Robert Maillart 1872-1940 L'ingénieur suisse Robert Maillart compte parmi les grands intuitifs qui sont les pères du béton armé.
Publié le 05/04/2015
Extrait du document
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Augmentation de la portée, réduction de la flèche, c'est-à-dire de la hauteur de l'ouvrage,
économie de matière, donc légèreté de l'ensemble et en particulier des culées, fondations plus
faciles — ces améliorations techniques ne se traduisent pas, sur le plan esthétique, par un
simple affinement, mais par une véritable libération de la forme, qui apparaît désormais
dégagée de toute réminiscence de la construction en pierre : constitué de deux corps en forme
de flèches qui, projetés sur le vide, se touchent à peine à la clé et sont ancrés sur les culées par
des articulations d'une incroyable finesse, le pont semble ne plus peser, mais tirer sur ces
ancrages ; il ne prend plus appui sur les rives, mais unit celles-ci d'un mouvement sobre et
vif ; “ phénomène structural ”, la forme qu'il inscrit dans le paysage s'y intègre avec la
spontanéité d'un “ phénomène naturel ”.
Vingt ans après Tavanasa, au pont du Val Tschiel, dans les Grisons (1925), Maillart crée un
nouveau type d'ouvrage reposant également sur l'emploi des surfaces comme éléments actifs
de la structure.
Dans ce système, dit des arcs raidis, l'arc est ramené à un voile d'une minceur
extrême et dont la liaison avec le tablier est assurée par des plans raidisseurs disposés
perpendiculairement à son axe.
C'est le tablier, dont la chaussée et les parapets forment une
sorte d'auge ouverte vers le haut, qui supporte les moments fléchissants.
La poutre-caisson de
Tavanasa a donc été profondément remaniée : les tympans raidisseurs ont pivoté de 90
degrés, la répartition des efforts entre arc et tablier a été inversée.
Pour l'établissement de
ponts en terrain très accidenté, ce système présente d'énormes avantages, tant du point de
vue économique et technique (il n'exige en particulier pour son exécution qu'un cintre très
léger), que du point de vue fonctionnel, le fonctionnel rejoignant ici l'esthétique.
En effet, le
système raidisseur : arc + tympans verticaux transverses, permet de donner à ces derniers une
forme trapézoïdale, c'est-à-dire de lier à un arc rectiligne en projection horizontale un tablier
incurvé.
Il est ainsi possible d'inscrire le pont dans n'importe quel profil de route, dans
n'importe quel site.
Au pont sur le Schwandbach (1933), voisin de celui du Rossgraben et sans
doute le plus achevé des arcs raidis construits par Maillart, le tablier épouse la courbe que
décrit la route pour se dégager d'un vallon encaissé : l'établissement d'un pont rectiligne
aurait posé ici d'insolubles problèmes de tracé.
Inintelligible à qui n'a pas été initié à sa
signification statique, le jeu des lames verticales recoupant les deux surfaces de l'arc et du
tablier, incurvées chacune dans une direction différente, exerce sur le spectateur une véritable
fascination.
A la passerelle sur la Töss, près de Winterthur (1934), Maillart a été encore plus
loin dans le développement des possibilités esthétiques de l'arc raidi.
N'ayant à tenir compte
que de surcharges minimes, il a ramené la construction à l'envolée infiniment gracieuse des
deux voiles incurvés de l'arc et du tablier qui se rapprochent jusqu'à se confondre à la clé,
tandis que, de part et d'autre, ils sont rendus solidaires par des plans vifs, accents verticaux
qui en font ressortir par contraste la souplesse.
Seuls Hennebique, au pont sur l'Ourthe à
Liège (âge), et Freyssinet, au Veurdre et à Boutiron (1907-1911), avaient auparavant atteint à
une finesse comparable.
Après S.
Giedion, qui a “ découvert ” Maillart, nombreux sont ceux qui se sont attachés à
dégager la signification plastique de ses constructions par surfaces et de leurs paradoxes
statiques.
Sans aucun doute, elles resteront comme l'un des témoignages les plus attachants,.
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