Sei-Shônagon 965- ?
Publié le 05/04/2015
Extrait du document
«
Le début du XI esiècle fut l'apogée de l'époque Fujiwara, celle de notre civilisation
médiévale aristocratique.
A cette époque, c'étaient surtout les dames de la cour qui
écrivaient des poèmes, des romans, des essais, des mémoires, des journaux intimes : le
siècle des femmes dans l'histoire de la littérature japonaise.
Les hommes avaient coutume
d'écrire en chinois, parce que la civilisation chinoise dominait alors tout l'Extrême-Orient,
et que le chinois y jouait le même rôle que le latin en Europe au moyen âge.
Sei-Shônagon et Murasaki-Shikibu furent les deux grandes femmes écrivains de cette
époque, et elles étaient des rivales dans la vie réelle comme dans le domaine des lettres.
La
cour de l'empereur Ichijô était dominée par deux maisons puissantes de la famille
Fujiwara, dont les chefs, Michitaka et Michinaga étaient frères.
Chacun d'eux avait donné
une fille comme épouse à l'empereur.
L'une, Sadako et l'autre Akiko.
Le harem se divisait
en deux parties.
Chacune des deux impératrices avait comme dame d'honneur une femme
cultivée : Sadako, Sei-Shônagon ; Akiko, Murasaki-Shikibu.
Sei-Shônagon naquit dans une famille de savants de culture chinoise, et, d'ailleurs, la
maison Michitaka, au service de laquelle elle se mettait, était également célèbre pour la
même raison.
Sei-Shônagon n'est qu'un nom de cour, et, aujourd'hui, on ne sait ni son vrai
nom, ni les dates de sa naissance et de sa mort, comme d'ailleurs pour la plupart des
femmes de son temps.
Elle est, tout d'abord, un moraliste, tandis que sa rivale, Murasaki-Shikibu, est une
romancière.
La vie de la cour et le monde des nobles, remplis de ruses, d'intrigues et
d'amours éveillèrent et développèrent en elle l'esprit critique, humoristique et satirique.
Elle notait des esquisses sur place, pleines d'esprit, dans le boudoir, dans la rue, dans le
temple et sur la rivière, en imitant probablement le Shan Tsa Tsuan , écrit par Li Shang- Yin,
homme de lettres de l'ère de T'ang de la Chine.
Les Notes de l'Oreiller sont un recueil des
fragments en désordre, d'impressions, de souvenirs, de spectacles, d'opinions sur le goût,
ou de simples énumérations de noms de montagnes, de collines, de lacs, de fleurs,
d'insectes, de temples, de danses, de femmes, de robes, de poésies, de tombeaux, etc.
Ses jugements comme moraliste ne sont parfois que ceux d'un courtisan et d'un noble : le
respect naïf envers sa maîtresse, l'impératrice, et le mépris naturel envers ses domestiques.
Malgré tout, ses observations sont toujours exactes et subtiles.
La finesse féminine est
incomparable chez elle.
“ Ce qui est émouvant : le moineau nourrissant ses petits ; passer
devant un bébé en train de jouer ; se coucher toute seule en brûlant de l'encens ; trouver
quelque tache sur la surface d'un miroir de Chine ; quand un beau garçon, arrêtant son
chariot devant ma porte, envoie son valet pour demander à me voir ; lorsque mes cheveux
lavés, la toilette faite, je mets une robe embaumée, et que je me sens agréable, même quand
nul ne me regarde ; la nuit où j'attends quelqu'un ; le bruit de la pluie et du vent qui me
fait frissonner...
”
Le génie du dessin est une faculté traditionnelle des Japonais.
On reconnaîtrait aussi le
même talent dans notre littérature.
L'image claire et délicate de dessinateur est un des
éléments essentiels de la beauté dans la prose japonaise.
Nos écrivains, encore aujourd'hui,
croient qu'une simple description de la scène quotidienne ou de la nature peut guérir l'âme.
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