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Saint Augustin par Paul Vignaux Directeur d'Études à l'École des Hautes Études, Paris C'est seulement en évoquant l'histoire personnelle de saint Augustin que l'on peut comprendre en quel sens son oeuvre s'insère dans l'histoire de la philosophie.

Publié le 05/04/2015

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Saint Augustin par Paul Vignaux Directeur d'Études à l'École des Hautes Études, Paris C'est seulement en évoquant l'histoire personnelle de saint Augustin que l'on peut comprendre en quel sens son oeuvre s'insère dans l'histoire de la philosophie. Né à Thagaste - aujourd'hui Souk Ahras - en 354, l'année qui précède l'invasion de la Gaule par les Francs, les Alamans et les Saxons, Aurelius Augustinus meurt en 430 évêque d'Hippone, assiégée par les Vandales : la prise de Rome par les Wisigoths d'Alaric marque l'âge mûr de ce Romain d'Afrique, théologien de la Cité de Dieu, à qui on pourrait demander " un art de vivre par temps de catastrophe ". Sa vie d'écolier et d'étudiant à Thagaste, à Madaure et à Carthage l'a doté à dix-neuf ans d'une culture " essentiellement littéraire et avant tout latine " quand la mort de son père l'oblige, avant ses vingt ans, à enseigner dans sa ville natale d'abord, à Carthage ensuite. Mais ce professeur de rhétorique vient de connaître, quand il avait dix-huit ans, une de ces conversions à la philosophie typiques de l'époque : déterminée pour lui par la lecture d'un dialogue aujourd'hui perdu de Cicéron, l'Hortensias, exhortation précisément à philosopher, cela ne consistant pas à spéculer pour la spéculation même, mais à chercher avec amour une sagesse qui soit vie heureuse, à un degré divin. Augustin vieillissant ne reniera pas cet enthousiasme de sa jeunesse, convaincu qu'il sera d'avoir été conduit à la sagesse chrétienne, pour lui finale, par cet appétit philosophique. Instruit du christianisme par sa mère Monique, il cherche d'abord de ce côté et se laisse, pour une douzaine d'années, séduire par le syncrétisme manichéen. Il s'en détache quand il part enseigner sur l'autre rive de la Méditerranée, à Rome, puis à Milan (384). Dans cette ville, il suit la prédication de l'évêque Ambroise, dont les sermons pénétrés d'influence plotinienne le libèrent de ses préjugés manichéens en l'éveillant au sens des réalités incorporelles : Dieu et l'âme. Dans ce milieu néo-platonicien, il a l'occasion de s'entretenir avec le plotinien Mallius Theodorus, qui lui communique la traduction latine des Ennéades par le rhéteur africain Marius Victorinus, mort chrétien vers 363. C'est un ami de ce dernier, le prêtre Simplicien, plus tard successeur d'Ambroise comme évoque de Milan, qui lui montre dans " les livres des philosophes ", " les livres des platoniciens ", le Verbe éternel du IVe Évangile, avant de lui faire saisir la double nature du Verbe incarné et de le conduire à la lecture de saint Paul : dépassement des philosophes incluant, en un sens, leur condamnation. Les paradoxes du platonisme chrétien, sa force d'unité et ses tensions internes, qui reparaîtront dans des siècles sous l'influence à venir d'Augustin, apparaissent dans ce milieu milanais où le rhéteur de Thagaste rêve, avec ses amis, d'une retraite philosophique qui deviendra celle de Cassiciacum, déjà inspirée d'un idéal monastique. Cette ...
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