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Dictionnaire en ligne: DEVENIR2, verbe intransitif.

Publié le 08/01/2016

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Dictionnaire en ligne: DEVENIR2, verbe intransitif. Être engagé dans un processus évolutif devant aboutir à un changement d'état. I.— [L'état, aboutissement du processus, est exprimé par l'attribut du sujet] A.— [Avec, éventuellement, expression de l'état antérieur, point de départ du processus] 1. Usuel. [Seul est exprimé l'état, aboutissement du processus] a) [L'attribut est un adjectif qualificatif ou un équivalent] a ) [Attribut d'un sujet nominal ou nominal-verbal (infinitif)] — [L'attribut est un adjectif] · [Le sujet désigne un être animé] Des deux adversaires, l'un ne change pas, l'autre change et devient plus fort (JULES MICHELET, Introduction à l'Histoire universelle, 1831, page 404 ). Faut-il qu'on devienne odieux en devenant trop parfait (ERNEST RENAN, Drames philosophiques, Le Prêtre de Nemi, 1885, III, 3, page 577 ). Maîtriser les chameaux qui devenaient nerveux (PIERRE BENOÎT, L'Atlantide, 1919, page 78) : Ø 1. Il est des crimes si odieux qu'à discuter seulement la culpabilité de l'accusé l'on devient aussitôt suspect — comme si l'horreur que doit inspirer le crime devait ici s'opposer à tout examen, et que l'on fût suspect d'immoralité pour avoir gardé la tête libre. JEAN PAULHAN, Les Fleurs de Tarbes, 1941, page 88. · [Le sujet désigne un élément matériel inanimé] La roche devient de plus en plus sèche (GUSTAVE FLAUBERT, Par les champs et par les grèves, 1848, page 314 ). Les lésions sont déjà profondes (...) au moment où elles deviennent accessibles à l'observateur (DOCTEUR ERNEST CADET DE GASSICOURT, Traité clinique des maladies de l'enfance tome 2, 1880-84, page 3 ). Le paysage devint presque invisible (PIERRE-JEAN JOUVE, La Scène capitale, 1935, page 185 ). · [Le sujet désigne un état, une situation, une entité abstraite, etc.] Cette disparité deviendrait plus sensible (JEAN-BAPTISTE SAY, Traité d'économie politique, 1832, page 249 ). Que mon absence lui devînt insupportable (HENRI BOSCO, Le Mas Théotime, 1945, page 183 ). L'être, désormais, m'était devenu en quelque manière, tangible, savoureux (PIERRE TEILHARD DE CHARDIN, Le Milieu divin, 1955, page 160 ). — [L'attribut est un participe, en emploi adjectival] · Participe présent. Le principal courant de la vallée du Creek rouge devenait de plus en plus menaçant (JULES VERNE, L'Île mystérieuse, 1874, page 601 ). Les Irlandais devaient se libérer eux-mêmes en devenant tempérants, justes et charitables (ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, Ariel ou la vie de Shelley, 1923, page 111 ). La lutte se prolonge encore et devient épuisante (ALBERT CAMUS, L'Homme révolté, 1951, page 301 ). · Participe passé. Le combat devient plus vif et plus acharné que la veille (MADAME COTTIN, Mathilde, tome 2, 1805, page 173 ). Cette similitude peut nous devenir connue (Dictionnaire de théologie catholique (A. VACANT, E. MANGENOT) tome 4,1, 1920, page 1213 ). Quand on est devenu bien résigné (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, page 325 ). Par plaisanterie. Quand, en Chine, un Chinois devient décapité (RAOUL PONCHON, La Muse au cabaret, 1920, page 248 ). — [L'attribut est un syntagme nominal préposition] Devenir à charge. Exposer sa vie devint à la mode (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, La Chartreuse de Parme, 1839, page 4 ). Je devins de mauvaise humeur (JOSEPH ARTHUR COMTE DE GOBINEAU, Nouvelles asiatiques, 1876, page 189 ). Presque tous les pneus américains sont devenus de type conducteur (HENRI TINARD, L'Automobile, 1951, page 347) : Ø 2. Pour en terminer avec cette question du commandement allié, il convient d'ajouter qu'une décision des gouvernements en date du 2 mai, supprima le comité exécutif créé trois mois auparavant et devenu désormais sans objet. MARÉCHAL FERDINAND FOCH, Mémoires pour servir à l'histoire de la guerre de 1914-1918, tome 2, 1929, page 44. Remarque : 1. Dans plusieurs exemple, l'attribut adjectivé se trouve au comparatif exprimant ainsi une idée de progression. Confer supra les exemples où l'adjectif (ou son équivalent) est précédé de plus ou de plus en plus. Son état devenoit pire chaque jour (François-René de Chateaubriand, Le Génie du Christianisme, tome 1, 1803, page 441). 2. La documentation atteste pour le genevois le syntagme devenir mort " cesser de vivre, être mort " (Jean Humbert, Nouveau glossaire genevois, 1852, page 152) que l'on trouve en outre chez François-René de Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, tome 2, 1848, page 568 : De Tournai nous allâmes à Bruxelles : là je ne trouvai ni le baron de Breteuil, ni Rivarol, ni tous ces jeunes aides de camp devenus morts ou vieux, ce qui est la même chose. 3. Devenir + adjectif est souvent le doublet d'un verbe (intransitif ou pronominal) dérivé de l'adjectif, offert en alternance : devenir rouge/ rougir; devenir grand/grandir; devenir sage/s'assagir; devenir calme/se calmer. La construction adjectivale permet de suppléer à l'absence de verbe : Son visage [de Maxime de Trailles] devenait livide, rougissait, jaunissait tour à tour (Honoré de Balzac, Gobseck, 1830, page 408); elle permet aussi de nuancer l'expression : bien mûrir " devenir mûr dans de bonnes conditions "; devenir bien mûr " devenir tout à fait mûr ". ß ) [En construction impersonnelle] — Il devient + adjectif + de + infinitif. Il devenait gênant d'écouter des choses désagréables pour chacun (ÉMILE ZOLA, Pot-Bouille, 1882, page 362 ). Il me devint impossible de me contenir (ANDRÉ BILLY, Introïbo, 1939, page 188 ). Il devient difficile de limiter mon expérience à un seul registre sensoriel (MAURICE MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception, 1945, page 263 ). — Il devient + adjectif + que + indicatif. Il devenait pourtant visible que, dans l'esprit et aux regards des Anglais, l'empereur se trouvait à présent plus haut qu'il n'avait été jusque-là (EMMANUEL DIEUDONNÉ, COMTE DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 1, 1823, page 440 ). Il devint manifeste que l'union soviétique ne paraissait plus intéressée à conclure un accord (BERTRAND GOLDSCHMIDT, L'Aventure atomique, ses aspects politiques et techniques, 1962, page 196 ). b) [L'attribut est un substantif] a ) [Substantif sans article ni déterminatif] — [Le sujet désigne une personne; l'attribut désigne souvent un état professionnel] Je deviens maintenant historien sans cesser d'être écrivain de mémoires (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 291 ). Il [son fils] devenait homme de mois en mois : de mois en mois elle [Jeanne] devenait une vieille femme (GUY DE MAUPASSANT, Une Vie, 1883, page 212 ). Les États qui ne sont pas membres de l'organisation peuvent devenir parties au statut de la cour internationale de justice (Charte des Nations-Unies. 1946, page 100) : Ø 3. Les jeunes gens qui se proposaient de devenir maîtres d'école, ou plutôt les jeunes gens à qui on pensait pour en faire des maîtres d'école, pour les faire devenir maîtres d'école faisaient d'abord trois ans à l'école primaire supérieure... CHARLES PÉGUY, L'Argent, 1913, page 1138. · En particulier. [Par opposition à maître et par référence au dicton latin fiunt oratores, nascuntur poetae] On entend répéter tous les jours (...) que la couleur est un don du ciel; que c'est un arcane impénétrable à celui qui n'a pas reçu l'influence secrète; que l'on devient dessinateur et que l'on naît coloriste : rien n'est plus faux que ces adages (CHARLES BLANC, Grammaire des arts du dessin, 1876, page 560 ). On ne naît pas femme, on le devient (SIMONE DE BEAUVOIR, Le Deuxième sexe, tome 2, 1949, page 13 ). · Populaire. Devenir bel homme. " Engraisser " (Charles-Louis Carabelli, [Langage populaire] ). — [Le sujet désigne une chose] Le rêve devient réalité la science devient gloire, et la servitude service (ALFRED DE VIGNY. Servitude et grandeur militaires, 1835, page 129 ). La pesanteur devenant à un certain moment fatigue, et la fatigue douleur (HENRI BERGSON, Essai sur les données immédiates de la conscience, 1889, page 32) : Ø 4. « On a pitié d'un fou; mais quand la démence devient fureur, on le lie. La tolérance qui est une vertu devient alors un vice »... JEAN GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1952, page 153. ß ) [Substantif précédé d'un article défini ou indéfini, ou d'un déterminatif] — [Le sujet désigne une personne] Plusieurs jeunes filles, dont l'une n'a que dix ans, deviennent la proie du vainqueur à la vue de leurs parents captifs (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Tableau historique et critique de la poésie et du théâtre français au XVIe. siècle, 1828, page 187 ). Chateaubriand, l'homme de sentiment et d'enthousiasme, devenait mon prêtre et mon initiateur (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 3, 1855, page 285 ). Tellement elle [Pauline] devenait la chose des autres (ÉMILE ZOLA, La Joie de vivre, 1884, page 1050 ). Je ne sais si Suzanne deviendra jamais une grande comédienne (GEORGES DUHAMEL, Les Maîtres, 1937, page 19) : Ø 5. Pour moi, à vingt-six ou vingt-sept ans, une femme change de sexe, devient autre chose qu'une femme, devient quelque chose qu'on ne désire plus. (...) sans parler de la transformation morale : une femme, après le mariage, peut changer moralement comme elle change physiquement, devenir un autre être, comme un garçon peut devenir à seize ans un autre être que celui qu'il était à quatorze. HENRI DE MONTHERLANT, Le Démon du bien, 1937, page 1234. · En particulier. [Au lieu d'un nouvel état, l'attribut désigne un nouvel être ou une nouvelle substance résultant d'une métamorphose du sujet] Que je devienne l'eau, la tempête et la flamme, La feuille et le sarment (JEAN PAPADIAMANTOPOULOS, DIT JEAN MORÉAS, Les Stances, 1901, page 109 ). Ainsi nous avons la chance d'arriver (...) au moment où (...) Pitoeff devient tout à coup le héros qu'il joue, et se dresse, jeune, illuminé sur le bord d'une tombe (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Jumelle noire, 1938, page 210) : Ø 6.... nous en tenir à cette petite extase qui consiste à regarder les jeunes nageuses partir du fond de l'anse de Paraggi vers la haute mer ensoleillée : nous sortons de nous-mêmes et nous devenons ces beaux corps vigoureux dans l'eau bleue et pure et transparente comme l'air. VALÉRY LARBAUD, Jaune, bleu, blanc, 1927, page 140. Remarque : On rencontre, avec une valeur semblable, un adverbe équivalent d'un substantif, exprimant une idée de progression. N'étais-tu pas mon ami, et n'es-tu pas devenu plus encore? (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibaut, Le Cahier gris, 1922, page 620). — [Le sujet désigne une chose] La culture devient une industrie, une manufacture (JULES MICHELET, Journal, 1844, page 570 ). Le chaland s'évanouit, devient une chose imprécise (ÉMILE MOSELLY, Terres lorraines, 1907, page 296) : Ø 7. L'église devient une grange, le palais devient une ferme, la tour devient un pigeonnier, la maison devient une baraque, la boutique devient une échoppe, le bassin devient un étang, le citadin devient un paysan; la cité est morte. VICTOR HUGO, Le Rhin, 1842, page 297. Remarque : On rencontre parfois un substantif précédé de l'article partitif. Je croyais bien que c'était fini, que j'étais devenu du feu et du bruit moi-même (LOUIS-FERDINAND CÉLINE, Voyage, 1932, page 23). ? ) [L'attribut substantif forme syntagme usuel avec le verbe et se présente tantôt sans, tantôt avec un article défini ou indéfini] — Devenir + (un, l') objet de. Elle [Lamiel] devint l'objet de l'attention générale et bientôt des compliments de tous (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lamiel, 1842, page 155 ). Ce mot devient un objet d'études (DICTIONNAIRE DE CULTURE RELIGIEUSE ET CATÉCHISTIQUE (LOUIS E. MARCEL), Journal, 1919, page 197 ). Les valeurs ne deviennent objet de science (JULES VUILLEMIN, L'Être et le travail, 1949, page 102 ). — Devenir + un/le sujet de. Chacune de ces impressions multiples qui vous attendent à chaque pas devient un sujet de rêverie profonde (MAXIME DU CAMP, Mémoires d'un suicidé, 1853, page 43 ). Le fouriérisme devenait le sujet de cruelles plaisanteries dans le même journal (JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Aventures de Mademoiselle Mariette, 1853, page 58 ). — Devenir + (une, la) source de. Cette conversation, menée à travers le quadrille, devint une source de troubles et de fautes, dont souffrirent les autres danseurs (LOUIS-ÉMILE-EDMOND DURANTY, Le Malheur d'Henriette Gérard, 1860, page 11 ). Bombardant la surface interne de ce cylindre ils en ionisent le métal qui devient la source d'un plus grand nombre de corpuscules animés de faibles vitesses (MAURICE DE BROGLIE, Les Rayons X, 1922, page 134 ). L'objet religieux (...). Source de significations, il devient source de valeurs (Philosophie, Religion (sous la direction de Gaston Berger) 1957, page 3607 ). — Devenir + (un, le) principe de. Cette innocente occupation (...) devint le principe du malheur de ma vie (GABRIEL SÉNAC DE MEILHAN, L'Émigré, 1797, page 1777 ). Le devoir devient principe d'action, source d'énergie (HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal, 1866, page 242 ). Pour ceux qui sont unis déjà, la pensée devient (...) un principe d'union plus parfaite (MAURICE BLONDEL, L'Action, Essai d'une critique de la vie, 1893, page 295 ). — Devenir sujet à. M. Bineau devint sujet à des distractions d'auteur (JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Souffrances du professeur Delteil, 1853, page 195 ). Remarque : Comme pour le verbe être, il y a, en principe, " isotopie " sémantique (animé + animé, inanimé + inanimé, etc.) entre l'attribut et le sujet Mais en raison même du sens du verbe devenir, la correspondance peut être rompue, la position d'attribut devenant le lieu privilégié d'une possibilité de rupture partielle ou totale (créations plus ou moins métaphoriques ou simples fantaisies verbales). Un grès clair [des façades] devenu couleur d'ambre ou chair de mangue (Albert T'Serstevens, L'Itinéraire espagnol, 1963, page 255). Parfois, la surprise est atténuée par des locutions du type une sorte de, en quelque manière. Il était devenu une sorte d'idée du mal. (Henri Bosco, Le Mas Théotime, 1945, page 195). Cet homme malheureux et orgueilleux n'aimait se rappeler ni ses malheurs ni ses humiliations et, devenu une sorte d'apôtre de la vie simple (Jean Guéhenno, Jean-Jacques, 1948, page 61). Confer également Pierre Teilhard de Chardin, loco citato, supra I A 1 a) a ). Ces créations existent dès la langue courante M. Lechevallier (...) est devenu tout miel aux premiers compliments que je lui ai glissés (André Gide, Journal, 1930, page 1003). C'est dans cette position que se placent parfois des jeux d'opposition : L'incident était devenu événement (Durry, Nerval, 1956, page 70); ou des créations " idiolectiques " : Un petit galurin de voyage (...) qui avait fait son temps, était devenu immettable (André Gide, Ainsi soit-il, 1951, page 1197). c) [L'attribut est un pronom ou un syntagme pronominal] a ) [Pronom ou syntagme pronominal non interrogatif] Aussi dévot que le fût devenu le grand tragique (FRANÇOIS MAURIAC, Vie de Jean Racine, 1928, page 192 ). Notre tâche serait moins de faire être celui que nous voulons devenir (Philosophie, Religion (sous la direction de Gaston Berger) 1957, page 4007) : Ø 8. Or je ne l'aimais plus, j'étais, non plus l'être qui l'aimait, mais un être différent qui ne l'aimait pas, j'avais cessé de l'aimer quand j'étais devenu un autre. Or je ne souffrais pas d'être devenu cet autre, de ne plus aimer Albertine;... MARCEL PROUST, Le Temps retrouvé, 1922, page 1038. — En particulier. [Pronom personnel ou possessif] Il lui sembla qu'elle était elle-même cette enfant, sa figure devenait la sienne, sa robe l'habillait (GUSTAVE FLAUBERT, Trois contes, Un Coeur simple, 1877, page 28 ). Il [un homme] m'excitait à devenir plus puissamment moi-même dans la mobilité, l'inconsidération, le déploiement loquace (ALEXANDRE ARNOUX, Écoute s'il pleut, 1923, page 139 ). · [Ou relatif pour reprendre un adjectif anticipé] Il essaie (...) de se reprendre (...) incapable qu'il est devenu de se trouver à la hauteur d'une situation exceptionnelle (ANDRÉ BRETON, Les Manifestes du Surréalisme, 1er. Manifeste, 1924, page 14 ). ß ) [Pronom ou syntagme pronominal interrogatif] — [Interrogation directe] · [Le sujet désigne une personne] Que deviendroit un colon dans ces tristes solitudes...? (MICHEL-GUILLAUME-JEAN, DIT SAINT-JOHN DE CRÈVECOEUR, Voyage dans la Haute Pensylvanie et dans l'état de New-York, tome 3, 1801, page 137 ). Que deviendrons-nous quand tous se détourneront d'une religion rendue impraticable? (HENRI DE MONTHERLANT, Port-Royal, 1954, page 1305 ). [Dans l'usage familier pour s'enquérir sur le sort de quelqu'un qu'on n'a pas vu ou dont on est sans nouvelle depuis quelque temps] J'avais rencontré M. de Nièvres une fois; il m'avait dit : « Que devenez-vous? » ou bien « On ne vous voit plus » (EUGÈNE FROMENTIN, Dominique, 1863, page 217 ). Qu'êtes-vous devenu depuis ce mauvais dîner que je vous ai fait faire? (HENRY BECQUE, Les Corbeaux, 1882, III, 5, page 174 ). « Tu as vu les Dubreuilh? Qu'est-ce qu'ils deviennent? (SIMONE DE BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, page 98 ). En particulier. [Pour exprimer une inquiétude sur le sort du sujet] Je partirai pour Paris (...). J'y verrai les amis de mon père (...). — Et moi, pendant ce temps-là, que deviendrai-je? (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Comment je devins auteur dramatique 1833, introduction, page 2 ). Edgar seul. — Qu'est-ce que je vais devenir? tout ce monde qui est là (...) qui grouille dans les salons (EUGÈNE LABICHE, Edgar et sa bonne, 1852, I, 9, page 229 ). [Avec le verbe à l'infinitif sans sujet explicite] Que devenir à présent? (GUSTAVE FLAUBERT, Salammbô, tome 2, 1863, page 98 ). Que faire? Que devenir? Où aller? Je ne puis cesser de l'aimer (ANDRÉ GIDE, Et nunc manet in te, 1951, page 1154 ). · [Le sujet désigne une chose] Que devient dans tout ceci, dira-t-on, l'unité de pensée préconisée? (PAUL VERLAINE, Œuvres complètes, tome 4, Les Poètes maudits, 1884, page 85 ). — [Interrogation indirecte] Tout en se demandant ce qu'ils deviendraient plus tard (GUSTAVE FLAUBERT, La Tentation de Saint Antoine, 1849, page 438 ). Vous savez ce que sont devenues les actions des sociétés anglaises après la prise de la concession anglaise de Han-Kéou (ANDRÉ MALRAUX, La Condition humaine, 1933, page 261 ). Je restais dans un coin à ne pas savoir que devenir (ELSA TRIOLET, Le Premier accroc coûte deux cents francs, 1945, page 304 ). 2. Plus rare. [Avec expression de l'état antérieur désigné par un adjectif ou un substantif sans article introduit par préposition de] a) Adjectif. Le jour s'éclaircit, et de gris devient blanc (HENRI-FRÉDÉRIC AMIEL, Journal, 1866, page 473 ). M. de Charlus, de dominé devenu dominateur (MARCEL PROUST, Sodome et Gomorrhe, 1922, page 629) : Ø 9. Ses ombres [de Cézanne] , d'opaques qu'elles étaient quand il pratiquait le métier de Delacroix, s'éclairent progressivement et deviennent aussi transparentes que ses lumières, sans cesser de creuser merveilleusement le papier. ANDRÉ LHOTE, Peinture d'abord, 1942, page 156. b) Substantif. Cénée, de fille devenue garçon et invulnérable (JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature, 1814, page 156 ). Puis de chasseur, l'homme serait devenu pasteur, puis agriculteur (Histoire générale des sciences (sous la direction de René Taton) 1957, page 1504 ). B.— [Avec expression de certaines modalités du processus en déroulement] 1. [Expression de la cause ou du moyen] a) [La cause du processus général est exprimée par en ou de quoi, l'idée précise étant explicitée dans le contexte] — En. Un tyran dans l'impuissance est un tigre muselé qui n'en devient que plus féroce (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Essai sur la littérature anglaise, tome 2, 1797, page 116 ). — Voulez-vous que je vous prête des livres, Mademoiselle, si vous vous ennuyez le soir? (quelle joie! elle en devient presque rose!) (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine à l'école, 1900, page 116 ). Sa générosité, qui est proverbiale, revêt souvent une forme si maladroite qu'elle en devient presque blessante (ROGER MARTIN DU GARD, Devenir, 1909, page 39 ). — De quoi. Il n'y a pas de quoi devenir toute blanche, comme si je vous avais frappée au visage (PAUL CLAUDEL, L'Otage, 1911, page 257 ). Alors le claxon marche, marche, il y a de quoi devenir fou! (GEORGES DUHAMEL, Suzanne et les jeunes hommes, 1941, page 220 ). Remarque : La cause précise de l'état, aboutissement du processus, est exprimée soit par de + substantif : L'hôtesse devint rouge de dépit (GUSTAVE FLAUBERT, Madame. Bovary, tome 1, 1857, page 85); soit par de (ou à) + infinitif : Il devint très rouge d'avoir ainsi parlé haut (ÉMILE ZOLA, Nana, 1880, page 1107). Nous devenons pensifs à regarder vivre autour de nous ce monde (PIERRE TEILHARD DE CHARDIN, Le Phénomène humain, 1955, page 167); soit par en + participe présent : Elle devint toute pâle en apercevant un homme qu'elle prit pour lui (HENRI DE MONTHERLANT, Les Jeunes filles, 1936, page 984). b) [Expression du moyen] En vous faisant une science et une règle de la neutralité vous devenez militants (MAURICE BLONDEL, L'Action, Essai d'une critique de la vie, 1893, page 15 ). 2. [Expression de modalités subsidiaires] a) [Rythme du processus] Devenir aussitôt, bientôt, de but en blanc, insensiblement, instantanément, du jour au lendemain, progressivement, promptement, rapidement, subitement, successivement, vite. Elle [Angélique] devint brusquement très rouge (ÉMILE ZOLA, Le Rêve, 1888, page 35 ). Cette garantie n'était pas superflue et me devenait de jour en jour plus nécessaire (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Vie en fleur, 1922, page 361 ). b) [Facilité du processus] Devenir difficilement, facilement, péniblement. Ah! l'atroce angoisse et qui (...) deviendrait aisément le principe d'une sorte de croisade à rebours (PAUL BOURGET, Essais de psychologie contemporaine, 1883, page 63 ). c) [Degré de réalité ou phase de réalisation] — Devenir décidément, fatalement, franchement, naturellement, nécessairement, véritablement. Il est vrai que je deviens effectivement un imbécile, quand je suis en sa compagnie (HENRI DE MONTHERLANT, Pitié pour les femmes, 1936, page 1206 ). — Commencer à, finir par, réussir à devenir. Paris achevait de devenir une ville de fabriques et de manufactures (ALEXIS DE TOCQUEVILLE, L'Ancien Régime et la Révolution. 1856, page 150 ). Chez les nations orientales, par exemple, où le livre antique ne tarde jamais à devenir sacré (ERNEST RENAN, L'Avenir de la science, 1890, page 208 ). Par sa lecture internationale en train de devenir considérable (JOSEPH MALÈGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 1, 1933, page 243 ). d) [Imminence, possibilité de la réalisation] — Apte à, susceptible de devenir. Une bonté qu'on sent prête à devenir agissante (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1882, page 155 ). Je le sentais sur le point de devenir sentimental et bête (JEAN-GEORGES SOULÈS, DIT RAYMOND ABELLIO, Heureux les, 1946, page 283 ). — Pouvoir devenir, menacer, promettre, risquer de devenir. Il eut tant de colère et de chagrin qu'il faillit devenir fou (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 2, 1855, page 356 ). N'est-ce pas annuler tout cet effort par quoi elle [la psychologie de l'art] tend à devenir une réalité à la fois indépendante et neuve, un objet esthétique n'existant que par lui-même? (RENÉ HUYGHE, Dialogue avec le visible, 1955, page 438 ). II.— Emploi absolu, PHILOSOPHIE (et LITTÉRATURE d'inspiration philosophique). A.— [L'accent est mis sur le processus] La vie est mobile. Elle devient, comme tu dis dans ton jargon philosophique (JEAN RICHEPIN, Braves gens, 1886, page 154 ). Nous ne sommes jamais, nous devenons sans cesse (JULIEN GREEN, Journal, 1946, page 177 ). Croire c'est à la fois devenir et être (JEAN LACROIX, Marxisme, existentialisme, personnalisme, 1949, page 118) : Ø 10. La philosophie moderne place ses valeurs à la fin de l'action. Elles ne sont pas, mais elles deviennent, et nous ne les connaîtrons dans leur entier qu'à l'achèvement de l'histoire. ALBERT CAMUS, L'Été, 1954, page 114. B.— [L'accent est mis sur l'aboutissement] Le galop soudain des étoiles N'étant que ce qui deviendra (GUILLAUME APOLLINAIRE, Alcools, 1913, page 108) : Ø 11. Elle [l'histoire] forme pour l'imagination une table de situations et de catastrophes, une galerie d'ancêtres, un formulaire d'actes, d'expressions, d'attitudes, de décisions offerts à notre instabilité et à notre incertitude, pour nous aider à devenir. PAUL VALÉRY, Regards sur le monde actuel, 1931, page 17. — Au passé composé. Être c'est être devenu, c'est avoir été fait tel qu'on se manifeste (SIMONE DE BEAUVOIR, Le Deuxième sexe, tome 1, 1949, page 25 ). — Au participe passé apposé. Je dois, suivant la formule célèbre « devenir ce que j'étais », mais c'est dans un monde lui-même devenu que je dois le devenir. Et dans un monde devenu à partir de ce qu'il est (JEAN-PAUL SARTRE, L'Être et le Néant, 1943, page 172 ). Remarque : 1. On rencontre dans la documentation se devenir comme forme de l'emploi absolu L'artiste au même titre que le penseur s'engage et se devient dans son oeuvre (Albert Camus, Sisyphe, 1942, page 133). 2. La documentation atteste : a) L'emploi adjectival du participe présent. Je voudrais que la danse, et surtout le cinéma harmonisent, dans leur unité devenante, tous ces rapports paradoxaux (Élie Faure, L'Esprit des formes, 1927, page 192). b) L'emploi substantival du participe présent. Le devenir n'est pas devenir d'un devenant, c'est-à-dire de quelque chose qui devient et, par suite, pourrait être et ne pas devenir (Vladimir Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1957, page 25). c) L'emploi substantival (avec valeur de neutre) du participe passé. L'expérience, a-t-on dit justement, ne saurait atteindre le devenir; elle ne saisit jamais que des devenus (Octave Hamelin, Essai sur les éléments principaux de la représentation, 1907, page 126).

« tome 4,1, 1920, page 1213 ).

Quand on est devenu bien résigné (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, page 325 ). Par plaisanterie.

Quand, en Chine, un Chinois devient décapité (RAOUL PONCHON, La Muse au cabaret, 1920, page 248 ). — [L'attribut est un syntagme nominal préposition] Devenir à charge.

Exposer sa vie devint à la mode (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, La Chartreuse de Parme, 1839, page 4 ).

Je devins de mauvaise humeur (JOSEPH ARTHUR COMTE DE GOBINEAU, Nouvelles asiatiques, 1876, page 189 ).

Presque tous les pneus américains sont devenus de type conducteur (HENRI TINARD, L'Automobile, 1951, page 347) : Ø 2.

Pour en terminer avec cette question du commandement allié, il convient d'ajouter qu'une décision des gouvernements en date du 2 mai, supprima le comité exécutif créé trois mois auparavant et devenu désormais sans objet. MARÉCHAL FERDINAND FOCH, Mémoires pour servir à l'histoire de la guerre de 1914-1918, tome 2, 1929, page 44. Remarque : 1.

Dans plusieurs exemple, l'attribut adjectivé se trouve au comparatif exprimant ainsi une idée de progression. Confer supra les exemples où l'adjectif (ou son équivalent) est précédé de plus ou de plus en plus.

Son état devenoit pire chaque jour (François-René de Chateaubriand, Le Génie du Christianisme, tome 1, 1803, page 441).

2.

La documentation atteste pour le genevois le syntagme devenir mort " cesser de vivre, être mort " (Jean Humbert, Nouveau glossaire genevois, 1852, page 152) que l'on trouve en outre chez François-René de Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, tome 2, 1848, page 568 : De Tournai nous allâmes à Bruxelles : là je ne trouvai ni le baron de Breteuil, ni Rivarol, ni tous ces jeunes aides de camp devenus morts ou vieux, ce qui est la même chose.

3. Devenir + adjectif est souvent le doublet d'un verbe (intransitif ou pronominal) dérivé de l'adjectif, offert en alternance : devenir rouge/ rougir; devenir grand/grandir; devenir sage/s'assagir; devenir calme/se calmer.

La construction adjectivale permet de suppléer à l'absence de verbe : Son visage [de Maxime de Trailles] devenait livide, rougissait, jaunissait tour à tour (Honoré de Balzac, Gobseck, 1830, page 408); elle permet aussi de nuancer l'expression : bien mûrir " devenir mûr dans de bonnes conditions "; devenir bien mûr " devenir tout à fait mûr ". ß ) [En construction impersonnelle] — Il devient + adjectif + de + infinitif.

Il devenait gênant d'écouter des choses désagréables pour chacun (ÉMILE ZOLA, Pot-Bouille, 1882, page 362 ).

Il me devint impossible de me contenir (ANDRÉ BILLY, Introïbo, 1939, page 188 ).

Il devient difficile de limiter mon expérience à un seul registre sensoriel (MAURICE MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception, 1945, page 263 ). — Il devient + adjectif + que + indicatif.

Il devenait pourtant visible que, dans l'esprit et aux regards des Anglais, l'empereur se trouvait à présent plus haut qu'il n'avait été jusque-là (EMMANUEL DIEUDONNÉ, COMTE DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 1, 1823, page 440 ).

Il devint manifeste que l'union soviétique ne paraissait plus intéressée à conclure un accord (BERTRAND GOLDSCHMIDT, L'Aventure atomique, ses aspects politiques et techniques, 2. »

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