Définition et usage du mot: BAROQUE, adjectif.

Définition et usage du mot: BAROQUE, adjectif. A.— [En parlant d'un style, d'une époque, d'une oeuvre monumentale] 1. Domaine des Beaux-Arts. — ARCHITECTURE. Qui est caractéristique de la période qui a suivi la Renaissance classique. Style baroque, architecture baroque : Ø 1. Soleure. La belle cathédrale baroque (...) toute blanche et frisée, heureuse, et même un peu triomphante avec ses statues dorées et ses inscriptions latines largement déployées au-dessus des chapelles. JULIEN GREEN, Journal, 1946-50, page 118. — MUSIQUE. Qui est caractéristique de la période musicale propre à l'Allemagne, à l'Angleterre, à l'Italie, et qui s'étend de 1580 à 1760. · [En parlant des oeuvres et des artistes] Qui illustre les principes esthétiques de ces périodes. Musique baroque. — PEINTURE : Ø 2. [Maurice Denis] On a discerné en lui l'influence conjuguée de Fra Angelico et de Poussin. Il faudrait ajouter celle de la Renaissance italienne, de Rome plus que de Florence, du clair-obscur bolonais et des peintres baroques. Arts et littérature dans la société contemporaine (direction Pierre Abraham) 1936, page 1807. — Par analogie. LITTÉRATURE. Qui appartient à l'époque littéraire qui, en France, correspond aux règnes de Henri IV et Louis XIII. 2. Plus généralement. [En parlant d'un artiste, ou d'une création artistique] Qui par son style rappelle celui de la période baroque : Ø 3. Ses allégories [de J. B. Rousseau] , sont jugées tout d'une voix : baroques, métaphysiques, sophistiquées. sèches, inextricables, nul défaut n'y manque. CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Portraits littéraires, tome 1, 1844-64, page 136. Ø 4. Ariadne auf Naxos, (...), accentue plus encore l'évolution du musicien vers le style baroque avec son maniérisme, ses bizarreries, où la délicatesse, la grâce de Mozart se mêlent à la bouffonnerie débridée de la Commedia Dell'Arte. RENÉ DUMESNIL, Histoire illustrée du théâtre lyrique, 1953, page 171. Remarque : Baroque était pris au XIXe. siècle dans un sens péjoratif (confer exemple 3). Il qualifie en général un style caractérisé en architecture et en peinture par la profusion de l'ornementation, la recherche de l'effet de masses, l'emploi de la ligne courbe; en littérature et en musique par un goût de l'emphase, du contraste, une recherche du mouvement et de la fantaisie qui s'oppose au caractère plus statique et à la rigueur de l'art classique. 3. Emploi comme substantif. a) [L'art, le style qui appartiennent à la période baroque] : Ø 5. Hier, discussion inutile sur le Baroque (...) Toujours cette éternelle confusion entre le baroque et le rococo (...) On refuse au vrai baroque la gravité religieuse alors qu'elle est très évidente à la chapelle de la Sorbonne ou au Val-de-Grâce;... JULIEN GREEN, Journal, 1946-50, page 142. Ø 6. Dès que l'art d'assouvissement point, notre répulsion apparaît. D'où notre admiration du grand baroque créateur, de Michel-Ange au Greco, et notre dédain du baroque établi;... ANDRÉ MALRAUX, Les Voix du silence, 1951, page 526. — [L'art, le style, la manière qui rappellent ceux de l'époque baroque] : Ø 7. Le baroque de son dessin forcené [de Van Gogh] est plus proche des proues scandinaves ou des plaques scythes que de Rubens... ANDRÉ MALRAUX, Les Voix du silence, 1951, page 576. b) Artiste dont le style rappelle cette période : Ø 8. Il fallut la mort de Péguy pour familiariser Barrès avec l'idée qu'il n'était autre chose qu'un baroque... JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, Pour les fidèles de Péguy, 1928, page 86. B.— JOAILLERIE. [Se dit d'une perle] Qui est de forme irrégulière, d'une rondeur imparfaite : Ø 9. En dehors de son orient et de son lustre attrayants, une perle doit avoir une couleur homogène et une rondeur aussi parfaites que possible; les beaux spécimens se vendent à la pièce (en grains); les perles baroques se vendent en sachets au poids. ANDRÉE ET NICOLAS METTA, Les Pierres précieuses, 1960, page 120. — Emploi comme substantif : Ø 10.... contre les verrières étaient suspendus quelques colliers de grenat, d'ambre, de baroques, de corail, etc., objets de négoce de Judas le Lapidaire,... PETRUS BOREL, Champavert, les contes immoraux, Dina, la belle juive, 1833, page 134. Remarque : Ancien pour DICTIONNAIRE ALPHABÉTIQUE ET ANALOGIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE (PAUL ROBERT) et DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965. C.— Par extension, et au figuré. 1. [En parlant d'une chose] Dont le caractère bizarre, inattendu, contradictoire a quelque chose de surprenant, de choquant et parfois de ridicule. Idée baroque : Ø 11. La plupart avaient des traits massifs, des voix enrouées, des gorges molles et des yeux peints, et toutes (...), débitaient avec le même sourire les mêmes propos biscornus, les mêmes réflexions baroques. GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, À rebours, 1884, page 230. Ø 12. — Où ces militaires, demandait-on, étaient-ils allés chercher des phrases si baroques et si ridicules? ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Vie littéraire, tome 4, 1892, page VIII. Ø 13. M. Alfred Nathan était un professeur connu à Paris, savant éminent, en même temps très mondain, avec ce mélange baroque de science et de frivolité, si commun dans la société juive. ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Antoinette, 1908, page 885. 2. [En parlant d'une personne] Dont le caractère ou le comportement est fait pour surprendre; original, burlesque, excentrique, etc. : Ø 14.... ils hasardèrent d'abord quelques contorsions poétiques, pour appeler la curiosité; elle ne vint pas, ils redoublèrent. D'étranges qu'ils voulaient être, ils devinrent bizarres, de bizarres baroques, ou peu s'en fallait. ALFRED DE MUSSET, Lettres de Dupuis et Cotonet, 1837, page 672. Ø 15. Puis, un soir que la soubrette était malade, on s'est risqué à me confier son rôle. Ensuite, j'ai continué. On me trouvait impossible, burlesque, baroque. ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Les Amies, 1910, page 1169. Ø 16.... l'enfant rebelle et baroque qu'on avait quittée, on la retrouve deux ans plus tard assagie, prête à consentir à la vie de femme. SIMONE DE BEAUVOIR, Le Deuxième sexe, 1949, page 124.