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Traité des sensations Etienne de Condillac La statue Elle a quelque idée du possible Comme elle est dans l'habitude d'être, de cesser d'être, et de redevenir la même odeur, elle jugera, lorsqu'elle ne l'est pas, qu'elle pourra l'être ; et lorsqu'elle l'est, qu'elle pourra ne l'être plus.

Publié le 05/04/2015

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Traité des sensations Etienne de Condillac La statue Elle a quelque idée du possible Comme elle est dans l'habitude d'être, de cesser d'être, et de redevenir la même odeur, elle jugera, lorsqu'elle ne l'est pas, qu'elle pourra l'être ; et lorsqu'elle l'est, qu'elle pourra ne l'être plus. Elle aura donc occasion de considérer ses manières d'être, comme pouvant exister ou ne pas exister. Mais cette notion du possible ne portera point avec elle la connaissance causes qui peuvent produire un effet : elle en supposera au contraire l'ignorance, et elle ne sera fondée que sur un jugement d'habitude. Lorsque la statue pense qu'elle peut, par exemple, cesser d'être odeur de rose, et redevenir odeur de violette, elle ignore qu'un être extérieur dispose uniquement de ses sensations. Pour qu'elle se trompe dans son jugement, il suffit que nous nous proposions de lui faire sentir continuellement la même odeur. Il est vrai que son imagination y peut quelquefois suppléer : mais ce n'est qu...
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« n'aura pas vraisemblablement assez de force pour lui rendre présentes deux sensations qu'elle a eues et qu'elle n'a plus. Mais ce qui me paraît plus probable, c'est que si l'habitude où elle est de juger, que ce qui lui est arrivé, peut lui arriver encore, renferme l'idée du possible ; il est bien difficile qu'elle ait occasion de former des jugements où nous puissions retrouver l'idée que nous avons de l'impossible.

Il faudrait pour cela qu'elle s'occupât de ce qu'elle n'a point encore éprouvé ; mais il est bien plus naturel, qu'elle soit tout entière à ce qu'elle éprouve. Elle a l'idée d'une durée passée Du discernement qui se fait en elle des odeurs, naît une idée de succession : car elle ne peut sentir qu'elle cesse d'être ce qu'elle était, sans se représenter dans ce changement une durée de deux instants. Comme elle n'embrasse d'une manière distincte que jusqu'à trois odeurs, elle ne démêlera aussi que trois instants dans sa durée.

Au-delà elle ne verra qu'une succession indéfinie. Si l'on suppose que la mémoire peut lui rappeler distinctement jusqu'à quatre, cinq, six manières d'être, elle distinguera en conséquence quatre, cinq, six instants dans sa durée. Chacun peut faire à ce sujet les hypothèses qu'il jugera à propos, et les substituer à celles que j'ai cru devoir préférer. D'une durée à venir Le passage d'une odeur à une autre ne donne à notre statue que l'idée du passé.

Pour en avoir une de l'avenir, il faut qu'elle ait eu à plusieurs reprises la même suite de sensations ; et qu'elle se soit fait une habitude de juger, qu'après une modification une autre doit suivre.. »

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