Définition et usage: FAUX1, FAUSSE1, adjectif, adverbe et substantif.
Publié le 14/02/2016
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I. — Adjectif.
A. — [Traduit l'idée d'une erreur, d'une opposition ou d'une déviation par rapport à ce qui est reconnu vrai, juste]
1. [En parlant d'une proposition, d'un énoncé, d'un fait] Qui est contraire à la vérité, ou qui contredit l'existence de quelque chose. Dire quelque chose de faux (sur...), tenir quelque chose pour faux.
a) [Par une erreur de jugement, d'appréciation] Synonyme : erroné. L'énoncé d'un fait ne peut être que vrai ou faux. Il n'en serait pas de même pour une proposition quelconque (HENRI POINCARE, La Valeur de la science, 1905, page 225 ). La science d'aujourd'hui contient encore un certain nombre de faux concepts (RAYMOND RUYER, Esquisse d'une philosophie de la structure, 1930, page 230 ). Une assertion est vraie ou fausse, simplement. Il n'y a place ni pour « en tant que », ni pour une catégorie tierce (JOSEPH MALEGUE, Augustin ou le Maître est là, tome 1, 1933, page 335) :
0 1. — Vous voilà encore avec votre fausse logique! Je vous ai enseigné la logique, mais vous allez à l'extrême et rendez faux, par l'abus des conséquences, ce qui est vrai au point de départ.
AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 3, 1855, page 344.
SYNTAXE : Idée, notion, proposition fausse; principe faux; faux dogmes; fausse morale, religion, conception (de la science); donner, se faire une idée fausse (de quelque chose); tirer une conséquence fausse (d'un principe vrai).
• Il est faux de (+ infinitif), il est faux que (+ subjonctif). Il comprit qu'il était faux qu'on pût aimer deux femmes à la fois (LEON GOZLAN, Le Notaire de Chantilly, 1836, page 153 ). Il serait faux de croire que la première enfance vit dans un état de rêve bien caractérisé et homogène (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 338 ).
b) [Par déformation volontaire de la vérité] Synonymes : fallacieux, mensonger. Il avait trouvé la cuisinière avec un soldat, histoire fausse, uniquement inventée pour produire de l'effet (GUSTAVE FLAUBERT, L'Education sentimentale, tome 2, 1869, page 15 ). Les ragots, les fausses nouvelles, cavalaient tout le département (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Mort à crédit, 1936, page 600 ). D'ailleurs, j'ai déjà en tête la fausse confession que je ferai tout à l'heure à Olivier (MARCEL AYMÉ, Les Quatre vérités, 1954, page 215) :
0 2.... Cavaignac, pour se défendre, nous a appris que sa croyance à la culpabilité de Dreyfus venait d'une fausse confidence du général Mercier, le criminel originel, qui d'ailleurs n'avait pas osé donner ce mensonge en pâture à ses collègues.
GEORGES CLEMENCEAU, Vers la réparation, 1899, page 497.
SYNTAXE : Allégation fausse; faux avis, bruits, propos; fausse information; faux témoignage (par métonymie faux témoin); donner un faux nom, une fausse adresse; il est faux que, il est faux de.
2. Qui n'est pas conforme à un modèle, à un étalon.
a) Qui ne correspond pas à ce qui est attendu ou escompté.
— [En parlant de mesures] Le baromètre descendit à vingt-sept pouces dix lignes; mais comme il nous avait donné plusieurs fois de faux indices, nous continuâmes notre route (Voyage de la Pérouse autour du monde (MILET DE MUREAU) tome 2, 1797, page 389 ).
Spécialement. Fausse coupe (ou faux métrage). Ce qui reste d'une pièce d'étoffe débitée, mais qui n'est pas suffisant, notamment pour faire un vêtement.
• Au figuré. Jemingham. — Je pèserai chaque parole. Mac Allan. — Et pas de faux poids, hein? (ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Laird de Dumbiky, 1844,1, 2, page 9 ).
— [En parlant d'opérations ou de manifestations de l'esprit] Calcul, problème faux; interprétation fausse; faux raisonnement; fausse citation; faire un faux sens. De fausses appréciations, où le symptôme est pris pour la cause et le résultat pour le principe (AUGUSTE COMTE, Cours de philosophie positive,tome 5, 1839-42, page 516 ). Si du moins la vie était un calcul qui se puisse recommencer (...) mais autant croire qu'on corrigera une soustraction fausse en faisant une addition juste (MAURICE BLONDEL, L'Action, Essai d'une critique de la vie, 1893, page 195 ). On peut être plus sensible aux maux d'autrui, qu'à ses propres maux (...). De là un faux jugement sur la vie, qui empoisonne la vie (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos, 1910, page 94 ).
— [En parlant des facultés d'une personne]
• Avoir l'esprit, le goût, le jugement faux. Juger, raisonner d'une façon qui ne permet pas d'atteindre la vérité. On lui a rendu l'esprit faux, on l'a retenue sans cesse dans la terreur des devoirs chimériques; on ne lui a pas donné le moindre sentiment des devoirs réels (ÉTIENNE PIVERT DE SENANCOUR, Obermann, tome 2, 1840, page 28 ). Rémusat le juge [Lamartine] très ambitieux, très positif, d'une grande suite de volonté, mais d'un faux jugement (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE- BEUVE, Mes Poisons, 1869, page 80 ).
Par métonymie. Un esprit faux. Personne qui a l'esprit faux. L'obstination étroite des esprits raides, ou (...) l'obtusion des esprits faux (EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 641 ).
— En particulier.
• Éducation, instruction fausse. Qui n'inculque pas des principes vrais, la manière de raisonner juste. Il est peu d'artistes (...) qui ne s'aperçoivent (...) que le temps leur manque (...) pour recommencer sur nouveaux frais une instruction fausse ou incomplète (EUGÈNE DELACROIX, Journal, 1857, page 24 ).
• Prendre une fausse direction, faire fausse route. Se tromper sur la direction à prendre (au propre et au figuré). Pour la seconde fois, l'interprétation erronée du document venait de jeter sur une fausse piste les chercheurs du Britannia (JULES VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, tome 2, 1868, page 226 ). Elle cessa de se défendre d'avoir connu un Maubel, préférant laisser le jaloux s'égarer sur une fausse piste (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Les Dieux ont soif, 1912, page 206 ).
• Vers faux. Qui n'a pas le nombre voulu de syllabes. « Le coeur a ses raisons que la raison ne connaît pas ». (...) « Que la raison n'a pas », rectifia-t-elle (...): « sans ça, le vers serait faux » (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, La Belle saison, 1923, page 851 ).
b) [Généralement en parlant d'actes ou de leur résultat] Dont l'accomplissement ne correspond pas à l'intention, n'aboutit pas ou subit une déviation. Faux bond*, départ (des coureurs), mouvement. Lucien, essoufflé par cet exercice, avait fait un faux pas et s'était étalé au beau milieu d'une plate-bande (ÉMILE ZOLA, Une Page d'amour, 1878 page 839 ). Les jambes de son pantalon soigneusement remontées, afin que l'étoffe ne prît point de faux plis aux genoux (ANDRE THEURIET, La Maison des deux barbeaux, 1879, page 111 ). Un accident (...) avait eu lieu en gare. Une fausse manoeuvre. Un cheminot écrasé (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 105 ).
• Fausse position. Instable. Je lui fais remarquer la fausse position de cette pierre, mais inutilement; elle y pose le pied, tombe et prend une entorse (MAURICE DE GUÉRIN, Correspondance, 1837, page 316 ).
Au figuré. Fausse position; situation, position fausse. Délicate, équivoque. Je vais, mes enfants, mettre un terme à la fausse position où je me trouvais depuis si longtemps (...) je viens vous annoncer mon mariage (HONORE DE BALZAC, La Cousine Bette, 1846, page 357 ). Il passe ses soirées à me dire que nous sommes dans une situation fausse et que je le fais vivre en état de péché mortel (ROBERT DE FLERS, GASTON ARMAND DE CAILLA VET, Monsieur Brotonneau, 1923, II, 4, page 16 ).
• Par analogie. Douleur fausse. Qui n'est pas franche. Une douleur aiguë et fausse lui sciait l'épaule (JEAN-PAUL SARTRE, La Mort dans l'âme, 1949, page 24 ).
— En particulier. Qui manque son but (par défaut d'habileté, de justesse d'appréciation d'une situation). Fausse démarche, tactique. Le gouvernement, par ses fausses mesures, risque de faire mourir le pauvre de faim (ALEXIS DE TOCQUEVILLE, L'Ancien Régime et la Révolution. 1856, page 285 ). Le fils n'avait rien eu de plus pressé que de perdre dans une fausse spéculation ce champ et cette maison (VICTOR HUGO, Les Misérables, tome 1, 1862, page 781) :
0 3.... cette manie qu'ont les gens de vous regarder fixement quand ils vous parlent (...) pour être bien sûrs que vous les écoutiez. Faux calcul d'ailleurs, car dans ces cas-là, je ne pense plus qu'à m'échapper...
FRANÇOISE SAGAN, Bonjour tristesse, 1954, page 156.
c) Domaine esthétique. Qui est contraire à la justesse, au naturel.
— MUSIQUE. Qui n'est pas juste, qui n'est pas dans le ton. Accord, son faux. Un petit clairon (...) souffla dans son instrument un rappel pas correct, aux notes fausses, mais en mesure, mais vibrant (PAUL VERLAINE. Œuvres complètes, tome 4, Louise Leclercq, 1886, page 138 )
• Par métonymie.
Qui fait entendre des sons faux. Piano faux; voix fausse. Cette fanfare est fausse et criarde (HENRI MEILHAC, LUDOVIC HALÉVY, La Belle Hélène, 1865,1, 11, page 200 ).
Qui ne perçoit pas les sons exactement. Oreille fausse. L'ouïe est quelquefois originairement fausse, soit que les deux oreilles n'entendent point à l'unisson (...) soit que dans (...) chacune d'elles (...) il se trouve des causes communes de discordance (PIERRE CABANIS. Rapports du physique et du moral de l'homme, tome 1,
1808, page 435 ).
• Par analogie. Voix fausse, rire faux. Désagréable à entendre comme une note fausse. Sa voix fausse, tantôt haute, tantôt basse, procédait par brusques changements de tons et glapissements bizarres (THEOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, page 29 ). Un rire sec, nerveux, frémissant, un de ces rires faux qui semblent devoir casser les verres fins (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, La Bûche, 1882, page 782 ).
• Par extension. Fausse note. Note juste en elle-même mais qui n'est pas la note prévue dans la partition et choque l'oreille. Elle se remit à jouer (...) et elle faisait fausse note sur fausse note. Il ne s'en apercevait pas (ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Le Matin, 1904, page 193 ).
Au figuré. Qui détone, qui n'est pas en harmonie avec l'ensemble auquel on se réfère. L'hôtel du banquier était très beau. Un grand luxe, beaucoup de jolies choses et très peu de fausses notes (SIBYLLE-GABRIELLE-MARIE-ANTOINETTE DE RIQUETTI DE MIRABEAU, COMTESSE DE MARTEL DE JANVILLE, DITE GYP, Leurs âmes, 1895, page 305 ).
— Domaine visuel.
• Couleur fausse. Qui ne présente pas un caractère de pureté, de naturel. Ton faux; nuance fausse. La lueur d'un incendie (...) répandit sur toute cette scène une teinte fausse et blafarde, qui n'est ni le jour ni la nuit (ALPHONSE DE LAMARTINE, Souvenirs, impressions, pensées et paysages pendant un voyage en Orient (1832- 1833) ou Note d'un voyageur, tome 1, 1835, page 220 ). Un nuage venu du couchant, d'un rose faux et acide, colorait vaguement son lâche vêtement blanc (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Seconde, 1929, page 98 ). Quant aux arbres, on les aurait cru peints, de ce vert faux, brutal, acide qui leur prête le ton d'un décor de théâtre (FRANCIS CARCO, Nostalgie de Paris, 1941, page 155 ).
• Faux jour, jour faux. Mauvaise lumière qui altère l'apparence des choses. Faux jour de soupirail, du crépuscule. A toute heure, ce jour double et faux de la fenêtre insuffisante et des ampoules excessives éclaire Rézi d'une lumière théâtrale (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine en ménage, 1902, page 120 ).
De gros nuages d'orage montaient sur l'horizon en volutes lourdes, fondus au ras de la mer dans un reste de faux jour livide (JULIEN GRACQ, Le Rivage des Syrtes, 1951, page 231 ).
Au figuré. Apparence trompeuse. Comme tu outres tout! Comme tu mets tout dans un faux jour! (JEAN GUEHENNO, Jean-Jacques, 1950, page 116) :
0 4. Mme. Sand fait de Maurice un sceptique, un grand poète à la façon de Byron, et cela m'affligeait de voir présenter sous ce faux jour le nom de mon frère... EUGÉNIE DE GUÉRIN, Journal intime, 1840, page 384.
— LITTERATURE, THEATRE. Qui est contraire au naturel, à la vraisemblance. Genre, style faux; déclamation fausse; caractère, personnage faux; psychologie (d'un personnage, d'une pièce) fausse. Synonyme : affecté. Quant aux autres acteurs, il est impossible d'avoir un débit plus faux et plus affecté, des gestes plus exagérés et plus contraires au bon sens (ETIENNE-JEAN DELECLUZE, Journal, 1825, page 270 ). Quelquefois, dans les plus vivants [des personnages de Balzac], une phrase ou une action fausse indique que l'inspiration a manqué (HYPPOLYTE-ADOLPHE TAINE, Nouveaux essais de critique et d'histoire, 1865, page 26 ). D'ordinaire les romans lui semblaient faux et puérils (EMILE ZOLA, Une Page d'amour, 1878, page 846) :
0 5. Lu Quatre-vingt-treize que je n'avais pas ouvert depuis des années. Admiration totale pendant deux cents pages, puis tout à coup, la lecture devient impossible : c'est trop fabriqué, trop uniment faux.
JULIEN GREEN, Journal, 1945, page 119.
• Par analogie. [En parlant de l'attitude d'une personne] Je renonce à combattre votre penchant : (...) je craindrais de jouer le rôle bête et faux d'un froid pédant (AUGUSTE BARBIER, Satires, 1865, page 55 ). N'avait-il pas [le docteur] daigné parfois l'élever jusqu'à lui? D'un geste aussi faux que l'était cette phrase, elle [Maria] saisit la main du docteur, l'approcha de ses lèvres (FRANÇOIS MAURIAC, Le Désert de l'amour, 1925, page 104 ).
3. Qui est fondé sur une erreur, qui n'est pas justifié. Comme j'ai deviné que de fausses terreurs vous inquiétaient, je suis venu (JOSEPHIN PELADAN, Le Vice suprême, 1884, page 243 ). Mon petit, méfie-toi de la « fausse vocation ». La plupart des existences manquées, des vieillesses aigries, n'ont pas d'autre origine (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, Epilogue, 1940, page 949 ). Hier après-midi, il y a eu une fausse alerte d'invasion due à l'erreur d'un radiotélégraphiste (JULIEN GREEN, Journal, 1944, page 116) :
0 6.... j'ai eu de bien grands torts envers vous! — Et mettant de côté toute fausse honte, le poète confessa franchement sa folle conduite...
ANDRÉ THEURIET, Le Mariage de Gérard, 1875, page 185.
SYNTAXE : Fausse alarme; fausse crainte, espérance, joie, pudeur; faux honneur, point d'honneur; faux pressentiment; fausse impression, reconnaissance.
• Faux problème, dilemme; fausse antinomie, difficulté. Que l'on pose, que l'on envisage à tort :
0 7. La méthode de Charles Perrault, qui consiste à prendre des anciens pour les opposer aux modernes, nous fournit un bon type de faux problème (...). Ces auteurs latins (...) disposés parallèlement à des auteurs français, c'est une fiction oratoire. Ce qui existe réellement, ce qui vit et ce qui dure, c'est une suite...
ALBERT THIBAUDET, Réflexions sur la littérature, 1936, page 248.
B.— [Traduit l'idée d'une ressemblance trompeuse, d'une imitation ou d'une contrefaçon] Antonyme : vrai, véritable, authentique.
1. Qui n'a que l'apparence de la chose réelle, sans en avoir les caractéristiques, les qualités essentielles.
a) Domaine concret ou sensible. Faux brillant, chic, luxe; faux chef-d'oeuvre; fausse élégance. La fausse distinction et la politesse de pacotille des hommes distingués, des hommes polis de l'Empire (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1870, page 575 ). Un magnifique et singulier képi (...) qui donnait à son Altesse un faux air de général mexicain (ALPHONSE DAUDET, Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon, 1872, page 115). Moins grande qu'elle ne semblait, elle était une fausse maigre, avec de belles épaules, des bras harmonieux (ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Les Amies, 1910, page 1160) : 0 8. L'appartement occupé par ce ménage (...) offrait les trompeuses apparences de ce faux luxe qui règne dans tant d'intérieurs. Dans le salon, les meubles recouverts en velours de coton passé, les statuettes de plâtre jouant le bronze florentin, le lustre mal ciselé (...), tout chantait misère...
HONORÉ DE BALZAC, La Cousine Bette, 1846, page 52.
• Faux ménage. Couple non marié légalement. Joseph prétend que papa n'a pas moins de deux faux ménages, et il cite les adresses (GEORGES DUHAMEL, Combat contre les ombres, 1939, page 72 ).
• [Au théâtre et par comparaison dans la vie courante] Fausse sortie. Sortie simulée suivie d'un retour presque immédiat. Tous les convives étaient partis, Courtenay, après une fausse sortie, revint au moment où elle passait dans sa chambre (JOSÉPHIN PÉLADAN, Le Vice suprême, 1884, page 161 ).
Par analogie. Un faux dégel s'était produit dans la semaine, puis le froid avait recommencé (ÉMILE ZOLA, Le Rêve, 1888, page 18 ).
— En particulier, dans de nombreux domaines. [Pour désigner une chose ayant une certaine ressemblance, présentant un certain rapport ou faisant double emploi avec la chose proprement désignée par le substantif]
• BOTANIQUE, ZOOLOGIE. Faux acacia*, bambou, cèpe, ébénier, poivrier; faux bourdon2*; fausse chenille; faux terrier. Il est une fausse oronge, de même fumet que l'autre, et qui recèle un venin mortel (JOSEPH DE PESQUIDOUX, Chez nous, 1921, page 168 ).
• ANATOMIE, PATHOLOGIE, PHYSIOLOGIE. Fausses côtes*, pattes; fausse narine; fausse angine de poitrine; faux croup; fausse couche*, grossesse; faux jumeaux. Voulez-vous m'aider à soigner une diphtérique; (...) il faudrait la tenir pendant que j'enlèverai les fausses membranes de sa gorge (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Misère humaine, 1886, page 649 ).
• Domaines techniques ARCHITECTURE. Fausse cloison; faux mur, plafond, plancher. COUTURE. Faux col*, ourlet. IMPRIMERIE. Faux titre. MARINE. Faux bras, pont; fausse quille. VÉNERIE. Faux arrêt, rembuchement. MUSIQUE. Faux-bourdon (voir bourdon2 II A).
b) Domaine abstrait Fausse victoire; faux répit; fausse vertu; faux devoir. Ces faux biens que le vulgaire envie, Gloire, puissance, orgueil (ALPHONSE DE LAMARTINE, Harmonies poétiques et religieuses. 1830, page 477 ). Tout vaut mieux que le faux amour, le désir qu'on prend pour la passion (PAUL CLAUDEL,
Le Père humilié, 1920,1, 3, page 506 ). La vraie paix, celle qui vient de Dieu, et non cette fausse paix qui suit l'assouvissement de nos convoitises (JULIEN GREEN, Journal, 1942, page 206) :
0 9. Nous avons rencontré cent fois (...) ces ambivalences vertueuses : (...) la fausse chasteté des refoulés, la fausse pitié de la sensiblerie, le faux amour des maniaques de la protection et du dévouement égocentrique, la fausse bonté des faibles...
EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 733.
c) [En parlant d'un être] Faux génie, patriote, savant Ce journal du mensonge, le Figaro, célébrant le faux honnête homme comme l'abbé Roussel, le faux homme de talent, comme... comme... (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1889, page 957 ). Il revoit (...) tant de faux révoltés, si éloquents dans le monde, qu'il a vus à ses pieds, risibles! (GEORGES BERNANOS, Sous le soleil de Satan, 1926, page 235) :
0 10. Pour Gladstone, le beaconsfieldisme était une épouvantable hérésie qui avait souillé l'âme du peuple anglais (...). Maintenant le pays commençait à comprendre
qu'il avait suivi un faux prophète.
ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, La Vie de Disraeli, 1927, page 314.
• Faux dieu. Ces gens-là n'ont que leur patriotisme. Laisse-leur ce faux dieu à adorer (ERNEST RENAN, Drames philosophiques, Le Prêtre de Nemi, 1885, V, 1, page 596 ). Tous les faux dieux, toutes les philosophies païennes [se taisent] , dès que le Christ apparaît (PAUL CLAUDEL, Un Poète regarde la croix, 1938, page 203 ).
2. Qui est l'imitation, la contrefaçon de quelque chose.
a) Qui est le résultat d'une contrefaçon avouée ou non. Bijoux faux; faux diamant; fausse perle; fausse dentelle, fourrure; faux acajou, marbre; rideaux en faux gobelins. Les poils de lapin de la fausse hermine et de la fausse martre (EMILE ZOLA, Au Bonheur des dames, 1883, page 390 ). Tu as cette horreur de toute surface libre qui a engendré les faux tanagras, les cache-pot, la végétation des cristaux (JACQUES CHARDONNE, L'Epithalame, 1921, page 182 ). Ces petites maisons blanches où étaient peints de faux balcons, de fausses portes, de fausses fenêtres, en couleurs fanées (HENRI DE MONTHERLANT, Les Bestiaires, 1926, page 507) :
0 11. A l'autel faux-gothique,
Dont le faux byzantin Reluit de fausses pierres En toute vérité.
ROBERT, COMTE DE MONTESQUIOU-FEZENSAC, Les Hortensias bleus, 1896, page 95.
— [En parlant des attributs d'une personne] Fausse barbe; faux sein, cheveux; tour de faux cheveux; fausses dents. Synonyme : postiche. Il jouissait de tous les membres que Dieu a donnés à l'homme : sain et entier, ni taie sur un oeil, ni faux toupet, ni faux mollets (HONORE DE BALZAC, La Maison Nucingen, 1838, page 603 ).
b) Qui reproduit l'apparence de quelque chose frauduleusement ou pour tromper.
— [En parlant d'un objet] Synonyme : falsifié. Ces choses qui ne sont des objets d'art que pour les femmes, un faux pastel de Boucher, de faux pastels de Chardin (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1862, page 1188 ). J'ai des faux papiers qui me permettraient de rentrer facilement en Suisse (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 589) :
0 12.... cet escroc érudit (...) employait à fabriquer de faux palimpsestes un labeur et une science dont la centième partie eût suffi à lui assurer une situation plus lucrative, mais honorable...
MARCEL PROUST, Du côté de chez Swann, 1913, page 132.
SYNTAXE : Faux assignat; fausse monnaie (par métonymie faux-monnayeur); pièce de fausse monnaie; fausse pièce; pièce fausse; fausse clef*.
• Par extension. [Seule l'idée de fraude subsiste] Faux sel. Sel de contrebande; par métonymie, faux saunier. Ils montraient grande prétention d'être nobles alors que l'arrière-grand-père se mêlait de faire des convois de faux sel (HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes, 1925, page 133 ).
— [En parlant du comportement d'une personne] Qui est feint, simulé. Fausse aménité, bonhomie, camaraderie, gaîté, humilité; faux soupirs. Le petit salon retentit de la fausse tousserie d'un homme qui voulait dire ainsi : « Je vous entends » (HONORE DE BALZAC, Le Cousin Pons, 1847, page 30 ). Je t'en prie, pas de fausse modestie. Tu sais que le refus des louanges est le désir d'être loué deux fois (HENRI DE MONTHERLANT, L'Exil, 1929, II, 5, page 62 ). Cette fausse désinvolture qui est le signe d'un grand embarras (ROGER CRÉTIN, DIT ROGER VERCEL, Capitaine Conan, 1934, page 103) :
0 13. Mais il était utile que nous revissions (...) la petite Marie, son faux regret, ses larmes volontaires, et sa venimeuse gentillesse...
GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Jumelle noire, 1938, page 185.
• Fausse attaque. Attaque secondaire destinée à faire diversion. Le prince de Waldeck devait tenter un assaut, tandis que (...) nous ferions diversion par une fausse attaque sur la place du côté de la France (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1, 1848, page 412 ).
— [En parlant d'une personne]
• [Le substantif indique une qualité sociale ou morale] Qui prend une identité, une qualification qu'elle n'a pas. Faux Anglais; faux prêtre; faux bonhomme, dévot, frère; fausse ingénue. Ces faux braves qui s'insultent et font battre leurs témoins (NÉPOMUCÈNE LEMERCIER, Pinto, 1800,1, 2, page 35 ). Il y a tant d'espions, de fausses infirmières, etc. (HENRI DE MONTHERLANT, Le Songe, 1922, page 194 ). Vuillaume est un faux camarade. Il sourit, d'un air débonnaire; mais il prépare sournoisement des coups de sa façon (GEORGES DUHAMEL, Cécile parmi nous, 1938, page 137) :
0 14. Il n'y a rien de si méprisable que le faux ami, celui qui accepte tous les dévouements, tous les sacrifices, et qui n'a rien de pareil dans son coeur à donner en échange.
ALPHONSE KARR, Sous les tilleuls, 1832, page 295.
Au figuré. [En parlant de mots de langues différentes] Faux-amis. \" Qui sont d'étymologie ou de forme semblable mais de sens partiellement ou totalement différent \" (Dictionnaire de la linguistique (GEORGES MOUNIN) 1974).
• [Le substantif désigne une personne particulier ou un de ses attributs] Qui affiche des sentiments qu'en réalité elle n'a pas; à qui on ne peut se fier. Homme faux; coeur faux; nature fausse; air, oeil, regard faux; dégaine, mine fausse. Familier faux comme un jeton, faux jeton* Synonymes : hypocrite, sournois; antonymes : franc, sincère, vrai. Il avait pris la plus triste idée de Zola (...) il s'était trouvé en présence d'un être faux, retors, hypocrite (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1886, page 562 ). Elle n'était point fausse, étant seulement femme, étant changeante et variable, mais sans calcul (CHARLES-FERDINAND RAMUZ, Aimé Pache, peintre vaudois. 1911, page 240 ). Soudain une expression basse et fausse enlaidit son visage (ROGER MARTIN DU GARD, Un Taciturne, 1932, III, 8, page 1340) :
0 15. Il n'y a presque que des hommes à demi faux. — Ayez donc un beau et pur regard si vous voulez tromper ou du moins les prunelles de marbre, ne commencez pas (...) par mettre la main sur votre bouche, les doigts en l'air vers le front, car il est impossible de plus s'avouer faux [italiques dans le texte] qu'en agissant ainsi... JULES BARBEY D'AUREVILLY, Mémorandum 1, 1837 page 116.
Par métonymie, rare. Qui est le fait d’une personne fausse. La flatterie, la servilité, la bassesse, une fausse habileté souple et patiente, conduisent plus sûrement aux emplois que le génie et la vertu (FÉLICITÉ-ROBERT DE LAMENNAIS, De la Religion considérée dans ses rapports avec l'ordre politique et civil, 1825, page 34 ). Je vous laissai parler; me refusant à croire (...) qu'un dessein si faux pût séjourner dans l'âme (FRANÇOIS PONSARD, Lucrèce, 1843, IV, 3, page 80 ).
Remarque générale : Faux entre comme premier élément de compositions avec certains noms (séparé ou non par un tiret du nom qui suit) : a) pour désigner des choses qui ne sont pas conformes à ce que l'on attend et quand le composé prend un sens figuré : faux bond*, faux pas*; b) lorsqu'il indique que la chose est improprement désignée par le nom mais présente seulement un rapport, une ressemblance avec l'original : faux acacia*, faux ébénier*; faux bourdon*, faux col*, fausse couche*, faux filet*; faux-amis (sens figuré, confer B 2 b); faux-semblant; c) avec des noms qui sont essentiellement ou uniquement associés à cet adjectif : faux-fuyant, faux-monnayeur.
II. — Emploi comme adverbe.
A. — Faux, adverbe.
1. Contrairement à la vérité, à la réalité. Si le journal dit vrai, la bonne chose qu'il a dit reste; s'il dit faux, c'est comme s'il n'avait rien dit du tout (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 3, 1848, page 473 ). Hélas! le père n'est pas homme à parler faux... l'est défunt (JEAN-BALTHASAR MALLARD, COMTE DE LA VARENDE, Pays d'Ouche, 1934, page 94 ).
2. Contrairement à la logique, d'une manière inexacte. On pense faux comme on chante faux, par ne point se gouverner (ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos, 1929, page 864 ). Créon. — Cela ne m'étonnerait pas, mon gaillard. Tu es homme à te vendre, et pas cher! Le Garde. — Il est triste qu'un prince juste puisse voir si faux (JEAN COCTEAU, Antigone, 1932, page 18 ).
3. En péchant contre l'harmonie, le naturel.
a) MUSIQUE. Chanter faux. C'est comme un homme qui a l'oreille juste et qui joue faux du violon; ses doigts se refusent à reproduire juste le son dont il a conscience (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1847, page 47 ). Lulu Maublanc descendait l'avenue de Messine, sifflotait faux la valse hongroise (MAURICE DRUON, Les Grandes familles, tome 2, 1948, page 53 ).
— Au figuré. Sonner faux. Il affectait une grande gaieté mais qui sonnait faux (PAUL VIALAR, Le Bien-aller, 1952, page 121 ). Henri eut l'impression que cette voix cordiale sonnait faux : peut-être parce qu'en lui-même quelque chose sonnait faux (SIMONE DE BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, page 373 ).
b) THÉÂTRE. Dans Orphée le ton ne peut être ni familier ni « poétique » (...). Voilà le style que Jean Marais possède, d'où jamais il ne déraille et qui fait croire à certains critiques qu'il dit faux (JEAN COCTEAU, Poésie critiquel 1959, page 248 ). Ils [les acteurs] n'eussent pu d'eux-mêmes jouer faux tous à la fois. Ces attitudes, ce débit, tout leur venait du dehors, tout leur avait été imposé (FRANÇOIS MAURIAC, Nouveau Bloc-notes, 1961, page 280 ).
B. — À faux, locution adverbiale.
1. Contrairement à la vérité, d'une manière erronée. Vous m'avez lu si négligemment que presque toujours vous me citez à faux (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1863, page 79 ). D'ailleurs il était admis alors que les vrais prophètes pouvaient prophétiser parfois à faux (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Vie de Jeanne d'Arc, tome 1, 1908, page 548 ).
2. D'une manière maladroite, anormale. Tomber à faux. Un jour, en descendant l'escalier — le tien! — l'oncle posa le pied à faux. Il dégringola bruyamment (GEORGES MOINAUX, DIT GEORGES COURTELINE, La Vie de ménage, L'Escalier, 1890, II, page 66 ).
• Spécialement. Porter à faux. Ne pas porter directement sur son point d'appui. Les six arcades supérieures portent à faux, c'est-à-dire qu'elles n'ont pas été construites de façon à ce qu'au centre des arcades inférieures corresponde exactement un vide ou un pilastre (HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Mémoires d'un touriste, tome 1, 1838, page 82 ).
— En particulier. Sans atteindre le but recherché. Si l'un d'entre nous, par hasard, essayait de se confier (...), la réponse qu'il recevait, quelle qu'elle fût, le blessait la plupart du temps (...). Bienveillante ou hostile, la réponse tombait toujours à faux (ALBERT CAMUS, La Peste, 1947, page 1278 ).
Remarque : On rencontre dans la documentation quelques exemples où, par ellipse du verbe, cette locution prend une valeur adjectivale Aussi quittent-elles [les femmes] assez volontiers un amant, quand il est assez inexpérimenté pour leur ravir (...) ces délicieux tourments de la jalousie à faux (HONORE DE BALZAC, Ferragus, 1833, page 25). Sache qu'un coup de gouvernail à faux casserait le bateau net sur les rochers (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1850, page 178).
3. Sans raison, à tort. On peut, monsieur, être à la fois ancien marin et calomniateur en accusant à faux un brave et loyal camarade (EUGENE SUE, Atar Gull, 1831, page 20 ). C'est s'alarmer à faux que s'émouvoir des inévitables lenteurs (...) d'une négociation (JEAN JAURES, La Paix menacée, 1914, page 229 ).
III. — Emploi comme substantif.
A. — [Correspond à I A; précédé de l'article défini, avec valeur de neutre]
1. Ce qui est contraire à la vérité. Prendre le faux pour le vrai; distinguer le vrai du faux; plaider le faux pour savoir le vrai. Le principe de l'insuccès [de Napoléon] n'est point dans les accidents de la nature et de la guerre (...) il est tout entier dans le faux des conceptions politiques (PIERRE-JOSEPH PROUDHON, La Révolution sociale démontrée par le coup d'Etat du 2 décembre, 1852, page 145 ). Quelques chefs militaires (...) avaient organisé le faux et le mensonge, à l'abri du prétendu secret d'Etat (GEORGES CLEMENCEAU, Vers la réparation, 1899, page 294 ). Le faux n'est pas toujours soluble dans le vrai. Le vrai n'annule pas toujours le faux (PAUL VALERY, Mauvaises pensées et autres, 1942, page 143) :
0 16.... penser vrai c'est saisir mieux. Ce qui est vrai c'est le mouvement qui va du rêve à la chose; en ce sens il y a du vrai dans tous les contes, et du faux dans toutes les doctrines.
ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos, 1921, page 333.
• Etre dans le faux. Etre dans l'erreur. Je sens que je suis dans le faux, comprenez-vous? et que mes personnages n'ont pas dû parler comme cela (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1857, page 240 ).
2. Ce qui est équivoque, délicat. Le faux d'une situation :
0 17. Manette avait changé sa familiarité avec lui en une politesse sèche, coupée d'allusions qui le renfonçaient, sous leur intimidation, dans le faux de sa position. EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Manette Salomon, 1867, page 353.
3. Ce qui manque de naturel, de sincérité. Si le faux règne en effet dans le style comme dans la conduite de certaines tragédies françaises, ce n'était pas au vers qu'il fallait s'en prendre, mais aux versificateurs (VICTOR HUGO, Préface de Cromwell, 1827, page 33 ). L'exagération ou, pour parler franc, le faux du livre de Charron est de même nature que dans Montaigne (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, tome 11, 1856, page 254 ). Il y a des jeux de sensibilité en elle, des expressions de tendresse filiale (...) outrées et qui sonnent le faux (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1859, page 630) :
0 18. Il [Racine] ne rompt pas d'un coup : le faux dans les sentiments dépare encore Alexandre, et il ne cessera d'y avoir, dans toutes ses tragédies et jusque dans Phèdre, des roucoulements.
FRANÇOIS MAURIAC, Vie de Jean Racine, 1928, page 110.
B. — [Correspond à I B; l'article est défini ou indéfini] Altération ou contrefaçon de quelque chose d'authentique.
1. DROIT. Faux (en écriture). \" Altération de la vérité commise dans un écrit et de nature à causer préjudice \" (Vocabulaire juridique (HENRI CAPITANT)). Etre condamné pour crime de faux, pour usage de faux. Les crimes de faux ne peuvent être poursuivis que sur des plaintes privées (HONORE DE BALZAC, Le Cabinet des antiques, 1839, page 106 ). M. Nivardet a une assez belle écriture et il fait le faux dans la perfection, imitant toutes les mains (PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 1, 1859, page 83 ). Son ordonnance, un ancien du groupe franc, que grâce à d'invraisemblables faux en écritures, il avait réussi à tramer partout à sa suite (ROGER CRÉTIN, DIT ROGER VERCEL, Capitaine Conan, 1934, page 217) :
0 19. Il est à peine croyable que nos grands capitaines aient mis deux ans à découvrir un faux fabriqué sur deux papiers différents collés ensemble (...). Sans cette maladresse du faussaire, le faux serait encore ignoré...
GEORGES CLEMENCEAU, Vers la réparation, 1899, page 280.
SYNTAXE : Faux en écriture authentique et publique. « Commis par un fonctionnaire ou officier public dans l'exercice de ses fonctions ou par toute autre personne ayant simulé les formes ou contrefait les signatures qui impriment aux actes le caractère de l'authenticité » (CAP. 1936). Faux en écriture de commerce ou de banque. Faux portant sur les actes de commerce. Faux en écriture privée. Faux portant sur les autres catégories d'écrits. Faux matériels. « Faux qui consiste à falsifier une écriture par contrefaçon, grattage, ratures » (ibidem). Faux intellectuel. « Altération de la vérité portant sur la substance ou les circonstances d'un acte » (ibidem).
• S'inscrire en faux (contre). Soutenir en justice qu'un acte, une pièce est fausse. Inscription en faux.
Au figuré. Nier la valeur de quelque chose :
0 20. Toutes les fois qu'on nous dit : je vous aime bien, cela ne veut pas dire qu'on nous aime; et il y a encore mille autres cas où le positif est plus solennel que le superlatif, où tout adjectif affaiblirait la simplicité absolue de l'image, où la psychologie, en un mot, s'inscrit en faux contre la grammaire.
VLADIMIR JANKÉLÉVITCH, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1957, page 188.
2. Objet fabriqué à l'imitation d'un objet de valeur. Je n'aime pas beaucoup qu'une oeuvre du Xlle. siècle soit exécutée au XIXe. Cela s'appelle un faux. Tout faux est haïssable (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Pierre Nozière, 1899, page 246 ).
• Bijou en faux (vieilli). Bijou fabriqué dans une matière qui imite une matière précieuse. Synonyme : bijou (de) fantaisie. Bijoutier en faux. L'autre, au contraire, était bien l'oeuvre de Paris, ce bijoutier en faux qui dispose de mille futilités charmantes, brillantes, mais peu solides, mal assorties, mal rattachées (ALPHONSE DAUDET, Fromont jeune et Risler aîné, 1874, page 100 ).
STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 9 917. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 13 146, b) 13 273; XXe. siècle : a) 15 599, b) 14 743.
Forme dérivée du verbe \"fausser\" fausser
FAUSSER, verbe transitif.
A. — 1. Vieux. Fausser quelque chose. Manquer à (ses engagements). Fausser la foi donnée, une promesse. Le ciel m'a donné dans ma misère, un homme qui n'a jamais faussé sa parole (PROSPER MÉRIMÉE, La Jacquerie, 1828, page 339 ). Je manquai la première séance [d'un procès] plutôt que de retarder ma visite à Auteuil (...). Ainsi de la seconde fois et des suivantes (...); il me semblait que je faussais un rendez-vous d'honneur (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Volupté, tome 2, 1834, page 73 ). Il accompagna son récit de force malédictions sur la perfidie des femmes, sur la vanité des hommes (...) et sur les serments qu'on fausse (GUSTAVE FLAUBERT, La Première éducation sentimentale, 1845, page 95 ).
• Emploi pronominal passif. C'est là que les souvenirs se délient et que les sermens se faussent; les projets héroïques (...) s'oublient sous ces cieux d'où pleut l'amour (EDGAR QUINET, Allemagne et Italie, 1836, page 205 ).
— En particulier, usuel.
• Fausser (la) politesse à quelqu'un. Manquer à la politesse en quittant quelqu'un sans prendre congé. Il ne me paraissait plus possible de fausser politesse à mes hôtes et de partir sans inventer quelque excuse (ANDRE GIDE, Isabelle, 1911, page 625 ). Ce qui est dur dans une évasion, si stricte soit la surveillance, ce n'est pas de fausser la politesse à ses gardiens (FRANCIS AMBRIÈRE, Les Grandes vacances, 1946, page 221 ).
• Fausser compagnie. Quitter quelqu'un furtivement. Qui l'obligeait à les suivre? N'était-il pas libre de leur fausser compagnie? Le courage lui manquait (ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Le Buisson ardent, 1911, page 1271 ).
2. Vieux et rare. Fausser quelqu'un.. Manquer d'égards, de justice envers quelqu'un. Que vous ai-je fait que vous m'ayez si méchamment faussé? Je vous ai donné le vin, vous m'avez rendu la lie (EDGAR QUINET, Ahasvérus, 1833, 2e. journée, page 174 ).
B. — Rendre faux quelque chose.
1. [Du point de vue de la vérité, de l'authenticité]
a) Domaine abstrait Déformer la vérité, l'exactitude de quelque chose. Synonymes : altérer, déformer, déguiser. Fausser le vrai, la réalité. J'ai faussé l'histoire quant à sa mort [de Hannon] . Il fut bien, il est vrai, crucifié par les mercenaires, mais en Sardaigne (GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1862, page 70 ). A la vérité étemelle, ils substituent chacun leur vérité nationale. Autant de peuples, autant de vérités, qui faussent et tordent la vérité (HENRI BARBUSSE, Le Feu, 1916, page 376 ). Bien plus, qui nous assure que notre mémoire ne fausse pas, ne romance pas les faits? (ALEXANDRE ARNOUX, Zulma, l'infidèle. 1960, page 10) :
0 1. J'insinue ou j'appesantis, je charge ou je diminue, je gauchis ou je fausse. La vérité ne peut sortir de mes mains que comme une femme de sa toilette, peinte, fardée, rembourrée, rétrécie d'un côté, élargie d'un autre.
HYPPOLYTE-ADOLPHE TAINE, Notes sur Paris, 1867, page 309.
— En particulier. [Le complément désigne une manifestation de l'esprit] Commettre une erreur, interpréter faussement. Fausser un calcul, le sens d'un texte, d'un mot. Dans un calcul arithmétique, l'erreur d'un chiffre ou de mille fausse de même le résultat (BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, De l'Esprit de conquête et de l'usurpation, 1813, page 226 ). C'est fausser la pensée de Beethoven, qu'en modifier la ponctuation et le groupement des périodes (ROMAIN ROLLAND, Beethoven, tome 2, 1937, page 435) :
0 2. Saint-Loup souffrit horriblement de cette brouille, mais c'est une manière de dire qui est trop simple, et fausse par là l'idée qu'on doit se faire de cette douleur. MARCEL PROUST, Le Côté de Guermantes 1, 1920, page 121.
b) Domaine concret Falsifier. Fausser un document. Malheureux!... Qu'a-t-il fait? — Dans sa sombre misère il osa fausser un écu (PETRUS BOREL, Rhapsodies, 1831, page 177 ). Gare à ceux d'entre vous qui fausseraient le vote! (VICTOR HUGO, L'Année terrible, 1872, page 177 ). En vue de prouver l'innocence d'un individu qui vous a avoué être coupable, dénaturer les faits, fausser les textes (HENRI DE MONTHERLANT, Le Démon du bien, 1937, page 1271)
2. [Du point de vue d'une norme, de la justesse, de la perfection]
a) Domaine abstrait Faire perdre à quelque chose son aspect, son caractère normal, naturel; la rendre contraire à ce qu'elle doit être. Synonyme : dénaturer. Je n'ai vu mon père irrité que lorsqu'on faussait la justice (LEON DAUDET, Alphonse Daudet, 1911, page IX. ). Vous ne voyez pas clair? Eh! Qui vous aurait appris à voir clair? Toute l'éducation des filles est faussée (HENRI DE MONTHERLANT, Les Lépreuses, 1939, page 1521 ). C'est la différence d'âge qui, révélée au fond d'un bel oeil de velours, faussa nos rapports, gauchit notre lien amical [à Colette et à Marco] (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Le Képi, 1943, page 60) :
0 3. C'est un monde où toutes les valeurs sont faussées, où le respect de la personne n'a plus aucune place, où l'intérêt est l'unique mobile...
ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 153.
— En particulier. [Le complément désigne un attribut de la personne ou une personne] Fausser le caractère, la conscience, la nature, le goût de quelqu'un.
Synonymes : corrompre, gâter. Une âme dont rien n'avait faussé les sentiments (HONORE DE BALZAC, Ferragus, 1833, page 127 ). L'exil déprime les caractères et fausse les intelligences (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Révolte des anges, 1914, page 144 ). Je ne voulais pas qu'une femme bigote faussât l'esprit de mes enfants (FRANÇOIS MAURIAC, Le Noeud de vipères, 1932, page 78) :
0 4. J'ai tout fait d'abord pour ne pas me laisser encombrer, fausser, bref dénaturer par des influences fâcheuses.
MAURICE BARRES, Mes cahiers, tome 9, 1911-12, page 70.
• Emploi pronominal passif. A ce métier [de critique] l'esprit se fausse, l'intelligence perd sa lucidité rectiligne (HONORE DE BALZAC, La Muse du département, 1844, page 214 ).
— Spécialement.
• Fausser une note, une chanson. La chanter, la jouer faux. Un aveugle au coin d'une borne (...) Sur son flageolet (...) joue un ancien vaudeville Qu'il fausse imperturbablement (THÉOPHILE GAUTIER, Émaux et camées, 1852, page 65 ).
Emploi intransitif ou pronominal passif. Devenir faux. La note finale de chaque phrase (...) monte d'un quart de ton en faussant systématiquement (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, La Mare au diable, 1846, page 19 ). Il [maintient] l'étemelle harmonie, écoutant d'une oreille et de l'autre, afin qu'aucune note ne se fausse (PAUL CLAUDEL, Le Repos du 7e. jour. 1901, III, page 857 ).
• Par métonymie. Fausser une voix, un instrument. Les rendre incapables d'exécuter des sons justes. Mais votre Érard, faussé par l'humide atmosphère, Appelle en sons douteux les soins de l'accordeur (HENRI MURGER, Les Nuits hiver, 1861, page 122 ). Quand sa fille exécutait (...) quelqu'une de ses courses olympiques qui faussaient tous les pianos du voisinage (OCTAVE FEUILLET, Julia de Trécoeur, 1872, page 8 ). Rends-moi ma fiancée, misérable! vociférait Tarzan, torturant ses cordes vocales faussées par la mue (HERVÉ BAZIN, Lui, 1950, page 6 ).
Par extension. Oter le caractère naturel. Une voix faussée par l'effort (ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, La Belle saison, 1923, page 935 ).
b) Domaine concret Faire perdre (à un objet) sa forme normale; empêcher son fonctionnement. Synonymes : tordre, courber, bossuer. Fausser une épée, une cuirasse; fausser les ressorts d'une montre, les rouages d'une machine, un mécanisme. Ils frappaient sur mon dos comme sur une enclume! Heureusement mes gens sont venus, sans quoi ces vilains me faussaient mon armure (PROSPER MÉRIMÉE, La Jacquerie, 1828, page 127 ). Des militants ouvriers (...) venaient, de quelques coups de lime, fausser la pièce patiemment élaborée (ANDRE MALRAUX, L'Espoir, 1937, page 779) :
0 5. La cheminée [de la locomotive], dans la violence du choc, était entrée en terre; à l'endroit où il avait porté, le châssis s'était rompu, faussant les deux longerons...
ÉMILE ZOLA, La Bête humaine, 1890, page 225.
• Emploi pronominal passif. Pierre a tellement forcé sur son volant que la direction s'est faussée (JACQUES RIVIÈRE, Correspondance [avec Alain-Foumier],
1907, page 236 ).
— [En parlant d'un organe] Déformer, tordre. Au retour de chacune de ses longues habituelles promenades [à cheval] une expression de triomphante méchanceté faussait tous les muscles de sa face (CHARLES BAUDELAIRE, Histoires extraordinaires, traduit de Edgar Poe. 1856, page 328 ).
Remarque : On rencontre dans la documentation quelques emplois intransitifs de fausser. Ne pas se comporter, ne pas fonctionner d'une manière normale. Tout homme (...) doit se créer sans doute un caractère par l'éducation; mais il faut qu'il en pose les bases sur celui que lui a donné la nature; autrement (...) ce pourrait n'être plus qu'un instrument qui fausserait sans cesse (Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 1, 1823, page 273). Un arbre qu'il abattait pour faire le feu a faussé en tombant, et ce sont des sauvages qui l'ont trouvé (...) assommé (Louis Hémon, Maria Chapdelaine, 1916, page 51). Loué soit Dieu, qui m'a permis de me surprendre misérable et ridicule (...): c'est toi, c'est toi qui m'as vu fausser! Mais cette profonde chute me relance vers en haut (Henri de Montherlant, Le Maître de Santiago, 1947, III, 5, page 652).
REMARQUE : Faussé, -ée, participe passé en emploi adjectival, a) [Correspond à fausser A] Tant de paroles données et faussées (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 601 ). b) [Correspond à fausser B 2] Casque, épée faussé(e); serrure faussée; cou faussé. C'étaient des laboureurs (...), pliés en deux sur le dos de leurs sillons. Ils relevaient tant bien que mal leurs reins faussés (EUGÈNE FROMENTIN, Dominique, 1863, page 23 ). Esprit puéril et faussé, (...) tout ce qui sentait la machine, le théâtre et l'extraordinaire lui paraissait la marque qu'on était nourri dans un air de grandeur et de luxe (ÉLÉMIR BOURGES. Le Crépuscule des dieux. 1884, page 119 ). Ces toiles aux rapports [de couleurs] faussés mais encore admirables (ANDRÉ LHOTE, Peinture d'abord, 1942, page 136 ).
Fréquence absolue littéraire Fausser : 381. Faussé : 252. Fréquence relative littéraire Fausser : XIXe. siècle : a) 362, b) 253; XXe. siècle : a) 572, b) 824. Faussé : XIXe. siècle : a) 219, b) 254; XXe. siècle : a) 395, b) 510.
«
page 200 ).Qui ne perçoit pas les sons exactement.
Oreille fausse.
L'ouïe est quelquefois originairement fausse, soit que les deux oreilles n'entendent point à l'unisson (...) soitque dans (...) chacune d'elles (...) il se trouve des causes communes de discordance (PIERRE CABANIS.
Rapports du physique et du moral de l'homme, tome 1,1808, page 435 ).· Par analogie.
Voix fausse, rire faux.
Désagréable à entendre comme une note fausse.
Sa voix fausse, tantôt haute, tantôt basse, procédait par brusques changementsde tons et glapissements bizarres (THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, page 29 ).
Un rire sec, nerveux, frémissant, un de ces rires faux quisemblent devoir casser les verres fins (GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, La Bûche, 1882, page 782 ).· Par extension.
Fausse note.
Note juste en elle-même mais qui n'est pas la note prévue dans la partition et choque l'oreille.
Elle se remit à jouer (...) et elle faisaitfausse note sur fausse note.
Il ne s'en apercevait pas (ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Le Matin, 1904, page 193 ).Au figuré.
Qui détone, qui n'est pas en harmonie avec l'ensemble auquel on se réfère.
L'hôtel du banquier était très beau.
Un grand luxe, beaucoup de jolies choses ettrès peu de fausses notes (SIBYLLE-GABRIELLE-MARIE-ANTOINETTE DE RIQUETTI DE MIRABEAU, COMTESSE DE MARTEL DE JANVILLE, DITEGYP, Leurs âmes, 1895, page 305 ).— Domaine visuel.· Couleur fausse.
Qui ne présente pas un caractère de pureté, de naturel.
Ton faux; nuance fausse.
La lueur d'un incendie (...) répandit sur toute cette scène une teintefausse et blafarde, qui n'est ni le jour ni la nuit (ALPHONSE DE LAMARTINE, Souvenirs, impressions, pensées et paysages pendant un voyage en Orient (1832-1833) ou Note d'un voyageur, tome 1, 1835, page 220 ).
Un nuage venu du couchant, d'un rose faux et acide, colorait vaguement son lâche vêtement blanc(GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Seconde, 1929, page 98 ).
Quant aux arbres, on les aurait cru peints, de ce vert faux, brutal, acide qui leur prête leton d'un décor de théâtre (FRANCIS CARCO, Nostalgie de Paris, 1941, page 155 ).· Faux jour, jour faux.
Mauvaise lumière qui altère l'apparence des choses.
Faux jour de soupirail, du crépuscule.
À toute heure, ce jour double et faux de la fenêtreinsuffisante et des ampoules excessives éclaire Rézi d'une lumière théâtrale (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine en ménage, 1902, page 120 ).De gros nuages d'orage montaient sur l'horizon en volutes lourdes, fondus au ras de la mer dans un reste de faux jour livide (JULIEN GRACQ, Le Rivage des Syrtes,1951, page 231 ).Au figuré.
Apparence trompeuse.
Comme tu outres tout! Comme tu mets tout dans un faux jour! (JEAN GUÉHENNO, Jean-Jacques, 1950, page 116) :Ø 4.
Mme.
Sand fait de Maurice un sceptique, un grand poëte à la façon de Byron, et cela m'affligeait de voir présenter sous ce faux jour le nom de mon frère...EUGÉNIE DE GUÉRIN, Journal intime, 1840, page 384.— LITTÉRATURE, THÉÂTRE.
Qui est contraire au naturel, à la vraisemblance.
Genre, style faux; déclamation fausse; caractère, personnage faux; psychologie(d'un personnage, d'une pièce) fausse.
Synonyme : affecté.
Quant aux autres acteurs, il est impossible d'avoir un débit plus faux et plus affecté, des gestes plusexagérés et plus contraires au bon sens (ÉTIENNE-JEAN DELÉCLUZE, Journal, 1825, page 270 ).
Quelquefois, dans les plus vivants [des personnages de Balzac] ,une phrase ou une action fausse indique que l'inspiration a manqué (HYPPOLYTE-ADOLPHE TAINE, Nouveaux essais de critique et d'histoire, 1865, page 26 ).D'ordinaire les romans lui semblaient faux et puérils (ÉMILE ZOLA, Une Page d'amour, 1878, page 846) :Ø 5.
Lu Quatre-vingt-treize que je n'avais pas ouvert depuis des années.
Admiration totale pendant deux cents pages, puis tout à coup, la lecture devient impossible :c'est trop fabriqué, trop uniment faux.JULIEN GREEN, Journal, 1945, page 119.· Par analogie.
[En parlant de l'attitude d'une personne] Je renonce à combattre votre penchant : (...) je craindrais de jouer le rôle bête et faux d'un froid pédant(AUGUSTE BARBIER, Satires, 1865, page 55 ).
N'avait-il pas [le docteur] daigné parfois l'élever jusqu'à lui? D'un geste aussi faux que l'était cette phrase, elle[Maria] saisit la main du docteur, l'approcha de ses lèvres (FRANÇOIS MAURIAC, Le Désert de l'amour, 1925, page 104 ).3.
Qui est fondé sur une erreur, qui n'est pas justifié.
Comme j'ai deviné que de fausses terreurs vous inquiétaient, je suis venu (JOSÉPHIN PÉLADAN, Le Vicesuprême, 1884, page 243 ).
Mon petit, méfie-toi de la « fausse vocation ».
La plupart des existences manquées, des vieillesses aigries, n'ont pas d'autre origine(ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, Épilogue, 1940, page 949 ).
Hier après-midi, il y a eu une fausse alerte d'invasion due à l'erreur d'un radiotélégraphiste(JULIEN GREEN, Journal, 1944, page 116) :Ø 6....
j'ai eu de bien grands torts envers vous! — Et mettant de côté toute fausse honte, le poëte confessa franchement sa folle conduite...ANDRÉ THEURIET, Le Mariage de Gérard, 1875, page 185.SYNTAXE : Fausse alarme; fausse crainte, espérance, joie, pudeur; faux honneur, point d'honneur; faux pressentiment; fausse impression, reconnaissance.· Faux problème, dilemme; fausse antinomie, difficulté.
Que l'on pose, que l'on envisage à tort :Ø 7.
La méthode de Charles Perrault, qui consiste à prendre des anciens pour les opposer aux modernes, nous fournit un bon type de faux problème (...).
Ces auteurslatins (...) disposés parallèlement à des auteurs français, c'est une fiction oratoire.
Ce qui existe réellement, ce qui vit et ce qui dure, c'est une suite...ALBERT THIBAUDET, Réflexions sur la littérature, 1936, page 248.B.— [Traduit l'idée d'une ressemblance trompeuse, d'une imitation ou d'une contrefaçon] Antonyme : vrai, véritable, authentique.1.
Qui n'a que l'apparence de la chose réelle, sans en avoir les caractéristiques, les qualités essentielles.a) Domaine concret ou sensible.
Faux brillant, chic, luxe; faux chef-d'oeuvre; fausse élégance.
La fausse distinction et la politesse de pacotille des hommesdistingués, des hommes polis de l'Empire (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1870, page 575 ).
Un magnifique et singulier képi (...)qui donnait à son Altesse un faux air de général mexicain (ALPHONSE DAUDET, Aventures prodigieuses de Tartarin de Tarascon, 1872, page 115 ).
Moins grandequ'elle ne semblait, elle était une fausse maigre, avec de belles épaules, des bras harmonieux (ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Les Amies, 1910, page 1160) :Ø 8.
L'appartement occupé par ce ménage (...) offrait les trompeuses apparences de ce faux luxe qui règne dans tant d'intérieurs.
Dans le salon, les meublesrecouverts en velours de coton passé, les statuettes de plâtre jouant le bronze florentin, le lustre mal ciselé (...), tout chantait misère...HONORÉ DE BALZAC, La Cousine Bette, 1846, page 52.· Faux ménage.
Couple non marié légalement.
Joseph prétend que papa n'a pas moins de deux faux ménages, et il cite les adresses (GEORGES DUHAMEL, Combatcontre les ombres, 1939, page 72 ).· [Au théâtre et par comparaison dans la vie courante] Fausse sortie.
Sortie simulée suivie d'un retour presque immédiat.
Tous les convives étaient partis, Courtenay,après une fausse sortie, revint au moment où elle passait dans sa chambre (JOSÉPHIN PÉLADAN, Le Vice suprême, 1884, page 161 ).Par analogie.
Un faux dégel s'était produit dans la semaine, puis le froid avait recommencé (ÉMILE ZOLA, Le Rêve, 1888, page 18 ).— En particulier, dans de nombreux domaines.
[Pour désigner une chose ayant une certaine ressemblance, présentant un certain rapport ou faisant double emploiavec la chose proprement désignée par le substantif]· BOTANIQUE, ZOOLOGIE.
Faux acacia*, bambou, cèpe, ébénier, poivrier; faux bourdon2*; fausse chenille; faux terrier.
Il est une fausse oronge, de même fumetque l'autre, et qui recèle un venin mortel (JOSEPH DE PESQUIDOUX, Chez nous, 1921, page 168 ).· ANATOMIE, PATHOLOGIE, PHYSIOLOGIE.
Fausses côtes*, pattes; fausse narine; fausse angine de poitrine; faux croup; fausse couche*, grossesse; fauxjumeaux.
Voulez-vous m'aider à soigner une diphtérique; (...) il faudrait la tenir pendant que j'enlèverai les fausses membranes de sa gorge (GUY DEMAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 2, Misère humaine, 1886, page 649 ).· Domaines techniques ARCHITECTURE.
Fausse cloison; faux mur, plafond, plancher.
COUTURE.
Faux col*, ourlet.
IMPRIMERIE.
Faux titre.
MARINE.
Fauxbras, pont; fausse quille.
VÉNERIE.
Faux arrêt, rembuchement.
MUSIQUE.
Faux-bourdon (voir bourdon2 II A).b) Domaine abstrait Fausse victoire; faux répit; fausse vertu; faux devoir.
Ces faux biens que le vulgaire envie, Gloire, puissance, orgueil (ALPHONSE DELAMARTINE, Harmonies poétiques et religieuses.
1830, page 477 ).
Tout vaut mieux que le faux amour, le désir qu'on prend pour la passion (PAUL CLAUDEL,Le Père humilié, 1920, I, 3, page 506 ).
La vraie paix, celle qui vient de Dieu, et non cette fausse paix qui suit l'assouvissement de nos convoitises (JULIEN GREEN,Journal, 1942, page 206) :Ø 9.
Nous avons rencontré cent fois (...) ces ambivalences vertueuses : (...) la fausse chasteté des refoulés, la fausse pitié de la sensiblerie, le faux amour desmaniaques de la protection et du dévouement égocentrique, la fausse bonté des faibles...EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère, 1946, page 733.c) [En parlant d'un être] Faux génie, patriote, savant Ce journal du mensonge, le Figaro, célébrant le faux honnête homme comme l'abbé Roussel, le faux homme detalent, comme...
comme...
(EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, 1889, page 957 ).
Il revoit (...) tant de faux révoltés, si éloquents dans lemonde, qu'il a vus à ses pieds, risibles! (GEORGES BERNANOS, Sous le soleil de Satan, 1926, page 235) :Ø 10.
Pour Gladstone, le beaconsfieldisme était une épouvantable hérésie qui avait souillé l'âme du peuple anglais (...).
Maintenant le pays commençait à comprendre.
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