Ah, russe, a dit Meg, se taisant un instant.
Publié le 06/01/2014
Extrait du document
«
J'ai
été tellement surpris,dansunpremier temps,quejen'ai passuquoi dire.
Chacun sesert comme ilveut, adit Meg, servez-vous, s'ilvous plaît .
J'avais
lesentiment qu'elleseréjouissait denous avoir surpris .
Je
me suis assis àcôté deM.
Grossbard etj'ai mis enmarche monmagnétophone.
Mon Dieu, adit Matt.
Jen'ai pasvucette nourriture depuismonenfance !
Souvenez-vous, ai-jeditàMeg, moncerveau tournant àcent àl'heure, quenous étions de
Bolechow, nousaussi, ilya bien longtemps.
Bolechow, c'étaitunejolie petite ville,adit M.
Grossbard.
Unevilleheureuse.
Ilyavait douze
mille habitants.
Troiscultures différentes.
Troismille Juifs, sixmille Polonais, troismille
Ukrainiens .
Il
aparlé deson enfance, desannées pendant lesquelles mongrand-père vivaitencore là-bas.
Il était donc là.Sur son pyjama bleudeFrance, ilportait unerobe dechambre d'unecouleur
qu'on aurait puappeler bordeaux .
Les
montures épaissesdeses lunettes accentuaient
l'impression deverticalité produiteparson visage.
Ilyavait deux touffes decheveux blancsde
chaque côtédesatête, avecquelques mèchessoigneusement rabattuessurlesommet du
crâne.
Sansdoute àcause deson grand âge,jepensais enleregardant auxvisages émaciés de
ces momies égyptiennes ouprécolombiennes, quidonnent l'impression quetout cequi enétait
étranger aété éliminé avecletemps :il n'y avait plusquelespommettes saillantesd'Inca,le
nez busqué etaristocratique, lagrande bouche intelligente, lesfanons antiques quipendaient
sur lagorge.
Etcependant toutcelaétait adouci enquelque sorteparlaprésence desdeux
grandes oreilles,presque comiques, quiluidonnaient parmoments l'allured'unenchanteur.
Lorsqu'il aparlé d'une voixtellement érodéequ'ellen'étaitplusqu'un murmure, ils'est penché
parfois enavant etaclaqué sesmains surses cuisses osseuses poursouligner unpoint.
À
d'autres moments, ilse balançait légèrement enarrière, lesmains levées etles doigts écartés,
comme unpêcheur quiaurait décritsaprise, comme pourmesurer quelquechose:le temps
passé, savie.
Ledéambulateur qu'ilavait gardé prèsdeluiavait unaspect presque cérémoniel,
comme s'ilavait étél'emblème d'unobscur pouvoir religieux oupolitique.
Pendantqu'ilparlait,
il pétrissait detemps entemps samain droite aveclagauche, gestequiluidonnait unair agité.
C'était unejolie petite ville,a-t-ilrépété.
Je sais, ai-je dit.
Bon appétit ! a-t-ildit.
Je suis tellement contente,adit Meg.
Et c'est tout ceque jepeux vousraconter.
Unefoisledéjeuner terminé,nousnoussommes
installés danslasalle deséjour où,pendant desheures, elleaparlé, etson beau-frère a
raconté, àmon enchantement, sonenfance pendant laPremière Guerremondiale, évoquésa
maison delarue Dlugosa àBolechow, samaison nataledontila fini par hériter, avecsafemme
et son enfant quin'ont passurvécu àla guerre, larue Dlugosa danslaquelle ShmielJägeravait.
»
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