Dictionnaire en ligne: DÉLOGER, verbe.

Dictionnaire en ligne: DÉLOGER, verbe. A.— Emploi intransitif. 1. Quitter le logement que l'on occupe (pour s'installer ailleurs). Tout de suite il [J.-J. Rousseau] décida de déloger, et dès le 4 novembre trouva à Montmorency un logement (JEAN GUÉHENNO. Jean-Jacques, 1950, page 236 ). 2. Par extension. Sortir du lieu où l'on est installé. a) [Le sujet désigne une personne] Nous étions assis dans un creux; mais il fallut déloger; le vent froid coulait comme de l'eau, le long des pentes (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos, 1909, page 50 ). — Spécialement. · [En parlant de troupes] Il faut déloger demain avant le matin, reprit Valois... et courir sus aux Flamands pour les culbuter avant le soir (MAURICE DRUON, Les Poisons de la couronne, 1956, page 72 ). · Familier. Synonyme : décamper. Donne-moi ta place, et déloge lestement (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Les Mohicans de Paris, 1854-55, I, 4, page 38 ). · Déloger sans trompette, sans tambour ni trompette. S'enfuir discrètement, sans attirer l'attention. b) Par métaphore. [Le sujet désigne une manifestation de l'esprit humain] Adieu les caprices; (...) ils ont délogé, laissant la place à un esprit de constance et de recueillement (MAURICE DE GUÉRIN, Correspondance, 1838, page 342) : Ø 1.... pouvait-il se retenir de dire : « Où la vertu va-t-elle se nicher? » s'étonnant bien moins au fond de ce que cette vertu se nichait sous les haillons du pauvre, que de ce qu'elle n'avait point délogé de dessous la guenille humaine. CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Port-Royal, tome 3, 1848, page 210. B.— Emploi transitif. [Le complément désigne une personne ou un animal] Déloger quelqu'un.. Lui ôter son logement, le lui faire quitter. Ce n'est pas facile de déloger un renard de son terrier (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Lys rouge, 1894, page 63) : Ø 2.... si l'imprudent restaurait son appartement, le petit Molineux pensait nuit et jour à la manière de le déloger pour réoccuper l'appartement fraîchement décoré; il le guettait, l'attendait et entamait la série de ses mauvais procédés. HONORÉ DE BALZAC, Histoire de la grandeur et de la décadence de César Birotteau, 1837, page 109. Ø 3. Nous gagnons le village afin de nous assurer d'un abri pour nos hommes. On va de case en case; on déloge quelques vieilles femmes qu'on dédommage. ANDRÉ GIDE, Le Retour du Tchad, 1928, page 916. — Par extension. 1. [Le complément désigne une personne] Chasser quelqu'un d'un lieu qu'il occupait. Une centaine d'hommes essayèrent de résister (...) quelques obus les délogèrent en un instant (EMMANUEL DIEUDONNÉ, COMTE DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 1, 1823, page 340 ). a) Par métaphore. La nature ne saurait où mettre le bien et la joie, si auparavant elle ne délogeait pas la douleur (PIERRE LEROUX, Humanité, de son principe et de son avenir, tome 1, 1840, page 73) : Ø 4. Toutes les positions que j'occupe depuis quarante-cinq ans et dont tu n'as pu me déloger, tomberaient une à une si je faisais une seule concession. FRANÇOIS MAURIAC, Le Noeud de vipères, 1932, page 57. b) Spécialement. — Langage militaire. Déloger l'ennemi.. Le forcer à abandonner ses positions. Pour (...) déloger l'ennemi du Chemin-Des-Dames, (...) la 10e. armée avait reçu l'ordre de « préparer une action de son aile droite... » (MARÉCHAL FERDINAND FOCH, Mémoires pour servir à l'histoire de la guerre de 1914-1918, tome 2, 1929, page 213 ). — [Avec une nuance de rivalité] Évincer quelqu'un (d'un poste...). Tous n'avaient qu'une idée fixe, déloger le camarade au-dessus de soi pour monter d'un échelon (ÉMILE ZOLA, Au Bonheur des dames, 1883, page 542 ). 2. [Le complément désigne une chose] JEUX. Déloger la boule, la bille, la dame (d'un adversaire). Lui faire quitter la place qu'elle occupait : Ø 5. La jeune femme, devant la longue table recouverte d'un drap vert, lança son premier palet, qu'elle plaça près du but, figuré par un point blanc. Mais l'empereur, montrant plus d'adresse encore, le délogea et prit la place. ÉMILE ZOLA, Son Excellence Eugène Rougon, 1876, page 168. Remarque : On rencontre chez Du Bos (Journal, 1924, page 184) l'adjectif délogeable au sens de « qui peut être délogé ». Il y a dans la position du « fragmentiste » quelque chose de très fort, d'où il n'est guère délogeable. STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 11 DÉRIVÉS : Délogement, substantif masculin. Action de déloger. Et cependant le château n'était pas achevé de meubler que le signal du délogement fut donné (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 57 ).