à l'exception peut-être de Washington, D.
Publié le 06/01/2014
Extrait du document


«
celles
delavie urbaine ; sije contemplais aujourd’huilemême site,jeconstaterais peut-êtrequel’hybride troupeau a
disparu : piétinéparune race plusvigoureuse etplus homogène degratte-ciel implantéssurces rives qu’une autostrade a
fossilisées d’asphalte.
À l’abri decette faune pierreuse, l’élitepauliste, pareilleàses orchidées favorites,formaituneflore nonchalante et
plus exotique qu’ellenecroyait.
Lesbotanistes enseignent quelesespèces tropicales comprennent desvariétés plus
nombreuses quecelles deszones tempérées bienquechacune soit,enrevanche, constituée parunnombre parfoistrès
petit d’individus.
Le gran
fino local
avait poussé àl’extrême cettespécialisation.
Une société restreinte s’étaitréparti lesrôles.
Toutes lesoccupations, lesgoûts, lescuriosités justiciables dela
civilisation contemporaine s’yrencontraient, maischacune figuréeparunseul représentant.
Nosamis n’étaient pas
vraiment despersonnes, maisplutôt desfonctions dontl’importance intrinsèque,moinsqueleur disponibilité, semblait
avoir déterminé laliste.
Ilyavait ainsilecatholique, lelibéral, lelégitimiste, lecommuniste ; ou,surunautre plan,le
gastronome, lebibliophile, l’amateurdechiens (oudechevaux) derace, depeinture ancienne, depeinture moderne ; et
aussi l’érudit local,lepoète surréaliste, lemusicologue, lepeintre.
Nulsouci véritable d’approfondir undomaine dela
connaissance n’étaitàl’origine deces vocations ; sideux individus, àla suite d’une fausse manœuvre oupar jalousie, se
trouvaient occuperlemême terrain oudes terrains distincts maistropproches, ilsn’avaient d’autresouciquedese
détruire l’unl’autre etymettaient unepersistance etune férocité remarquables.
Parcontre, entrefiefsvoisins onse
rendait desvisites intellectuelles, onsefaisait descourbettes : chacunétantintéressé, nonseulement àdéfendre son
emploi, maisencore àperfectionner cemenuet sociologique dansl’exécution duquellasociété pauliste semblait trouver
une inépuisable délectation.
Il faut bien reconnaître quecertains rôlesétaient tenusavecunbrio extraordinaire, dûàla combinaison delafortune
héritée, ducharme innéetde laroublardise acquise,quirendaient sidélicieuse etsidécevante enmême tempsla
fréquentation dessalons.
Maislanécessité, quiexigeait quetous lesrôles fussent occupés pourparfaire lemicrocosme et
jouer legrand jeudelacivilisation, entranaitaussiquelques paradoxes : quelecommuniste setrouvât êtreleriche
héritier delaféodalité locale,etqu’une société fortguindée permîttoutdemême àun deses membres, maisàun seul –
puisqu’il fallaitbienavoir lepoète d’avant-garde –de sortir sajeune maîtresse enpublic.
Quelques emploisn’avaient pu
être remplis quepardes pis-aller : lecriminologue étaitundentiste quiavait introduit àla police judiciaire lemoulage des
mâchoires aulieu desempreintes digitalescommesystème d’identification ; etlemonarchiste vivaitpourcollectionner
des spécimens devaisselle detoutes lesfamilles royalesdel’univers : lesmurs deson salon étaient couverts d’assiettes,
sauf laplace nécessaire àun coffre-fort oùilconservait leslettres parlesquelles lesdames d’honneur desreines
témoignaient leurintérêt poursessollicitations ménagères.
Cette spécialisation surleplan mondain allaitdepair avec unappétit encyclopédique.
LeBrésil cultivé dévorait les
manuels etles ouvrages devulgarisation.
Aulieu desetarguer duprestige encoreinégalé delaFrance àl’étranger, nos
ministres eussentétéplus sages des’attacher àle comprendre ; dèscette époque, hélas,iln’était plustant dûàla
richesse etàl’originalité d’unecréation scientifique faiblissantequ’autalent, dontbeaucoup denos savants étaient
encore doués,pourrendre accessibles desproblèmes difficilesàla solution desquels ilsavaient contribué modestement.
En cesens, l’amour portéparl’Amérique duSud àla France tenaitenpartie àune connivence secrètefondéesurlamême
inclination àconsommer, etàfaciliter auxautres laconsommation, plutôtqu’àproduire.
Lesgrands nomsqu’on vénérait
là-bas : Pasteur, Curie,Durkheim, appartenaient tousaupassé, sansdoute assezproche pourjustifier unlarge crédit ;
mais dececrédit, nousneservions plusl’intérêt qu’enunemenue monnaie appréciée danslamesure oùune clientèle
prodigue préféraitelle-même dépenseràinvestir.
Nousluiépargnions seulementlafatigue deréaliser.
Il est triste deconstater quemême cerôle decourtier intellectuel, versquoi laFrance selaissait glisser, semble
aujourd’hui luidevenir troplourd.
Sommes-nous àce point prisonniers d’uneperspective scientifiquehéritéeduXIXe
siècle, oùchaque domaine delapensée étaitsuffisamment restreintpourqu’un homme nantideces qualités
traditionnellement françaises :culturegénérale, vivacitéetclarté, espritlogique ettalent littéraire, parvntàl’embrasser
tout entier, et,travaillant isolément, réussîtàle repenser poursoncompte etàen offrir unesynthèse ? Qu’ons’en
réjouisse ouqu’on ledéplore, lascience moderne nepermet pluscette exploitation artisanale.Làoù ilsuffisait d’un
spécialiste pourillustrer sonpays, ilen faut unearmée, quinous manque ; lesbibliothèques personnellessontdevenues
des curiosités muséographiques, maisnosbibliothèques publiques,sanslocaux, sanscrédit, sanspersonnel
documentaliste etmême sanssièges ennombre suffisant pourleslecteurs, rebutent leschercheurs aulieu deles servir.
Enfin, lacréation scientifique représenteaujourd’hui uneentreprise collectiveetlargement anonymeàquoi nous
sommes aussimalpréparés quepossible, nousétant tropexclusivement occupésdeprolonger au-delàdeleur temps les
succès facilesdenos vieux virtuoses.
Ceux-cicontinueront-ils longtempsàcroire qu’unstyleàtoute épreuve peut
remédier àl’absence departition ?
Des pays plusjeunes ontcompris laleçon.
DansceBrésil quiavait connu quelques éclatantes réussitesindividuelles,
mais rares : Euclides daCunha, Oswaldo Cruz,Chagas, Villa-Lobos, laculture étaitrestée, jusqu’à uneépoque récente, un
jouet pourlesriches.
Etc’est parce quecette oligarchie avaitbesoin d’uneopinion publique d’inspiration civileetlaïque,
pour fairepièce àl’influence traditionnelle del’Église etde l’armée ainsiqu’au pouvoir personnel, qu’encréant.
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