Willy Brandt par Joseph Rovan Professeur à l'Université de Paris-Vincennes Quand le futur Chancelier de la République Fédérale d'Allemagne naquit à Lübeck le 18 décembre 1913, il s'appelait Herbert Frahm.
Publié le 05/04/2015
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Willy Brandt par Joseph Rovan Professeur à l'Université de Paris-Vincennes Quand le futur Chancelier de la République Fédérale d'Allemagne naquit à Lübeck le 18 décembre 1913, il s'appelait Herbert Frahm. C'était un enfant conçu hors mariage, sa mère, Martha Frahm, fille d'ouvriers, gagnait sa vie comme vendeuse. Le jeune Herbert fut élevé par son grand-père, forte personnalité dont l'autorité morale eut beaucoup d'influence sur l'enfant. Venu en ville pour échapper à l'oppressante atmosphère féodale qui régnait encore à la campagne dans son Mecklemburg natal, il y avait adhéré au Parti social-démocrate. Dans le monde marginalisé, dans la " contre-société " des prolétaires, la social-démocratie, avec ses solides croyances marxistes, apportait une éthique et une espérance. On vivait mal, mais on vivait fièrement, on luttait, on se cultivait, on travaillait pour l'avenir. Le jeune Herbert, de plus, était doué d'une solide intelligence. Il obtint une bourse dans un des lycées les plus prestigieux de la vieille cité hanséatique. Il s'y plaça d'une façon constante parmi les premiers. Dès l'âge de seize ans, il adhéra aux jeunesses ouvrières socialistes. Tout en bénéficiant de la formation que la bourgeoisie réservait généralement à ses propres enfants, il voulait rester fidèle à son milieu et à sa classe. Les moyens familiaux ne suffisaient pas pour permettre au jeune Herbert Frahm de poursuivre ses études au-delà du baccalauréat. Il trouve un emploi dans les bureaux d'une compagnie de navigation, tout en collaborant au Volksbote (le " Messager du Peuple "), le journal social-démocrate local. Herbert écrivait avec beaucoup de facilité et de clarté. Le directeur du Volksbote, le Dr Julius Leber, député social-démocrate au Reichstag, fit admettre ce jeune collaborateur au Parti social-démocrate alors qu'il n'avait pas encore dix-sept ans. Cependant, la situation, dans la République de Weimar finissante, était devenue telle que les Sociaux-Démocrates, chaque fois qu'ils essayèrent de défendre avec une certaine vigueur les intérêts matériels et politiques des travailleurs, risquaient de faire éclater la fragile base sur laquelle reposait encore la République démocratique et parlementaire à laquelle leurs partenaires, les groupements libéraux et le Parti Catholique, n'étaient pas attachés d'une manière inconditionnelle et exclusive. Jeune et impatient, Frahm se révolta, abandonna la social-démocratie et adhéra à une petite formation d'extrême gauche, le SAP (parti ouvrier socialiste), qui s'était constitué en 1931 à la suite d'une scission. Dans ce petit groupe d'intellectuels et de jeunes ouvriers, Frahm se vit rapidement confier des missions importantes. Il venait d'avoir dix-neuf ans quand Hitler accéda au pouvoir. Il assista impuissant aux exaltations et aux crimes de la Révolution nationale et passa dans l'action clandestine. Herbert Frahm dut alors prendre un pseudonyme. Il choisit Willy Brandt et ce " nom de parti " devait peu à peu supplanter son nom de naissance. Trop connu à Lübeck comme antifasciste actif pour ne pas s'y faire repérer et arrêter dans les délais les plus brefs, il se résolut à partir dans la nuit du 1er au 2 avril 1933 ; un pêcheur le transporta dans l'île danoise de Lolland d'où il put rejoindre Oslo. Le jeune exilé trouva en Norvège un climat favorable. Il s'adapta et s'intégra facilement à la vie norvégienne et trouva au sein du Parti Ouvrier norvégien des amitiés et des soutiens solides. Il s'inscrit à l'Université et reprend ses activités de journaliste, en allemand et en norvégien. Pour le SAP, il participe à des réunions et conférences dans de nombreux pays européens ; en 1936, le Parti le fait même rentrer en Allemagne où il dirige pendant plusieurs mois, muni d'un faux passeport norvégien, l'organisation berlinoise. En 1937, il fit un long séjour en Espagne comme correspondant de presse pour ses amis norvégiens. L'expérience de la guerre civile le marqua profondément ; il y vit à l'oeuvre la brutalité policière de l'appareil stalinien, le dogmatisme utopiste des trotskistes, l'irrésolution verbeuse des Socialistes. Le spectacle des querelles et luttes intestines chez les Républicains espagnols autant que la fréquentation des Socialistes norv...
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