ABJURER, verbe transitif.
Publié le 27/09/2015
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ABJURER, verbe transitif.
I.— Sens propre. RELIGION. Abandonner, par une déclaration formelle et solennelle, une croyance religieuse.
A.— Emploi transitif. [Le complément exprime la croyance] :
Ø 1. Pour rester ici, près de votre père, j'ai répudié ma caste, abjuré ma religion, déserté mon drapeau, renié mes frères d'armes...
JULES SANDEAU, Mademoiselle de la Seiglière, 1848, page 317.
Ø 2.... mais le prince Adalbert, qui craint ou la survenance d'un héritier direct ou une révolution qui renverse le trône de Grèce, ne veut pas changer de religion avant de changer d'état, et refuse d'abjurer sa foi avant de tenir sa couronne.
EDMOND ABOUT, La Grèce contemporaine, 1854, page 220.
Ø 3. Puis, elle avait une arrière-pensée, celle de l'instruire dans le dogme catholique et de lui faire abjurer sa religion.
PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, les drames de Paris, tome 2, Le Club des valets de coeur, 1859, page 292.
Ø 4.... pauvres et durs au travail, ces petites gens, drapiers, tisserands, teinturiers, ont préféré quitter les terres du roi de France que d'abjurer la foi protestante.
PAUL MORAND, New-York, 1930, page 10.
Ø 5. Il n'y a qu'un moyen d'abjurer ce plus grand des maux qui est, tu le sais, d'être protestant, et c'est de devenir catholique, d'épouser triomphalement l'univers dans le coeur de Jésus-Christ.
PAUL CLAUDEL, Un poète regarde la croix, 1938, page 261.
B.— Emploi absolu. [L'idée de croyance est suggérée par le contexte] :
Ø 6.... mais la majorité de la ligue, tout ce qui avait des sentiments modérés, se rangea à l'opinion qu'il fallait sommer Henri de rentrer dans le sein de l'église catholique, apostolique et romaine, et le reconnaître pour maître aussitôt qu'il aurait abjuré et reçu l'absolution des évêques.
EMMANUEL DIEUDONNÉ, COMTE DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 2, 1823, page 57.
Ø 7.... mais celui-ci, vêtu de noir et tout près d'être brûlé, a peur et de la voix, du geste, explique, abjure, dément, repousse.
JULES MICHELET, Journal, 1844, page 559.
Ø 8.... Jean-Jacques n'était pas, comme il s'en vantait, citoyen de Genève. (...) Il avait laissé croire que jamais il n'avait renoncé à sa religion. Mais le récit même de la profession de foi était un aveu. Il avait réellement abjuré, et, par conséquent, n'était plus pour Genève qu'un étranger.
JEAN GUÉHENNO, Jean-Jacques, Grandeur et misère d'un esprit, 1952, page 111.
Remarque : Dans les exemples 1 et 4, l'abjuration religieuse est liée à l'abandon d'un groupe social; dans les exemples 2, 3, 5, 6, elle s'accompagne de l'adhésion à une autre religion.
— Emploi métaphorique, l'amour étant considéré comme une religion :
Ø 9. Mais briser l'idole qu'on a si tendrement aimée, abjurer le culte de toute sa jeunesse, de sa vie — Ah! Vous qui rompez si aisément des noeuds si sacrés, vous ne devez pas concevoir ce que je souffre,...
GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, Lettres inédites à Louis de Narbonne, 1794, page 235.
II.— Par analogie. Renoncer à ce que l'on faisait profession de croire ou d'aimer :
Ø 10.... et ce fut une raison suffisante sans doute, non pour abjurer la philosophie, non pour abandonner la cause des peuples, mais pour cesser de porter un nom devenu trop dangereux, et pour quitter des formes qui n'auraient plus servi qu'à réveiller les fureurs des ennemis de la liberté et de la raison.
ANTOINE MARQUIS DE CONDORCET, Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain, 1794, page 49.
Ø 11. Votre silence de Toul m'a fait abjurer la coquetterie Hé bien! Vos nouveaux torts envers moi me feront chercher à dompter les défauts qui vous ont déplu en moi.
GERMAINE NECKER, BARONNE DE STAËL, Lettres inédites à Louis de Narbonne, 1794, page 225.
Ø 12. Je romps, j'abjure à jamais tous les noeuds qui m'attachèrent à Lusignan : je vais proclamer ma haine aussi hautement que je proclamai jadis mon amitié,...
SOPHIE COTTIN, Mathilde, tome 5, 1805, page 344.
Ø 13. Combien de fois se repentir, pour retomber encore; vaincre, pour être ensuite vaincue; abjurer, pour reprendre; pour ressaisir avec une nouvelle ivresse!...
RODOLPHE TOEPFFER, Nouvelles genevoises, 1839, page 91.
Ø 14. Je ne crois pas en Dieu, j'abjure et je renie Toute pensée, et quant à la vieille ironie, L'amour, je voudrais bien qu'on ne m'en parlât plus.
PAUL VERLAINE, Poèmes saturniens, Melancholia, L'Angoisse, 1866, page 65.
Ø 15. Il me semblait alors que j'étais né pour une sorte inconnue de trouvailles; et je me passionnais étrangement dans ma recherche ténébreuse, pour laquelle je sais que le chercheur devait abjurer et repousser de lui culture, décence et morale.
ANDRÉ GIDE, L'Immoraliste, 1902, page 457.
Ø 16. Quand l'homme abandonne à son geste la mission que son esprit renie, il ne l'abjure pas, il la passe à son servant, comme il passe la vie à son corps dans le sommeil.
JEAN GIRAUDOUX, Sodome et Gomorrhe, 1943, II, 7, page 132.
STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 232. Fréquence relative littéraire : XIXe. siècle : (a 706, b) 252; XXe. siècle : a) 133, b) 165.
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