Définition: AMPLEUR, substantif féminin.

Définition: AMPLEUR, substantif féminin. A.— [En parlant de choses concrètes] Caractère de ce qui est ample. 1. [En parlant d'une chose considérée indépendamment de son relief] Ampleur d'une toile, d'une fleur : Ø 1.... le Français, s'étant fait livrer toutes les nappes de la maison, les avait suspendues aux fenêtres en façon de rideau, profitant de l'ampleur de ces blanches toiles pour les relever en festons sur les côtés. RODOLPHE TOEPFFER, Nouvelles genevoises, 1839, page 411. Ø 2. Ô robe! l'ampleur de tes lés n'est autre que la multitude de mon peuple : Car de quoi un prince est-il revêtu, que du ruissellement de son peuple, de ses épaules à ses talons? PAUL CLAUDEL, Le Repos du septième jour, 1901, III, page 853. Ø 3. J'ai vu le cèdre ainsi s'établir parmi la rocaille et sauver de la destruction l'ampleur de ses branchages... ANTOINE DE SAINT-EXUPÉRY, Citadelle, 1944, page 534. 2. Plus généralement. [En parlant d'une chose qui a ou suggère la forme d'un volume] a) [D'une partie du corps humain ou du mouvement d'un membre ou d'un organe du corps humain] Ampleur du front; ampleur des gestes; ampleur de la voix : Ø 4. Dès Bassano, la physionomie de la population se modifie. La longue figure italienne peu à peu s'arrondit, les cheveux sont encore roux, mais l'oeil devient bleu. L'ampleur des formes laisse aussi bien loin l'idéale maigreur des Vénitiennes. JULES MICHELET, Sur les chemins de l'Europe, 1874, page 486. Ø 5. La façon d'aller et de venir de ce géant à longues moustaches, la forme de ses chapeaux, la coupe de ses pantalons à la hussarde, l'enflure de sa voix, surtout, et l'ampleur de ses gestes, rappelaient, par une évidente analogie, le je ne sais quoi d'un peu théâtral... PAUL BOURGET, Essais de psychologie contemporaine, 1883, page 99. Ø 6.... il eut une ampleur innée de foulée, une aisance singulière d'allure qui frappèrent les regards. JOSEPH DE PESQUIDOUX, Chez nous, tome 2, 1923, page 58. Ø 7. Il y a des chanteurs dont on dit : ils ont un filet de voix... l'ampleur et le volume leur manque. ANDRÉ LÉVINSON, La Danse au théâtre, 1924, page 169. b) [D'un vêtement, d'un lieu] Ampleur d'une robe, d'une ville : Ø 8. [Les sommets] sont presque toujours couronnés de pins dont quelques-uns d'une grosseur telle, qu'en les creusant on en forme des bariques ou fontaines de quatre à cinq pieds de diamètre : j'en ai vu une de cette ampleur dans la cuisine de l'hospice voisin de la grotte de Gèdres. JEAN DUSAULX, Voyage à Barège et dans les Hautes-Pyrénées fait en 1788, tome 2, 1796, page 77. Ø 9. Vêtu d'un gros molleton bleu, dont l'ampleur noyait ses membres pareils à des racines, il abandonnait sur ses genoux ses mains contrefaites, lamentables au grand soleil. ÉMILE ZOLA, La Joie de vivre, 1884, page 1108. — Spécialement. COUTURE. Donner (de) l'ampleur : Ø 10. Assez lâche sur les hanches, la jupe à la mode du moment se rattrapait vers les genoux, au bas d'un empiècement à boutons roses descendant de la taille au milieu, par devant Elle était tout à fait étroite aux chevilles : trois plis creux donnaient l'ampleur pour marcher. LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 411. B.— Au figuré. Caractère de ce (ou celui) qui embrasse un domaine étendu. 1. [En parlant de l'information envisagée du point de vue de son étendue] : Ø 11. Mais plus profondément encore s'élabore une pensée inconnue du penseur, qui dépasse par l'ampleur de ses connaissances, par leur sûreté et leur extension dans le temps, toutes les manifestations connues de la pensée... MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 12, juillet 1919-juin 1920, page 222. Ø 12. Vos carnets sont admirables par le mépris des vains artifices et l'ampleur de votre information. JACQUES-ÉMILE BLANCHE, Mes modèles, 1928, page 199. 2. [En parlant d'une disposition de l'esprit] Ampleur de(s) vues : Ø 13. D'où vient qu'en même temps la réflexion rétrécit l'ampleur de la vie spontanée, puisqu'elle y introduit des limites et des contrastes, tandis qu'elle élargit la puissance des motifs particuliers... MAURICE BLONDEL, L'Action, Essai d'une critique de la vie, 1893, page 113. Ø 14. De quoi s'agit-il en effet? D'obtenir (...) qu'il y ait accord aussi parfait que possible entre l'élan et le résultat de notre effort, égalité entre l'ampleur des aspirations volontaires et la grandeur des fins voulues. MAURICE BLONDEL, L'Action, Essai d'une critique de la vie, 1893, page 113. Ø 15.... il est certain que mon esprit n'a pas encore atteint à assez d'élévation et d'ampleur pour saisir complètement ma vie. ALBERT BÉGUIN, L'Âme romantique et le rêve, 1939, page 99. 3. Critique littéraire. a) [Se dit d'un écrit ou d'un entretien envisagé du point de vue de l'étendue de la matière] Ampleur d'un sujet, d'un débat : Ø 16. Nous continuons, le soir, la lecture des Mémoires de Mme. d'Epinay. Parfois nous comparons le texte de Rousseau, qui paraît aussitôt, auprès, d'une plénitude d'une ampleur, d'une onction admirables. ANDRÉ GIDE, Journal, 1905, page 188. Ø 17.... l'on voit apparaître chez les philosophes chrétiens des entreprises historiques d'une ampleur jusqu'alors inconnue, embrassant la totalité des faits accessibles et les systématisant à la lumière d'un principe unique. ÉTIENNE GILSON, L'Esprit de la philosophie médiévale, tome 2, 1932, page 190. b) [Se dit du style, de la phrase, envisagés du point de vue de l'étendue matérielle d'un énoncé et/ou de son contenu] Ampleur de la composition : Ø 18. [Le père Vavassor] avait dénoncé bien avant Joseph de Maistre, les signes auxquels on pouvait infailliblement reconnaître, entre tous, un livre port-royaliste. Un de ces signes, c'étaient d'abord les circuits de périodes, les longueurs de phrases interminables; une étendue, une ampleur, une rotondité qui sentait le barreau, et encore le barreau pompeux, le barreau des jours solennels et non de tous les jours... CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Port-Royal, tome 2, 1842, page 547-548. Ø 19.... Delacroix est la dernière expression du progrès dans l'art. Héritier de la grande tradition, c'est-à-dire de l'ampleur, de la noblesse et de la pompe dans la composition, et digne successeur des vieux maîtres, il a de plus qu'eux la maîtrise de la douleur, la passion, le geste! CHARLES BAUDELAIRE, Salon de 1846, 1846, page 130. 4. [En parlant d'une action, d'un sentiment, d'une qualité] Étendue, importance. Saisir un événement, une chose dans (toute) son ampleur : Ø 20. Ainsi — n'étaient certaines destinées singulières — j'imagine nos saints ainsi que des géants puissants et doux dont la force surnaturelle se développe avec harmonie, dans une mesure et selon un rythme que notre ignorance ne saurait percevoir, car elle n'est sensible qu'à la hauteur de l'obstacle, et ne juge point de l'ampleur et de la portée de l'élan. GEORGES BERNANOS, Sous le soleil de Satan, 1926, page 124. Remarque : 1. Prendre de l'ampleur; prendre toute son ampleur (au figuré, plus rare au propre) : Ø 21. La matinée s'écoulait, l'instant arriva où la végétation de juillet sous un soleil enfin chaud prend toute son ampleur et pendant quelques heures trouve des puissances qui dépeuplent la campagne. MAURICE BARRÈS, L'Appel au soldat, 1900, page 297. Ø 22. «... c'est au système Taylor qu'ils en ont... » Le système Taylor, dans la bouche d'Adrien, prenait une ampleur, une résonance de religion ou tout au moins, de philosophie supérieure. LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 258. Remarque : 2. Avec ampleur (au propre et au figuré). D'une manière ample, amplement : Ø 23.... quand il prend une idée, il la développe, l'agrandit, la drape; c'est le manteau à longs plis porté avec ampleur et grandeur, c'est la toge. CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Mes poisons, 1869, page 94. Ø 24. Mais voilà un des aspects les plus intéressants de l'oeuvre de M. Bouteiller au lycée de Nancy : il fait avec ampleur son geste de semeur et ignore absolument ce que devient la graine. MAURICE BARRÈS, Les Déracinés, 1897, page 20. STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 607. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : a) 234, b) 555; XXe. siècle : a) 841, b) 1 578.