Définition du mot: APRÈS, préposition.

Définition du mot: APRÈS, préposition. I.— Morphème situant le procès en postériorité par rapport à une date ou une action données. A.— Après en emploi prépositionnel. 1. Après + substantif appartenant au vocabulaire du temps. a) Le complément exprime le repère temporel. Après cinq heures, après Pâques : Ø 1. Lorsque, après le XIIIe. siècle, la littérature du Midi fut tombée en pleine décadence, la nôtre continua de cheminer dans la voie où elle était engagée. CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Tableau historique et critique de la poésie et du théâtre français au XVIe. siècle, 1828, page 7. Ø 2. Après l'été pluvieux, l'automne rayonnait. Dans les vergers, les fruits pullulaient sur les branches. ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, L'Adolescent, 1905, page 319. — Sans article devant les substantifs désignant les heures canoniales : Ø 3. Mais tu partirais le dimanche après vêpres à six heures, tu serais à Rouen à onze, et tu nous quitterais avec grand regret le samedi dans l'après-midi. GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance, 1832, page 4. Ø 4. Et ce soir, après none, je viendrais vous saigner moi-même. HENRI DE MONTHERLANT, Port-Royal, 1954, page 994. Remarque : Confer aussi après prime, — matines, — complies, — laudes. b) Le complément exprime un espace de temps au terme duquel a lieu le procès. Après un moment de réflexion, après des années de silence : Ø 5.... mais il aimera l'hypothèse qui le fait commencer comme un corps individuel au milieu de la durée des êtres; se consolider, s'animer, fleurir, se refroidir après une vaste durée; et enfin mort, inanimé, se livrer aux forces étrangères pour être dissous par elles, et servir à la formation des mondes nouveaux. ÉTIENNE PIVERT DE SENANCOUR, Rêveries sur la nature primitive de l'homme, 1799, page 215. — Après longtemps. Après une longue période : Ø 6. Qu'une femme du monde de la plus haute intelligence, de la plus grande bonté, se fasse actrice, déploie dans ce métier nouveau pour elle de grands talents, n'y rencontre que des succès, on s'étonnera, si on se trouve auprès d'elle après longtemps, d'entendre non son langage à elle, mais celui des comédiennes, leur rosserie spéciale envers les camarades, ce qu'ajoutent à l'être humain, quand ils ont passé sur lui, « trente ans de théâtre ». MARCEL PROUST, Le Temps retrouvé, 1922, page 1003. 2. Après + substantif d'action, substantif à valeur verbale. Après le départ, après son refus : Ø 7. Et après une longue discussion, il fut décidé qu'on irait déjeuner à la campagne. GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, À cheval, 1883, page 398. Ø 8. (Cela) se passait au port de commerce, le matin du second jour, après sa fuite de chez lui. JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Mon frère Yves, 1883, page 313. SYNTAXE : Après un déjeuner rapide, — plusieurs essais, — la découverte de, — la mort de, — une dernière tentative, — une explication, — cet effort, — sa conduite de ce soir, — la moisson, — la pluie, etc.; après la guerre, — le repas, — un long silence, — l'orage, — une étape difficile, — ce cauchemar, — quelques paroles, — ce lent martyre, — ma première blessure, — tant de détours, — quelques tours, etc. — Sans prédéterminant : Ø 9. — Il faut reconnaître que Monsieur Keller a bien du talent — dit maman après échange de quelques banales politesses. ANDRÉ GIDE, Geneviève, ou la Confidence inachevée, 1936, page 1380. Ø 10. J'oubliais de dire que la récompense est décernée chaque mois, après vérification des bons d'entrées;... ALBERT CAMUS, Caligula, 1944, page 48. SYNTAXE : Après accord avec, — analyse, — communication de, — comparaison de, — consultation, — délibération du, — déduction de, — dessication, — échange de, — enquête, — épuisement de, — examen, — entente avec, — lecture de, — réflexion, — mûre réflexion, — remise de, — vérification, etc. — Vieilli. Après + substantif + participe passé épithète : Ø 11. Tous les animaux nouveau-nés ont besoin de leur mère pendant plus ou moins de temps, et nous ne voyons pas que leur société subsiste après le besoin passé. PIERRE-AMBROISE-FRANÇOIS CHODERLOS DE LACLOS, De l'Éducation des Femmes, 1803, page 451. Ø 12. Ce n'est pas la mort du vieux bouc que je regrette! Quand je l'ai vu saigner dans sa baignoire, j'ai chanté de joie, j'ai dansé. Et aujourd'hui encore, après quinze ans passés, je n'y songe pas sans un tressaillement de plaisir. JEAN-PAUL SARTRE, Les Mouches, 1943, page 37. SYNTAXE : Après son fermage payé (SAY, Traité d'économie politique, 1832, page 413); après ses illusions perdues (FLAUBERT, Correspondance, 1839, page 45); après le soleil couché (BARRÈS, Le Voyage de Sparte, 1906, page 5); après fortune faite (PROUST, Le Temps retrouvé, 1922, page 845). Remarque : Le Bon Usage (Maurice Grevisse) 1961, § 779 indique que cette tournure était beaucoup plus fréquente au XVIIe. siècle qu'aujourd'hui et qu'elle s'est développée sous l'influence des tournures latin du type Post Romam conditam. — Après ça, après cela, après quoi. Les pronoms se réfèrent aux faits énoncés dans la phrase précédente ou même antérieurement : Ø 13. Et qu'on ne me parle pas, après cela, du travail, je veux dire de la valeur morale du travail. ANDRÉ BRETON, Nadja, 1928, page 54. Ø 14. « Après quoi, la tempête apaisée, je me mis en marche. Je marchai cinq jours et quatre nuits. » ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Terre des hommes, 1939, page 162. 3. Locutions : — Après coup, locution adverbiale. Après ce fait, cet événement, par la suite : Ø 15. Je me suis reproché après coup ma sotte timidité, et j'ai eu le regret de n'avoir pas fait mon devoir. MARIE-FRANÇOISE-PIERRE GONCTHIER DE BIRAN, DIT MAINE DE BIRAN, Journal, 1814, page 27. — Tours du type minute après minute, ligne après ligne, l'un après l'autre, exprimant la succession, l'itération : Ø 16. C'était la maison où elle l'avait attendu, nuit après nuit, au retour des Communes, la maison toujours éclairée qu'il voyait briller de loin dans le brouillard quand il rentrait après une dure séance. ÉMILE HERZOG, DIT ANDRÉ MAUROIS, La Vie de Disraëli, 1927, page 251. Ø 17. On tirait en aveugles, pièce après pièce, coup par coup... JEAN-GEORGES SOULÈS, DIT RAYMOND ABELLIO, Heureux les pacifiques, 1946, page 23. 4. Après + infinitif complément. [Le sujet de l'infinitif est le même que celui de la principale] : Ø 18. Quand le valet de chambre se fut retiré après avoir attisé le feu, la comtesse se tourna vers moi d'un air indéfinissable et me dit :... HONORÉ DE BALZAC, La Peau de chagrin, 1831, page 126. Ø 19. Bernard et André avaient eu la joyeuse surprise de se retrouver à la caserne, après s'être perdus de vue pendant des années. ROGER MARTIN DU GARD, Devenir, 1909, page 10. Ø 20. Face à notre diplomatie qui, après avoir dormi si longtemps, rêvait tout éveillée... CHARLES MAURRAS, Kiel et Tanger, 1914, page 101. Ø 21. La lumière d'un lampadaire le frappa en plein visage, puis tout de suite après avoir traversé la chaussée, il fut de nouveau enveloppé dans la demi-obscurité de la rue Beaudoin qui se fait plus sombre et plus lamentable à mesure qu'elle approche du canal de Lachine. GABRIELLE ROY, Bonheur d'occasion, 1945, page 255. — Exception : le sujet de l'infinitif n'est pas le même que celui de la principale (Confer Syntaxe du français contemporain (KRISTIAN SANDFELD) tome 3 1965, § 319) : Ø 22.... après nous être séparés d'elle, elle avoit chargé les puissances... LOUIS-CLAUDE DE SAINT-MARTIN, L'Homme de désir, 1790, page 306. Ø 23. Après avoir quitté cette ville [= après que nous eûmes ou qu'ils eurent quitté...] , la pluie cessa et le vent tourna au nord. HECTOR MALOT, Sans famille, éditions Vehl et Klasing, 1878, page 110 (Syntaxe du français contemporain (KRISTIAN SANDFELD) tome 3 1965, § 319 ). Ø 24. Après avoir pris leurs dispositions, elle monta dans le train de Paris. GASTON CHÉRAU, La Maison du quai, page 112 (Syntaxe du français contemporain (KRISTIAN SANDFELD) tome 3 1965, § 319 ). — Exceptionnellement après est suivi de l'infinitif : Ø 25. En hiver, quand il neige, au coin du feu qu'on aime, Pour nous, après causer, la volupté suprême, Ce serait de nous lire un roman tour à tour :... CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Poésies complètes, Après une lecture d'Adolphe, 1829, page 113. Ø 26. Le cauchemar a parfois un trait comique : Daniel de Foë raconte qu'un joueur de cornemuse endormi sur le pavé, après boire, est ramassé pour mort, chargé sur un chariot de cadavres; il se réveille, s'assied sur le tas immonde et se remet à jouer. PAUL MORAND, Londres, 1933, page 24. Remarque : Dans après déjeuner, — dîner, — souper, — goûter, déjeuner, dîner, souper, goûter sont en fait des substantifs sans prédéterminant. — Après + substantif ou pronom avec ellipse de l'infinitif composé : Ø 27. Après le fromage, la bonne venait de servir des confitures et des poires. [Après avoir servi le fromage...] ÉMILE ZOLA, Au Bonheur des dames, 1883, page 575. Ø 28. Après le sable, Mermoz affronta la montagne. [Après avoir affronté le sable...] ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Terre des hommes, 1939, page 155. Ø 29. Le premier jour, après son café, il avait commandé un verre de calvados. [Après avoir commandé (ou pris) son café...] GEORGES SIMENON, Les Vacances de Maigret, 1948, page 18. — De même, après + terme désignant une personne : Ø 30. Si Eichendorff, créateur, après Tieck et Brentano, du romantisme d'atmosphère, échappe à tous les déchirements intérieurs qui définissent les autres romantiques, Heinrich von Kleist, lui, porte au fond de sa nature et exprime dans son oeuvre des conflits... ALBERT BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, page 317. Remarque : Confer aussi l'expression après moi, quand je serai mort. " Mais après moi vous ne manquerez de rien. " (MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, L'Héritage, 1884, page 484). B.— Après que, locution conjonctive. — Suivi de l'indicatif : Ø 31.... par conséquent nous ne nous les [nos actions] rapportons point à nous-mêmes, ni pendant que nous les faisons, ni après que nous les avons faites;... VICTOR COUSIN. Histoire de la philosophie du XVIIIe. siècle 2, 1829, page 499. Ø 32. Ce soir-là, après qu'ils eurent mangé leurs pommes de terre et terminé leur chétif dîner, les trois frères demeurèrent réunis. MAURICE BARRÈS, La Colline inspirée, 1913, page 267. Ø 33. Après que j'avais fait mes gammes, mes arpèges, un peu de solfège, et ressassé quelque morceau des bonnes traditions du pianiste, je cédais la place à ma mère qui s'installait à côté de Mlle. de Goecklin. ANDRÉ GIDE, Si le grain ne meurt, 1924, page 357. Ø 34. Mais un tel mouvement ne me semble possible que dans longtemps, après que la guerre aura causé au monde bien plus de maux qu'elle n'a fait encore. JULIEN BENDA, La Trahison des clercs, 1927, page 237. — Suivi du subjonctif : Ø 35. Telle avait été en tout ceci l'innocence du professeur que beaucoup de Coustous, dont aucun n'avait voulu assister au mariage, affectèrent de répondre à son salut après qu'il eût trahi. FRANÇOIS MAURIAC, Génitrix, 1923, page 333. Ø 36. Si elle n'osait pas dire quelle place il occupait dans son coeur, ses lettres me le laissèrent apprendre après qu'il l'eût quittée à jamais, et aussi certain éclat de larmes, au lendemain de l'enterrement de mon père. GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, La Naissance du jour, 1928, page 16. Ø 37. Le lendemain matin, tandis qu'Yves buvait son chocolat dans son lit, après que son grand-père fût venu l'embrasser (...) on parla d'abord de Napoléon, ce qui était entre la grand-mère et le petit-fils un sujet suivi de conversations, de controverses, de méditations et de perplexités en commun. PIERRE DRIEU LA ROCHELLE, Rêveuse bourgeoisie, 1939, page 118. Ø 38. Après que tu m'aies abandonnée, j'ai d'abord fui le couvent pour la montagne. ALBERT CAMUS, La Dévotion à la croix, adapté de Calderon de la Barca, 1953, page 578. Remarque : Pourquoi le développement du subjonctif avec après que depuis le début du XXe. siècle? M. Stéfanini, en 1953, dans Remarques sur la syntaxe d'après que en français moderne estimait que chez les sujets qui emploient tantôt l'indicatif, tantôt le subjonctif avec après que, le subjonctif " exprime un procès dont la réalité ne peut faire aucun doute, dont la réalisation est garantie par après que, mais il permet de le considérer dans le temps in fieri, qui est en train de se faire pour aboutir au temps in esse, où se déroule (s'est déroulé ou se déroulera) le procès principal. " (page 79). " En se faisant suivre du subjonctif, après que conserve, dans toute la mesure du possible, sa symétrie avec avant que qui, grâce au discordantiel pouvait déjà établir entre deux faits un lieu non seulement temporel, mais idéel. " (page 83). En 1955, dans Nouvelles remarques sur la syntaxe d'après que, il s'efforce d'expliquer pourquoi un vaste public a manifesté un tel empressement à adopter la nouvelle tournure. Avant que et après que " ne datent pas avec précision le procès exprimé par la principale (...) mais le situent simplement comme antérieur ou postérieur à un autre procès qui ne coïncide pas avec lui. Dans les deux cas, on établit entre les deux faits un rapport de consécution (...); avant que diffère, retarde l'arrivée, après que ne la fait pas attendre. Mais la chronologie de raison reste la même : les deux locutions placent identiquement deux événements à la suite l'un de l'autre. " (pages 125-126). " On a dégagé des deux locutions cet élément commun qu'elles établissent une chronologie de raison, qu'elles mettent " en suite " deux procès, et qu'elles le font en situant dans l'en deçà d'un événement le fait à dater, qu'elles semblent donc comporter une sorte de jugement critique sur le juste moment de survenance du procès. (...) [La langue] néglige les raisons puissantes qui justifient l'emploi de l'indicatif avec après que, pour ne retenir que la nuance de critique implicite qu'elle contient (...). " (page 136). La langue réalise ainsi une tendance à la symétrie entre deux constructions de sens opposé, dont l'opposition semble suffisamment marquée par les locutions conjonctives. Pour M. Wilmet, dans Après que suivi du subjonctif, 1969, après que " oblige l'usager du français moderne à saisir l'événement subordonné par sa séquelle verbale. Comme les tiroirs composés de l'indicatif ne suffisent plus à marquer l'aspect extensif, l'habitude s'installe de recourir au mode subjonctif, — où les formes simples et les formes composées constituent toujours des couples aspectuels véritables — , en sacrifiant ainsi l'expression du temps (au demeurant assurée par la conjonction) à celle de l'aspect (...) Le mode subjonctif, presque insensible à la notion de temps, fournit (...) une solution unique joignant la simplicité à l'efficacité. " pages 37-38. C.— Après en emploi adverbial : Ø 39. Le sourd baissa la tête, puis il vint se mettre à genoux devant la porte de l'Égyptienne. — Monseigneur, dit-il d'une voix grave et résignée, vous ferez après ce qu'il vous plaira : mais tuez-moi d'abord. VICTOR HUGO, Notre-Dame de Paris, 1832, page 439. Ø 40. Il me semble, parfois, qu'une idée m'est apportée par un ange, et, bientôt après, je crois entendre l'éclat de rire du démon. LÉON BLOY, Journal, 1900, page 186. Ø 41. Un quart d'heure après, la cloche sonna pour le premier déjeuner. ANDRÉ GIDE, Isabelle, 1911, page 610. Ø 42. Beaucoup d'Indous, après, ont perdu leur travail et sont plus ou moins morts de faim, forcément. ANDRÉ MALRAUX, Les Conquérants, 1928, page 35. Ø 43. Un immense éclair bleu l'aveugla, dans une espèce de craquement sec. Crispé, arqué, silhouette convulsée et effrayante, Thaunier avait fait un bond terrible, se jetait en arrière, les bras fléchis, la face au ciel, les mains crochues comme des griffes. Il retomba lourdement. L'instant d'après, très loin, montaient des cris et des coups de feu... MAXENCE VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, page 58. Ø 44. Toute la journée après, il marmonnait à part lui : « Et les cinquante centimes? Où ai-je donc fourré les cinquante centimes? ». LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 31. Ø 45. D'un pas pressé, les uns à cause de leur angoisse, les autres à cause de leur spectacle ou de leur rendez-vous à peine secret, les visiteurs sortirent, les femmes d'abord, en assurant leurs épingles à chapeau, les hommes après, par ordre d'âge. Puis la porte retomba, puis le silence. MAURICE DRUON, Les Grandes familles, tome 1, 1948, page 19. — Vieux, inusité ou régionalisme. Par après (au lieu de l'adverbe employé seul) : Ø 46. Il fut (...) un temps où je ne m'abandonnais que de trop bon coeur à des rêves de gloire et de dévouement dont l'avare réalité m'a si bien appris, par après, à ne faire que peu d'état; un temps... temps lointain, perdu, à jamais envolé! OSCAR VLADISLAS DE LUBICZ-MILOSZ, L'Amoureuse initiation, 1910, page 7. Ø 47. Un moment, elle eut l'idée de s'excuser par un mot de lettre, et de prier son cousin Gaspard, dont les parents étaient aubergistes au même lieu de Saint-Amand, de lui ramener la Pauline. Mais elle n'osa... Elle devait s'en repentir plus de quatre fois, par après. HENRI POURRAT, Gaspard des Montagnes, Le Château des sept portes, 1922, page 21. Remarque : Selon LE BON USAGE (MAURICE GREVISSE) 1964, § 929 (historique), " l'expression est restée courante en Belgique "; en après a totalement disparu de l'usage moderne. — Après employé substantivement : Ø 48.... j'ai essayé ardemment d'imaginer un après quelconque, un lendemain quelque part ailleurs,... JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Le Roman d'un enfant, 1890, page 23. Ø 49. Il faudrait, en un mot, suivre la grande voie si profondément creusée par Zola, mais il serait nécessaire aussi de tracer en l'air un chemin parallèle, une autre route, d'atteindre les en deçà et les après, de faire, en un mot, un naturalisme spiritualiste; ce serait autrement fier, autrement complet, autrement fort! GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Là-bas, tome 1, 1891, page 11. Ø 50. Si nous avons, dans les pages qui précèdent, déjà rencontré le temps sur le chemin qui nous menait à la subjectivité, c'est d'abord parce que toutes nos expériences, en tant qu'elles sont nôtres, se disposent selon l'avant et l'après, parce que la temporalité, en langage kantien, est la forme du sens intime, et qu'elle est le caractère le plus général des « faits psychiques ». MAURICE MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception, 1945, page 469. II.— Transpositions spatiales et logiques de la notion de postériorité temporelle. A.— Transposition spatio-temporelle. Après indique non seulement le point de repère, mais aussi le fait qu'on est passé devant ce repère. Après l'église, on rencontre un hôtel du XVIIe. siècle : Ø 51. Qu'est-ce qu'il y a après le bord du glacier, hein? Plus rien, c'est le trou. CHARLES-FERDINAND RAMUZ, Derborence, 1934, page 15. Ø 52. Après la place, j'avais le choix entre deux rues également attirantes. J'ai pris celle de droite, qu'illustrent deux épiceries exubérantes, l'une en face de l'autre. LOUIS FARIGOULE, DIT JULES ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, La Douceur de la vie, 1939, page 42. — En liaison avec des verbes exprimant une position : venir, (se) placer, (se) situer, (se) ranger, (se) mettre, etc. — En liaison avec des verbes ou des locutions verbales évoquant un mouvement vers un but qui se dérobe : Ø 53. Tout ce qui tient aux trois ou quatre cents familles les plus distinguées soupire après l'établissement d'une chambre haute, à l'exemple de celle d'Angleterre; leur orgueil se nourrit de l'espérance de n'être plus confondues dans la foule des gentilshommes. EMMANUEL-JOSEPH SIEYÈS, Qu'est-ce que le Tiers-état? 1789, page 59. Ø 54. Ces moments ont passé, et notre merveilleuse science, avec eux, s'est évanouie. Nous courons après nos souvenirs mêmes comme après des ombres. JEAN GUÉHENNO, Journal d'un homme de 40 ans, 1934, page 14. Ø 55. Voilà, juste à ce moment-là, qu'il arrive une tuile... Les gendarmes cherchent après Gorloge... Toute la maison est en émoi... C'était pour qu'il parte immédiatement faire ses vingt-huit jours... LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Mort à crédit, 1936, page 207. B.— Transposition logique. Après exprime l'infériorité de rang. Je me suis classé deuxième après Jean : Ø 56. Mon domestique, qui s'appelait Larive, avait été très attaché à mon père; c'était peut-être, après mon père lui-même, le meilleur homme que j'aie jamais connu. ALFRED DE MUSSET, La Confession d'un enfant du siècle, 1836, page 160. Ø 57. Quant à la vieille Mme. Keller, qui se décida la première à quitter ce monde, je ne me souviens d'elle que comme de la créature la plus ratatinée qu'il m'ait été donné de voir, après ma grand'mère. ANDRÉ GIDE, Si le grain ne meurt, 1924, page 495. C.— Locutions. 1. D'après, locution prépositive. a) Exprimant la norme, le modèle auquel on se conforme : Ø 58. Nous supportons l'adversité, non d'après tel ou tel principe, mais selon notre éducation, nos goûts, notre caractère, et surtout notre génie. FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Essai sur les Révolutions, tome 2, 1797, page 164. Ø 59. Cette dernière [Mme. de Noailles] et moi nous étions occupés à peindre d'après nature, tandis que les dames de Bellegarde près d'un piano chantaient avec Garat et un autre. ÉTIENNE-JEAN DELÉCLUZE, Journal, 1826, page 338. b) Exprimant l'indice. À en juger par : Ø 60. Joseph salua le tambour-major et il comprit que ce héros, d'après sa manière de répondre, n'était même pas du pays voisin. PIERRE-JEAN JOUVE, La Scène capitale, 1935, page 13. 2. Après tout, locution adverbiale. Sert à introduire une affirmation considérée comme décisive malgré tout ce qui précède. Tout bien considéré, quoi qu'il en soit : Ø 61. — Pour qui me prenez-vous donc? Il appartiendrait à madame de décider : l'un de nous partirait et ce serait peut-être moi. J'ai déjà fait mon sacrifice. Après tout, que suis-je ici de plus que vous? Je suis le précepteur de Bertrand comme vous êtes l'institutrice d'Emmanuele. FRANÇOIS MAURIAC, Asmodée, 1938, I, 3, page 24. 3. Et après? et puis après? interjection. Interjection marquant le défi. = et alors? et ensuite? Ø 62. — Eh bien, oui, c'est moi, s'écriait-il. Et après? D'abord, je ne veux pas qu'on me regarde. Regarde ailleurs! Et puis, va te coucher. Au trot! MAXENCE VAN DER MEERSCH, L'Empreinte du dieu, 1936, page 48. Ø 63. Ça saigne. Et puis après? Qu'est-ce qu'il y a de changé? JEAN-PAUL SARTRE, La Nausée, 1938, page 131. III.— Archaïque ou populaire. Après exprime une relation exclusivement spatiale (= à, sur, contre). A.— Après + substantif de l'inanimé : Ø 64. On arrivait la blouse et le pantalon toujours un peu mouillés, mais on était sous des saules épais, dans une petite île escarpée, verte comme une émeraude, sur un beau gazon tout semé de vergi-mein-nicht et de grandes cloches blanches doucement odorantes qui s'entortillaient après les joncs. ALPHONSE KARR, Sous les tilleuls, 1832, page 195. Ø 65. Comme ça, les hommes ne viendraient pas se pendre après ses jupes. ÉMILE ZOLA, Nana, 1880, page 1287. Ø 66. La figure animée, il [Poil de Carotte] bavarde, il chante pour lui seul et il saute après les branches. JULES RENARD, Poil de carotte, 1894, page 72. Ø 67. Je travaille de mon mieux (ce qui n'est pas beaucoup dire), m'acharnant après un livre que je me suis promis de finir mais que j'eusse dû finir il y a deux ans;... ANDRÉ GIDE, Correspondance avec Paul Valéry, 1901, page 389. — Adverbialement : Ø 68. MADAME MAIRET. — Et sa robe, est-elle tout-à-fait garnie? SOPHIE. — Pas encore; mais je vais me mettre après, aussitôt que j'aurai terminé sa collerette. THÉODORE LECLERCQ, Le Mariage manqué ou On attrape plus de mouches avec du miel qu'avec du vinaigre, 1835, 1, page 54. B.— Après + substantif désignant une personne : Ø 69. Et Lise s'irritait de n'être point la maîtresse, tourmentée maintenant d'une jalousie particulière, prête encore à le laisser culbuter sa cadette, histoire d'en finir, tout en enrageant de le voir s'échauffer après cette garce, dont elle avait pris en exécration la jeunesse, la petite gorge dure, la peau blanche des bras, sous les manches retroussées. ÉMILE ZOLA, La Terre, 1887, page 362. Ø 70. Puis il a passé une oie; elle criait après le garçon. Le petit criait après ceux qui étaient devant Ça semblait tous des fous. JEAN GIONO, Le Grand troupeau, 1931, page 65. — Avec un nom d'action : Ø 71. Nana ne se montra pas surprise, ennuyée seulement de la rage de Muffat après elle. ÉMILE ZOLA, Nana, 1880, page 1258. — Après = derrière : Ø 72. TERSKY. (...) Si Gustave à Lutzen a reçu le trépas, Rassemblant après lui ses valeureux soldats, Bannier, digne héritier de son puissant génie, À son roi qui n'est plus soumet la Germanie. BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, Wallstein, 1809, I, 1, page 4. Ø 73. Relu Les Confessions de Saint Augustin. La frénésie des sens, il semble l'avoir vaincue d'un coup, après sa conversion. Il parle admirablement de cette chaîne terrible qu'il traînait après lui avec délices. JULIEN GREEN, Journal, 1943, page 7. STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 69 730. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 109 554, b) 102 160; XXe. siècle : a) 96 846, b) 90 085.