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ALEXANDRIN1, -INE, adjectif.

Publié le 21/10/2015

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ALEXANDRIN2, -INE, adjectif et substantif masculin.  

A.—  Emploi adjectival.  Qualifie le vers de douze syllabes (quand la rime est masculine) ou de treize syllabes (si l'on compte l'e de la rime féminine), appelé aussi vers héroïque ou grand vers : 

Ø 1. N'en doutez pas, si un écrivain aussi parfait eût été forcé de mettre sur la scène tragique un sujet tout moderne, il eût employé le mot simple et eût rompu le balancement régulier et monotone du vers alexandrin, par l'enjambement d'un vers sur l'autre; il eût dédaigné l'hémistiche. Et peut-être même (ce que nous n'osons pas) réintégré l'hiatus,... 

ALFRED DE VIGNY, Lettre à Lord... sur la soirée du 24 octobre et sur son nouveau système dramatique, 1829, page 274. 

Ø 2. Il y a (...) dans le vers [alexandrin] classique certains éléments fixes et immuables, certains éléments susceptibles de variété. La coupe qui sépare les deux hémistiches ne peut pas être déplacée : elle tombe obligatoirement après les six premières syllabes et coupe le vers en deux parties égales comme nombre de syllabes (...). Chaque demi-vers est aussi divisé en deux parties ou mesures, se terminant chacune sous un temps marqué ou accent rythmique. (...) mais le nombre des syllabes de chaque mesure peut varier de 1 à 5.

MAURICE GRAMMONT, Petit traité de versification française, 1908, pages 88-89. 

B.—  [Emploi de préférence substantivement]  Employer l'alexandrin dans un poème (Dictionnaire de l'Académie Française) : 

Ø 3. Des alexandrins bien ronflants sont un cache-sottise...

HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase,  1817, page 258. 

Ø 4.... nécessairement, il y a du tour de force dans l'exécution de ce raccourci qui consiste à emprisonner sous les douze syllabes d'un alexandrin une idée dont la transcription naturelle est autre;...

PAUL BOURGET, Essais de psychologie contemporaine,  1883, pages 100-101. 

Ø 5. Les vers m'ennuient, l'alexandrin est usé jusqu'à la corde; le vers libre est informe. Le seul poète qui me satisfasse aujourd'hui, c'est Rimbaud.

ANDRÉ GIDE, Les Faux-monnayeurs,  1925, pages 1149-1150. 

Remarque : Syntagmes fréquents alexandrin épique, grave, harmonieux, héroïque, majestueux, noble. 

 

 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 293. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 378, b) 206; XXe.  siècle : a) 452, b) 540. 

ALEXANDRIN1, -INE, adjectif.  

A.—  Qui appartient à la ville d'Alexandrie, qui est relatif à cette ville, à ses habitants ou à ses moeurs : 

Ø 1. L'Évangile de saint Marc est donc un abrégé de saint Matthieu écrit dans le sens le plus convenable aux Juifs d'Alexandrie. C'est l'Évangile juif alexandrin. C'est l'Évangile essénien.

PIERRE LEROUX, De l'Humanité, de son principe et de son avenir, tome 2, 1840, page 802. 

Ø 2. Pour obéir à la tradition de toutes les orgies alexandrines, elle s'était livrée tout d'abord, à trois amants à la fois; mais sa tâche ne se bornait pas là, et jusqu'à la fin de la nuit, selon la loi des esclaves qui devenaient courtisanes, elle devait prouver par un zèle incessant que sa nouvelle dignité n'était point usurpée.

PIERRE LOUÿS, Aphrodite,  1896, page 152. 

—  Emploi substantivement.  Habitant d'Alexandrie : 

Ø 3. Lorsqu'après sa mort, on renversa les statues d'Antoine, un Alexandrin donna cinq millions de notre monnaie, pour qu'on laissât debout celles de Cléopâtre.

JULES MICHELET, Histoire romaine, tome 2, 1831, page 315. 

1. LINGUISTIQUE.  Dialecte alexandrin. Dialecte provenant de la confusion du dialecte macédonien avec les autres dialectes grecs. Connu aussi sous le nom de dialecte hellénistique. 

2. LITTÉRATURE.  Poésie alexandrine. Poésie érudite, précieuse et parfois énigmatique dans laquelle le raffinement des sentiments s'allie à la perfection de l'expression et qui, entre l'époque d'Alexandre et celle d'Auguste, a fleuri en particulier à Alexandrie : 

Ø 4. On ne saurait trop recommander aux amateurs de littérature comparée l'étude de la littérature alexandrine, dont l'historien [A. Couat] en quelque sorte définitif que nous venons de citer observe, dès 1882, combien elle a d'analogies avec celle de la France contemporaine.

JULIEN BENDA, La France byzantine ou le Triomphe de la littérature pure.  1945, page 223. 

3. PHILOSOPHIE.  Philosophie alexandrine. Celle de l'école néo-platonicienne d'Alexandrie : 

Ø 5. Si ses penchants le portaient avec une passion à chaque instant plus évidente vers les recherches métaphysiques, il était clair aussi que certaines périodes de la pensée humaine l'avaient retenu par un charme persistant, et tout particulièrement l'époque de la fin de la philosophie alexandrine et les premières lueurs de ce qu'on a convenu d'appeler l'idéalisme allemand,...

JULIEN GRACQ, Au Château d'Argol,  1938, pages 159-160. 

—  Emploi substantivement.  Littérateur ou philosophe appartenant à l'école d'Alexandrie : 

Ø 6. Les conditions de cette union dépendaient d'un premier problème : savoir, s'il y a correspondance entre les existences invisibles que la métaphysique suppose et les notions que la logique déduit, entre les réalités et les idées? C'était ce problème célèbre des universaux légué par l'Antiquité, dans une phrase de l'Alexandrin Porphyre, au Moyen Âge qui l'accepta.

FRÉDÉRIC OZANAM, Essai sur la philosophie de Dante,  1838, page 38. 

B.—  Rare.  D'Alexandre, nom propre (Alexandre le Grand, Alexandre Sévère, Alexandre de Tralles...) : 

Ø 7. Rome roidit ses bras contre la Gaule et l'Espagne; il lui suffit de toucher du doigt les successeurs d'Alexandre pour les faire tomber. Quelle qu'ait été l'injustice des attaques de Rome, il faut avouer que ce monde alexandrin méritait bien de finir.

JULES MICHELET, Histoire romaine, tome 2, 1831, page 51. 

1. BEAUX-ARTS.  Appareil alexandrin. \" Espèce de mosaïque, ou plutôt de mosaïque précieuse, composée de porphyres rouge et vert, de marbres et d'émail. Il tire son nom de l'empereur Alexandre Sévère, qui en fut l'inventeur, selon Lampride. (...) L'appareil alexandrin fut très à la mode en Italie et en Sicile aux XIIe et XIIIe.  siècles. \" (Dictionnaire général des lettres, des beaux-arts et des sciences morales et politiques (THÉODORE BACHELET, CHARLES DEZOBRY) 1882). 

2. MÉDECINE.  vieux. Emplâtre alexandrin. \" Nom d'un emplâtre irritant, aujourd'hui inusité, inventé par Alexandre, médecin contemporain de Mesué [VIIIe-IXe siècle] \" (Dictionnaire de médecine et des sciences associées à la médecine (PIERRE-HUBERT NYSTEN) 1814-20). 

DÉRIVÉS :  Alexandriner,  verbe transitif.  néologisme, ironique.  Faire preuve d'obscurité et de subtilité excessive dans ses propos (Léon Daudet, La Recherche du beau, 1932, page 27). Alexandrinisé, -ée,  adjectif,  rare.  Gagné par la civilisation, la philosophie alexandrine (Jules Michelet, Journal, juin 1845, page 605). 

ALEXANDRINISME, substantif masculin.  

A. ANTIQUITÉ.  Civilisation grecque de l'époque alexandrine : 

Ø 1. Plusieurs fois, depuis que Heidegger a ramené devant nous l'image du chevalier marchant à la mort, l'éloge de la dureté a été opposé à une époque dont l'alexandrinisme amollit les énergies et dissipe les audaces.

EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère,  1946, page 563. 

—  Spécialement, vieux.  Système philosophique des néo-platoniciens d'Alexandrie. 

B.—  LITTÉRATURE.  \" Caractère de pensée et de style dont les écrivains et particulièrement les poètes grecs d'Alexandrie ont donné l'exemple : subtilité et obscurité, jointes au goût des allégories et des allusions érudites. \" (Vocabulaire technique et critique de la philosophie (ANDRÉ LALANDE)) : 

Ø 2. Et qui, parmi ce qu'on nomme aujourd'hui le public, aime et comprend cette merveille : les Émaux et Camées? Et qui sait goûter l'alexandrinisme et les mythologies de Théodore de Banville?

JULES LEMAÎTRE, Les Contemporains,  1885, page 80. 

Ø 3. Et le romanticisme, dit romantisme, —  et l'alexandrinisme, dit hellénisme, et la catachrèse, et la litote, et tous ces noms que nous tendions fièrement aux examens pour les faire poinçonner comme dans le métro des tickets de toute première classe, je les perçais à jour à ma façon, j'eus mon alexandrinisme à moi, mon romantisme à moi, et des litotes fausses plus belles que nos vraies.

JEAN GIRAUDOUX, Suzanne et le Pacifique,  1921, page 134. 

Ø 4. Soudain un choc en retour —  un des plus significatifs de l'histoire —  au nom de la pure littérature : l'alexandrinisme, avec son cri de guerre contre le développement, sa vénération du court et de l'exquis, sa création de l'épigramme, de l'anthologie, sa dévotion aux problèmes du langage, son mépris pour le fond, son estime pour la seule poésie, sa carence à peu près totale de prosateurs.

JULIEN BENDA, La France byzantine ou le Triomphe de la littérature pure.  1945, page 164. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 13. 

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