne une chose] Être associé à (une autre chose plus ou moins semblable ou complémentaire). La mission secrète dont s'était doublée à Dresde la mission ostensible du duc de Richelieu (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Nouveaux lundis, tome 11, 1863-69, page 97 ). La nuit se doublait d'une buée humide (BLAISE CENDRARS, L'Homme foudroyé, 1945, page 304) : Ø 4.... les interdits alimentaires et vestimentaires se doublent même de prescriptions rigoureuses concernant la liberté des mouvements. JULES VUILLEMIN, Essai sur la signification de la mort, 1949, page 250. ß ) [Le sujet désigne une personne] Être en outre, en même temps. Chez Denys Belgrand, l'archéologue se double d'un poète à la Michelet (PAUL BOURGET, Conflits intimes, 1925, page 6 ). B.— [Le sujet désigne ce ou celui qui est en double] 1. [Le sujet et le complément désignent des choses] Constituer le double, la doublure (de quelque chose) : Ø 5. Le côté « africain » aussi l'a frappée : (...) impression fortifiée par les haies de figuiers de Barbarie qui doublent les murs de pierre sèche. VALÉRY LARBAUD. Journal, 1932, page 272. — Domaine abstrait Nos images mentales doubleraient inutilement notre organisme (RAYMOND RUYER, Esquisse d'une philosophie de la structure, 1930, page 161 ). L'univers des lois causales vient doubler l'univers des lois empiriques (JULES VUILLEMIN. L'Être et le travail, 1949, page 98 ). 2. [Le sujet et le complément désignent des personnes] CINÉMA, THÉÂTRE. Remplacer un acteur dans un rôle. Doubler un acteur, une vedette. Je téléphonai aussitôt au théâtre pour qu'on me doublât (PIERRE DRIEU LA ROCHELLE, Rêveuse bourgeoisie, 1939, page 341 ). — [Avec l'idée de duplicité] · Populaire. Doubler quelqu'un.. Le tromper, l'induire en erreur pour en tirer profit. Où qu't'as caché la came? [= Est-ce bien dans cette misérable chambre que tu as caché pour cinq millions de cocaïne?] T'essaie pas de nous doubler, des fois? (LANGUE VERTE ET NOIRS DESSEINS (AUGUSTE LE BRETON), Razzia sur la Chnouf, 1954, page 67 ). · Argot. Doubler une femme. La tromper en prenant une maîtresse. Avec qui il [ton homme] t'a doublée [trompée] ? — Avec la femme de ton ami Riton, Josy l'ordure! (JULES SIMON, Touchez pas au grisbi, 1953, page 124 ). III.— Par extension. [Avec l'idée de mouvement] Dépasser en contournant Doubler un cortège, une file, une voiture. Elle doubla deux tramways, l'omnibus du Panthéon, enfila le nouveau boulevard Raspail (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 1, 1933, page 369 ). · emploi absolu. Dépasser un véhicule automobile en mouvement. Il est interdit de doubler en haut d'une côte (Larousse de la langue française. ). — MARINE. Doubler un cap. Aller au-delà, en passant au large : Ø 6. Jamais fiancés n'ont été plus proches de leur fiancée que les marins bretons du XVIe. siècle, quand ils doublaient le cap Horn et vieillissaient contre le mur des vents contraires. ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Lettre à un otage, 1943, page 392. · Au figuré. Aller au-delà de; triompher (d'une difficulté). Oberman, âgé de vingt-sept ans, traverse la crise antérieure à toute maturité, et double, pour ainsi dire, le cap périlleux de la vie (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Portraits contemporains, tome 1, 1846-69, page 168 ). De 1898 à 1905 on a doublé le cap d'un monde politique nouveau (ALBERT THIBAUDET, Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours, 1936, page 515 ). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 960. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 1 469, b) 1 682; XXe. siècle : a) 1 144, b) 1 237.