Dictionnaire en ligne: DÉSIR, substantif masculin.

Dictionnaire en ligne: DÉSIR, substantif masculin. Action de désirer; aspiration profonde de l'homme vers un objet qui réponde à une attente. I.— Absolument. A.— [Le substantif est au singulier, avec l'article le] Mouvement instinctif qui traduit chez l'homme la prise de conscience d'un manque, d'une frustration. Le désir aveugle; l'appel, l'exaltation du désir. Le désir n'est point la volonté; mais seulement une passion de la volonté (JOSEPH, COMTE DE MAISTRE, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, tome 1, 1821, page 431) : Ø 1. La pauvreté garde à ceux qu'elle aime le seul bien véritable qu'il y ait au monde, le don qui fait la beauté des êtres et des choses... le Désir. ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Vie en fleur, 1922, page 341. — En particulier. PSYCHOLOGIE. " Tendance spontanée et consciente vers une fin avec représentation de cette fin " (Glossaire de psychiatrie (PIERRE MARCHAIS) 1970) : Ø 2. Le désir n'est pas virtualité pure. Nous le percevons encore comme sentiment qu'il a déjà mis sa griffe sur tout l'organisme, mobilisé de tous côtés les premiers gestes de sa réalisation, qui tiennent le corps et le psychisme en état d'alerte. EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 424. B.— 1. [Le substantif est au singulier avec l'article un, ou au pluriel] Aspiration instinctive de l'être à combler le sentiment d'un manque, d'une incomplétude. Un désir confus, fugitif, profond. Je suis sans désirs, (...) et supérieure comme quelqu'un qui a mangé plus que son saoûl (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Maison de Claudine, 1922, page 109 ). Un désir haineux qu'il comptait bien assouvir un jour (MARCEL AYMÉ, Travelingue, 1941, page 187 ). SYNTAXE : Un désir constant, continuel, incessant, intense, irraisonné, sournois, vague; accéder, acquiescer à un désir; contenter, contrecarrer, exaucer, exprimer, formuler, réprimer, satisfaire un désir; au gré de ses désirs, selon ses désirs. 2. [La personne qui désire est exprimée] Le désir de quelqu'un; mon, ton... désir. Après avoir résisté opiniâtrement au désir de sa mère, il s'était décidé tout d'un coup (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 1, 1855, page 169 ). Faire la Table des désirs idiots de l'homme (PAUL VALÉRY, Suite, 1934, page 66 ). — Familier, vieilli. À ton (votre) désir. Comme tu (vous) le désires (ez). « Moi, j'f'rai à ton désir. Je n'veux pas t'faire tort » (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Le Retour, 1884, page 169 ). Remarque : Désir se substitue parfois par discrétion aux mots ordre, volonté, dans des contextes où ces termes auraient un caractère trop accusé (confer vos désirs sont des ordres). — Rare. [Le désir concerne plus particulier un attribut de la personne] La tonique en cette occasion satisfait tous les désirs de l'oreille (MATHIS LUSSY, Le Rythme musical, 1911, page 50 ). — En particulier. Substantif + de désir. · Homme, femme de désir(s). Qui désire. Homme de désir, ne laisse donc plus ébranler ta confiance par les injustices de tes semblables (LOUIS-CLAUDE DE SAINT-MARTIN, L'Homme de désir, 1790, page 41 ). Moi, fils par l'esprit des hommes de désirs, je n'engendrerai qu'un froid critique ou un bibliothécaire (MAURICE BARRÈS, Un Homme libre, 1889, page 192 ). Avec elle [Jeanine] , vous n'aurez que la femme de désir et de mort, dont la robe, derrière elle, sème le deuil (ÉMILE ZOLA, L'Ouragan, 1901, III, 4, page 483 ). · Baptême* de désir. Qui est désiré. II.— [Accompagné d'un complément désignant l'objet désiré] Tendance consciente de l'être vers un objet ou un acte déterminé qui comble une aspiration profonde (bonne ou mauvaise) de l'âme, du coeur ou de l'esprit. A.— [L'objet désiré est une chose] 1. [L'objet est une chose concrète] Convoitise d'un bien matériel qui satisfasse l'instinct de possession, un appétit. Le désir du gain, de l'or, des richesses. 2. [L'objet est une chose abstraite] Désir d'éternité, désir des honneurs. Un désir de perfection absolue qui se traduit par (...) l'amour de l'ordre (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 143) : Ø 3.... il [Nerval] obéit, par juvénile désir de gloire, à l'envie de se faire une originalité, qui n'ait plus besoin des modèles classiques... MARIE-JEANNE DURRY, Gérard de Nerval et le mythe, 1956, page 30. a) [Le complément est un nom d'action] Portraits, paysages, (...) natures-mortes, nudités ont tout à tour sollicité son ardent désir de création [de Manet] (CAMILLE MAUCLAIR, Les Maîtres de l'impressionnisme, 1904, page 57) : Ø 4.... Joseph reçut la visite d'un journaliste (...). Comme son désir d'évasion était vif, Joseph Pasquier allait se dérober, mais il pensa qu'il ne fallait jamais refuser de la publicité gratuite. GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, La Passion de Joseph Pasquier, 1945, page 179. b) [Le complément est un infinitif] Le désir de plaire; avoir, caresser, exciter, inspirer le désir de faire quelque chose Un désir ardent de manger lui mouillait la bouche de salive (GUY DE MAUPASSANT, Bel-Ami, 1885, page 107 ). Le désir éperdu de durer et de posséder (ALBERT CAMUS, L'Homme révolté, 1951, page 323 ). — [Le complément est un voeu à caractère solennel] Votre mère a, paraît-il, exprimé souvent à ses compagnons le désir d'être enterrée religieusement (ALBERT CAMUS, L'Étranger, 1942, page 1127 ). c) [Le complément est une proposition complétive] J'ai ce désir qu'à l'heure ardente de ce mois Le bois frais et touffu se serre autour de moi (ANNA DE NOAILLES, Le Coeur innombrable, 1901, page 81 ). — En particulier. · Familier. Avoir désir de + infinitif/que + subjonctif. On amène el'viau autant dire à la cuillère?... et juste au moument qu'on a désir qu'i soy'e vêlé? (ROGER MARTIN DU GARD, La Gonfle, 1928, III, 1, page 1216 ). Les copains (...) avaient désir de retrouver leur libre solitude (GEORGES DUHAMEL, Le Désert de Bièvres, 1937, page 199 ). · Rare. [L'expression de la personne qui éprouve le désir est en concurrence avec celle de l'objet du désir] Le désir des parents de voir leurs enfants. Je le ferai prévenir [le comte de Restaud] du désir que vous avez de le voir (HONORÉ DE BALZAC, Gobseck, 1830, page 424 ). Juste milieu, je t'ai toujours mal reniflé, Malgré tout mon désir de vivre mieux réglé (PAUL VERLAINE, Œuvres complètes, tome 3, Invectives, 1896, page 411 ). B.— [L'objet du désir est une personne] Instinct physique qui pousse l'homme au plaisir sexuel, aux satisfactions des ardeurs de l'amour; convoitise qui pousse à la possession charnelle. Désir amoureux, charnel, coupable, inassouvi : Ø 5. Crains plutôt ce désir d'amour où je me pâme malgré mon âme. Sais-tu si nos baisers satisferaient cette agitation? Veuille ne pas jouer ainsi de mon repos; prends garde que ton haleine n'éveille mon coeur que nous ignorons. MAURICE BARRÈS, Sous l'oeil des Barbares, 1888, page 97. — emploi absolu. Brûler de désir; être ravagé par le désir; assouvir son, ses désirs; le feu, la frénésie, le tourment du désir; péché de désir. À ce souvenir seul, loin de toi, sur ma couche, Je me tords dans l'angoisse infame du désir (PAUL VERLAINE, Premiers vers, 1858-66, page 19 ). Le désir transforme l'être qui nous approche en un monstre qui ne lui ressemble pas (FRANÇOIS MAURIAC, Thérèse Desqueyroux, 1927, page 196) : Ø 6. Sans doute, il [Flaubert] avait ses coups de désir; c'était un gaillard solide dans sa jeunesse et qui tirait des bordées de matelot. ÉMILE ZOLA, Les Romanciers naturalistes, 1881, page 151. · Rare. [En parlant d'un animal] Cerf qui de désir brame (JEAN PAPADIAMANTOPOULOS, DIT JEAN MORÉAS, Les Cantilènes, 1884, page 103 ). C.— Par métonymie. Objet du désir. C'est (tel est) mon seul désir. Je touchais du doigt un de mes désirs les plus ardemment caressés (THÉOPHILE GAUTIER, Tra los montes, 1843, page 145 ). C'était le temps où être du monde faisait mon seul orgueil et où rester du monde était mon seul désir (VALÉRY LARBAUD, A. O. Barnabooth, 1913, page 143 ). PARADIGMES. (Quasi-)synonymes : contextuels. Aspiration, attrait, besoin, caprice, convoitise, concupiscence, envie, espérance, espoir, inclination, penchant, volonté. STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 14 829. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 18 483, b) 14 281; XXe. siècle : a) 25 275, b) 24 441.