Dictionnaire en ligne: DÉCOURAGÉ, -ÉE, participe passé, adjectif et substantif.

Dictionnaire en ligne: DÉCOURAGÉ, -ÉE, participe passé, adjectif et substantif. I.— Participe passé de décourager* II.— Adjectif. A.— Qui a perdu tout courage, toute énergie, force d'âme, confiance. 1. [En parlant d'une personne ou d'une collectivité humaine] : Ø 1. Le peuple a perdu tant de sang; les hommes forts ont été si durs envers eux-mêmes et les autres; ils ont rendu la vertu si lourde, si pénible, que maintenant la nation découragée ne croit plus à rien, et s'abandonne elle-même. ÉMILE ERCKMANN ET ALEXANDRE CHATRIAN, DITS ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, tome 2, 1870, page 397. — Par analogie. [En parlant d'un animal personnifié] : Ø 2. Peu à peu, la cité s'appauvrit et se dépeuple, et ses habitantes, découragées, ne tardent pas à mourir de tristesse et de misère, bien que toutes les fleurs de l'été éclatent devant elles. (...) Les abeilles sont comme les hommes, un malheur et un désespoir prolongé rompt leur intelligence... MAURICE MAETERLINCK, La Vie des abeilles, 1901, page 58. 2. [En parlant (d'un trait) du caractère] Son âme, découragée et flétrie, se ferma sans retour à tous les sentiments doux et tendres (STÉPHANIE FÉLICITÉ DUCREST DE SAINT-AUBIN, COMTESSE DE GENLIS, Les Chevaliers du Cygne, tome 3, 1795, page 11 ). L'optimisme, un moment découragé par les déclarations du gouvernement, remonte (JULIEN GREEN, Journal, 1942, page 224 ). PARADIGMES. Synonymes : abattu, fatigué, las, triste; antonymes gai, encouragé, ranimé, réconforté, stimulé. B.— Par extension. Qui exprime la perte de tout courage. 1. [En parlant (d'un trait) du comportement] Le métro avale tous et tout, les complets détrempés, les robes découragées, bas de soie (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, page 298 ). Hernandez ne parlait pas avec hostilité, mais avec une moue découragée qui courbait la barre de sa moustache noire sur la légère lippe (ANDRÉ MALRAUX, L'Espoir, 1937, page 535) : Ø 3. Il suivait sur son visage les phases d'un espoir toujours déçu, la continuelle révolte d'un désir acharné à se satisfaire. Certains jours, elle était mortellement triste, la face découragée, avec une marche lente qui hésitait à tenter plus longtemps la joie de vivre. ÉMILE ZOLA, La Faute de l'Abbé Mouret, 1875, page 1398. 2. [En parlant de l'expression d'une idée, d'un jugement] Ce ministre émit son opinion découragée avec le dédain d'un Talleyrand ou d'un Metternich (EUGÈNE MELCHIOR, VICOMTE DE VOGÜÉ, Les Morts qui parlent, 1899, page 212) : Ø 4.... je ne sais pas dire les choses affectueuses, moi. Je laissai passer l'après-midi sans parvenir à ouvrir la bouche. J'en fus si désespéré que, le soir venu, je me répandis en propos amers, en propos découragés, décourageants. GEORGES DUHAMEL, Confession de minuit, 1920, page 176. III.— Substantif. Personne qui a renoncé à la lutte, à l'espoir. Ses conversations sur tout, si fermes et si justes, avec les abattus, les découragés qui nous viennent (JULES MICHELET, Journal, 1853, page 215 ). Fréquence absolue littéraire : 687. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 752, b) 976; XXe. siècle : a) 1 137, b) 1 072. Forme dérivée du verbe "décourager" décourager DÉCOURAGER, verbe transitif. A.— Décourager quelqu'un.. Abattre l'énergie physique ou morale. Que de fois ailleurs je l'ai entendue, cette chanson! Mais pourquoi ce soir me décourage-t-elle? (MAURICE BARRÈS, Le Jardin de Bérénice, 1891, page 139) : Ø 1. Conan s'ennuie. (...) Parfois il se lève, s'en va à la fenêtre, fixe longuement la rue vide et revient à mon bureau brouiller mes papiers d'un doigt dégoûté et las. Il sait mettre dans tous ses gestes une veulerie telle, il en rayonne une telle puissance de flemme qu'il décourage même mon gendarme, cependant zélé. ROGER CRÉTIN, DIT ROGER VERCEL, Capitaine Conan, 1934, page 173. — Expression. Se laisser décourager. Je ne me laisserai pas décourager par les paroles impies de cet enfant du siècle (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Lélia, 1833, page 277) : Ø 2. Visite attendue de François Berthault, toujours très sympathique et qui travaille sans se laisser décourager par le très petit nombre de lecteurs obtenus en six ans, et qui ne paraît pas disposé à se laisser exploiter par la vie littéraire. VALÉRY LARBAUD, Journal, 1931, page 252. — Emploi pronominal réfléchi. Perdre courage : Un des médecins français (...) est mort victime de son dévouement. Les autres ne se découragent pas et redoublent de zèle (HENRI DE LATOUCHE, LOUIS-FRANÇOIS L'HÉRITIER. Dernières lettres de deux amans de Barcelone, 1821, page 142 ). — emploi absolu. Ôter tout courage. Dans l'existence nomade que je mène, il y a quelque chose de sublime qui exalte et décourage à la fois (JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, La Fête arabe, 1912, page 274 ). B.— Décourager quelqu'un de quelque chose. Ôter l'envie, le désir d'entreprendre une action, de gagner quelque chose. Synonymes : dégoûter de, dissuader de. Un certain bavardage indolent use l'esprit et décourage des efforts énergiques (GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, De l'Allemagne, tome 1, 1810, page 139) : Ø 3. Été au cimetière Montmartre. C'est une mélancolie qui tombe presque aussitôt dans le vaudeville par le niais bourgeois de la douleur. — Rien ne vous décourage de l'immortalité comme cet exemple de la mort. L'on se sent gagné de l'indifférence pour la survie de son nom... EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1855, page 210. C.— Décourager quelque chose. 1. User, détruire, supprimer un acte de volonté, un sentiment, un trait de caractère. Il y a tant d'êtres en ce monde qui ne songent pas à autre chose qu'à décourager le divin dans leur âme (MAURICE MAETERLINCK, Le Trésor des humbles, 1896, page 208 ). Avec une impétuosité de goujatisme qui décourage notre admiration (LÉON BLOY, Journal, 1902, page 83) : Ø 4.... le jeune Stamply se montra on ne peut plus rebelle aux bienfaits de l'éducation (...) Il découragea successivement la patience de trois précepteurs, qui, de guerre lasse, lâchèrent la partie après y avoir perdu leur latin. Découragé lui-même, le père Stamply se décida à placer son fils dans un des lycées de Paris... JULES SANDEAU, Mademoiselle de la Seiglière, 1848, page 12. 2. Arrêter le développement, l'essor d'un mouvement, d'une action. Synonyme : empêcher : Ø 5.... ici qui se sent la force de lutter? On escalade des rochers, on ne peut pas toujours piétiner dans la boue. Ici tout décourage le vol en droite ligne d'un esprit qui tend à l'avenir. HONORÉ DE BALZAC, Louis Lambert, 1832, page 126. Remarque : On rencontre dans la documentation l'adjectif décourageable. Qui se laisse décourager, qui renonce facilement à tout effort, tout espoir. À petites doses, je mettais au courant ma mère, des réflexions que je récoltais, que ça me semblait pas très brillant toutes mes perspectives... Elle était pas décourageable... Elle faisait maintenant des autres projets, pour elle-même alors, pour une entreprise toute nouvelle, toujours beaucoup plus laborieuse (LOUIS-FERDINAND CÉLINE, Mort à crédit, 1936, page 361). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 696. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 892, b) 976; XXe. siècle : a) 1 067, b) 1 033.