24 La pensée du Grand Siècle Nous sommes encore au temps du grand Louis.
Publié le 06/01/2014
Extrait du document


«
plus
élégant quelalangue deBoileau ? Combiendefois, encore, enécrivant celivre, nes’est-on répétélefameux
adage deson Art
poétique ,
formule souveraine pourtenter decoucher surlepapier uneidée embrouillée dans
l’esprit : « Cequel’onconçoit biens’énonce clairement /Et les mots pourledire arrivent aisément… »
Les classiques furentcélèbres deleur vivant etencensés dèsleur mort.
« Cetemps neseretrouvera plus,oùun
duc deLaRochefoucauld, l’auteurdes Maximes ,
au sortir delaconversation d’unPascal etd’un Arnaud, allaitau
théâtre deCorneille », écritVoltaire émudans Le
Siècle deLouis XIV après
avoircitéRacine, Molière, Lully,
Bossuet, témoignant aupassage d’unemaladie décidément éternelle :lanostalgie d’unâged’or.
Voltaire regrette
le temps d’avant.
Combien sontceux qui,dèssamort, regretteront sontemps àlui ? « La
chose laplus précieuse, magloire » Nous
sommes néanmoins dansunlivre d’histoire, eton nesaurait oublier unedeslorgnettes quiestlanôtre : la
politique.
Voilàunpoint frappant oùl’on veut arriver, carilest trop rarement mentionné entant quetel.Tous
ceux quel’onvient deciter étaient desgénies, maisdesgénies quinetravaillèrent quedans unsens, quevers un
seul but,toujours lemême, lerenom dumonarque.
Nefaisons pasd’anachronisme.
Lefait pour unartiste dese
mettre auservice d’unmécène n’estpasnouveau etn’a rien detrès original : c’estleseul moyen degagner savie,
l’édition estmisérable etledroit d’auteur n’existepas.Parailleurs, nousnesommes pasenCorée duNord, ilne
s’agit pourpersonne d’avoiràânonner desvers depacotille devantundictateur gâteux,enayant dansledos le
revolver duchef delapolice politique.
Àl’époque, leroi est tout, nuln’imagine uneautre image del’autorité.
Chanter seslouanges paraîtaussinaturel quedelouer lapatrie en1914, oudesedire ledéfenseur obstinédes
libertés démocratiques aujourd’hui.Nenégligeons paslefait pour autant, ilnous offre unemise enperspective
intéressante.
DepuisVoltaire, dontnous parlions, oubien plustard Hugo ouZola, nous nous sommes faitàl’idée
qu’un penseur devaitforcément pensercontrelepouvoir.
Ilest bon desesouvenir quetous ceux quiprécédèrent
ont été, àson endroit, d’unedéférence jamaispriseendéfaut.
Il est vrai que lepouvoir ymettait lesmoyens.
L’historien AlainViala 1
nous explique lesystème depensions que
Colbert tintàélaborer dèsson arrivée auxcommandes, ens’appuyant surChapelain, unécrivain dutemps oublié
aujourd’hui maistrèscourtisé àl’époque : c’estluiqui tenait laliste detous ceux quiauraient lebonheur de
toucher del’argent (pasénormément d’ailleurs)pourmettre leurgrand talent auservice delahaute renommée
du prince.
Pasgrand monde nemanquera àl’appel ettous viendront semettre enligne chaque année,nous
raconte l’historien, àla distribution duprix : unepetite bourse encuir brodé remise enprésence mêmedu
souverain.
Il est vrai aussi quecelui-là, commanditaire suprême,n’ajamais cachéàquiconque lesujet quil’intéressait leplus.
Un autre spécialiste, FrançoisLebrun 2
, cite cette phrase deLouis XIV, prononcée sanslamoindre ironielorsdela
création del’« académie desInscriptions » –c’est-à-dire celleàqui revient lanoble tâched’établir lescompliments
sur luiàécrire aufronton desbâtiments publics :« Vouspouvez, messieurs, jugerdel’estime quejefais devous
puisque jevous confie lachose dumonde quim’est laplus précieuse, quiestma gloire. »
Personne n’oublielaleçon.
Danslesdédicaces deleurs pièces, leurspoèmes decommande, leursœuvres de
circonstance, lesplus méconnus commelesplus grands yvont deleur flatterie aumètre : « Touslesmots dela
langue, touteslessyllabes nousparaissent précieuses parcequenous lesregardons commeautantd’instruments
qui doivent serviràla gloire denotre illustre Protecteur. » Çane vaut paslesalexandrins d’ Athalie ,
et pourtant
c’est encore duRacine.
EtBoileau, sisarcastique danssessatires, voyezàquoi ildescend : « Muses,dictezsa
Gloire àtous vosnourrissons. »
Même danslesquerelles, onarrive encore àse concentrer surunseul sujet, leroi.
Laplus célèbre estcelle qui,àla
fin des années 1680,oppose ceuxquel’onappelle « lesAnciens » àceux quel’onnomme « lesModernes ».
Onse
souvient peut-être destenants delapolémique.
LesAnciens, avecBoileau, posentquetout cequi sefait debeau
ne peut l’être quedans l’imitation del’Antiquité, puisqu’elleacréé desmodèles esthétiques indépassables.
Les
Modernes, derrièreCharlesPerrault (l’auteur des Contes ),
tiennent quel’époque estbien assez grande pour
créer unart qui vaut celui d’Homère oudePindare, puisquesonprince égalelargement AugusteouPériclès.
Ona
oublié sansdoute cequi enfut l’origine : untexte écritparlemême Perrault pourchanter laguérison duroi, après
un épisode décidément fondamental ,
l’opération delafameuse fistule.
Parfois ledur métier decourtisan littéraireprenddestours comiques.
Ainsilesmésaventures denos Racine et
Boileau, lorsqu’ils furentnommés « historiographes duroi », c’est-à-dire chargésdetenir lachronique durègne.
Les deux sonthommes deplume, pasdutout d’épée.
Ilspensent pouvoirsecontenter d’honorer leurcharge
devant unencrier, bienauchaud sousleslambris d’unebibliothèque.
Hélas,leroi est d’un autre avis.Revenu
d’une campagne oùilne les apas vus, ill’exige désormais : ilsdoivent « êtretémoins deschoses qu’ilsauront à.
»
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