Définition du terme: CUVE, substantif féminin.

Définition du terme: CUVE, substantif féminin. A.— Récipient généralement de grande taille, installé durablement en un lieu, et dans lequel s'opère une modification du contenu. 1. VITICULTURE. a) Grand réservoir cylindrique fait généralement de douves cerclées de fer, utilisé pour la fermentation du raisin. Cuve de bois, cercler une cuve. Le vin nouveau qui fait sauter la bonde des cuves (GUSTAVE FLAUBERT, La Tentation de Saint Antoine, 1856, page 630) : Ø 1.... à l'entour des villages déjà des capiteuses senteurs de moût emplissaient l'air. Parmi les rires et les chants, de jeunes hommes, pieds nus, jambes nues, foulaient les raisins dans les cuves... ANDRÉ GIDE, Feuillets d'automne, 1949, page 1108. SYNTAXE : Grande cuve, cuve ronde; réparer une cuve, mettre en cuves. — Expression. Les cépages de cuve, la viticulture de cuve (LOUIS LEVADOUX, La Vigne et sa culture, 1961, page 36, 58 ). Production de raisins destinés à la fabrication du vin. — Par métaphore. Toute une humanité en travail, la cuve énorme où fermentait le vin de l'avenir (ÉMILE ZOLA, Paris, tome 2, 1898, page 154 ). Cette grande cuve obscure où bouillonnaient les passions et la rangée de monstres que nous étions (JEAN GUÉHENNO, Journal d'une révolution, 1938, page 169 ). b) Par métonymie. Contenu d'une cuve. Cuve bouillonnante. Un bouillonnement de cuve qui fermente (ROGER MARTIN DU GARD, Jean Barois, 1913, page 287 ). — Par métaphore. Quinet, tout enivré de houblon, nous brasse des cuves de poésie (CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Mes Poisons, 1869, page 115 ). 2. Récipient plus ou moins important, parfois intégré à un dispositif plus complexe, servant à divers usages ménagers ou industriels. a) Usuel. · Cuve à mazout, à essence. Récipient métallique, souvent enterré, servant à entreposer des produits pétroliers. Une cuve de pétrole abandonnée (GUSTAVE FLAUBERT, Salammbô, tome 1, 1863, page 112 ). · Cuve à photographie, à développement. Récipient servant au développement des clichés photographiques (confer Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française (PAUL ROBERT) et cuvette). Synonyme : bac. · Cuve à eau, à mercure. Vases rectangulaires permettant le travail de manipulation des gaz. Souvent Pouchet, dans ses expériences, s'était servi de la cuve à mercure pour y pratiquer la manipulation de ses flacons (JEAN ROSTAND, La Genèse de la vie, 1943, page 117 ). b) Usages industriels. — BRASSERIE. Récipient dans lequel on prépare, on fait germer le grain. Cuve matière, cuve mouilloire (Eugène Boullanger, Malterie, brasserie, 1934, page 239, 100). Cuve guilloire (Adolphe Wurtz, Dictionnaire de chimie pure et appliquée, tome 1, 1er. volume, 1869, page 595). — ÉLECTRONIQUE. · Cuve électrolytique. " Machine de synthèse mathématique pour les problèmes de répartition de champs électrique dans les lentilles électroniques " (Terminologie de l'exploitation électronique des informations 1963-64). · Cuve à ultra-sons. " Cuve remplie de mercure ou d'alcool qui sert de ligne à retard dans certaines machines électroniques " (Terminologie de l'exploitation électronique des informations 1963-64). — INDUSTRIE MÉTALLURGIQUE. Partie creuse d'un dispositif industriel contenant généralement un liquide, et plus particulièrement, partie centrale et cylindrique d'un haut fourneau comprise entre les tuyères et le gueulard et comprenant la zone de fusion. Cuves monobloc des grandes usines; remplir la cuve avec une matière régénérée : Ø 2. Le courant de gaz entrant dans la cuve se partage en deux : la moitié du volume total traverse la couche inférieure de matière de haut en bas, l'autre moitié la couche supérieure de bas en haut. Ce sont les cuves compound très employées en Allemagne. YVAN QUÉRET, Manuel de l'industrie du gaz, 1923, page 148. · Autres récipients de fonte, de métal inoxydable, de ciment, dans lesquels s'effectuent diverses opérations industrielles. Cuves de décantation (GEORGES BRUNERIE, Les Industries alimentaires et leur organisation rationnelle, 1949, page 11 ). Cuves de décrassage (ROBERT BARNERIAS, Manuel des aciéries, 1934, page 194 ). Cuves d'épuration (JEAN-JACQUES CHARTROU, Pétroles naturels et artificiels, 1931, page 184 ). Cuves de fermentation (L'Industrie française de la brasserie (LA DOCUMENTATION FRANÇAISE, 1955) 1955, page 9 ). Cuves de stockage (L'Industrie des conserves en France (LA DOCUMENTATION FRANÇAISE, 1950) 1950, page 8 ). — PAPETERIE. Papier de cuve, à la cuve. Papier fait à la main. Le papier de Hollande rentre dans la catégorie des papiers faits à la main et dits de cuve (ÉMILE LECLERC, Nouveau manuel complet de typographie, 1932, page 548 ). — TANNERIE, TEINTURERIE. Tanner en cuve, teindre en cuve. Cuve passant ses cuirs à la cuve voisine plus élevée dont elle reçoit, par contre, du jus (JACQUES BÉRARD, JACQUES GOBILLIARD, Cuirs et peaux, 1947, page 74 ). · Cuve d'Inde. Celle où l'on teint à froid et dans laquelle on ne fait pas entrer de pastel (Confer Claude-Louis Berthollet, Amédée-B. Berthollet, Éléments de l'art de la teinture, tome 2, 1804, page 77). · Teinture à la cuve. Teinture à l'indigo (Confer Giuseppe Ovio, La Vision des couleurs, 1932, page 213). B.— Par analogie ou par métaphore. 1. ARCHÉOLOGIE. Cuve baptismale. Récipient de pierre posé sur un pilier central ou sur quatre colonnes et servant de fonts baptismaux. La cuve de pierre où Jeanne d'Arc fut baptisée (MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 6, 1907-08, page 125 ). · Cuve reliquaire. Châsse (d'après Dictionnaire d'archéologie chrétienne et de liturgie (DOM FERNAND CABROL ET DOM HENRI LECLERCQ) 1914). · Cuve funéraire. Sarcophage de pierre. Longues cuves de marbre blanc (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Puits de Sainte Claire, 1895, page 60 ). 2. AVIATION. Habitacle d'un avion de chasse. Un mitrailleur de cuve. Le froid entrait par l'ouverture de la cuve (ANDRÉ MALRAUX, L'Espoir, 1937, page 814 ). 3. LITTÉRATURE. Espace creux habité ou non mais très plein et souvent agité. Cette cuve immense de la mer dont les bords ne se laissent qu'à peine apercevoir (CHARLES BAUDELAIRE, Petits Poèmes en prose, 1867, page 169 ). Hier, séance de la Chambre. Depuis combien d'années ne m'étais-je penché sur cette cuve (FRANÇOIS MAURIAC, Bloc-notes, 1958, page 101 ). Remarque : La documentation fournit le substantif féminin cuvelle. Petite cuve. Rincer les draps dans la cuvelle (MAXENCE VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, page 10). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 319. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 259, b) 635; XXe. siècle : a) 579, b) 442. Forme dérivée du verbe "cuver" cuver CUVER, verbe. A.— Domaine des activités physiques. 1. Emploi intransitif. [En parlant des raisins, du moût] Après écrasage, séjourner en cuve afin d'y fermenter. Faire cuver les raisins, la vendange. — Par métonymie (en parlant du vin), emploi participe passé avec valeur adjectif. Tiré du moût qui a fini de cuver. Laisser couler à flots les vins cuvés (CHARLES PÉGUY, Quatrains, 1914, page 532 ). 2. Emploi transitif, au figuré et familier. [Le sujet désigne une personne] Dissiper son ivresse en se reposant au lit, en dormant Cuver son vin rouge, son whisky (confer Camus, Requiem, 1956, page 867); cuver sa cuite, son ivresse; laisser cuver sa saoulerie à quelqu'un : Ø ... tout d'un coup, il ronfla. Alors, Gervaise eut un soupir de soulagement, heureuse de le savoir enfin en repos, cuvant sa soulographie sur deux bons matelas. ÉMILE ZOLA, L'Assommoir, 1877, page 514. B.— Par métaphore et/ou au figuré. Cuver quelque chose. 1. [Par référence au sens A] a) Garder en soi pour en profiter, pour en jouir. Cuver son or, sa richesse. À demi extasié dans l'épanouissement d'une jubilation infinie, il cuvait le paysage (EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Manette Salomon, 1867, page 238 ). Ah! rester là, ivre et dévêtu sous la lune, à cuver la chaleur du jour (ANDRÉ GIDE, Journal, 1910, page 318 ). b) Garder en soi ses sentiments pour les laisser fermenter et mûrir et permettre leur plein effet. Cuver sa vengeance. Dame (...), qui cuvait sa rancune et sa haine en silence (LÉON DAUDET, La Mésentente, 1911, page 87 ). 2. [Par référence au sens A] Garder en soi un ressentiment, etc., de manière à le laisser s'apaiser, à le faire disparaître. Cuver sa colère, son chagrin, sa nostalgie, sa peine. Il faut les laisser à cuver leur fanatisme (ALPHONSE DE LAMARTINE, Correspondance générale. 1831, page 185 ). À la mort de Michel, la famille ne lui laissa pas le temps de cuver sa douleur (FRANÇOIS MAURIAC, Le Mystère Frontenac, 1933, page 47 ). STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 88.