Montée et épanouissement de l'irréalisme par Jean Cassou Conservateur du Musée national d'Art moderne, Paris La période de 1950 à 1965 est traversée par un courant de naturisme qui anime la littérature, comme la peinture.
Publié le 05/04/2015
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Montée et épanouissement de l'irréalisme par Jean Cassou Conservateur du Musée national d'Art moderne, Paris La période de 1950 à 1965 est traversée par un courant de naturisme qui anime la littérature, comme la peinture. Un goût de l'ingénuité se manifeste, qui n'a pas toujours besoin de s'enfuir, comme Gauguin, aux îles primitives, pour se satisfaire, ni, comme Maurice Denis et Francis Jammes, de recourir aux naïvetés préraphaélites et à la pureté et à la suavité du sentiment religieux. Ce goût peut s'exercer devant le moindre spectacle de la rue, d'un quai ou d'un square, devant les familiarités de la vie moderne, devant la simple réalité populaire ou bourgeoise. Et devant cette réalité, l'ingénuité se double, si paradoxal que cela paraisse, de malice. D'où ce comique délicieux et incisif à la fois, cette gentillesse d'humeur qu'on trouve chez Vuillard, chez Bonnard, chez Vallotton, et qui évoque Jules Renard et les acuités de cette " Revue blanche " par quoi l'esprit Rive Gauche s'infiltre dans le Boulevard. Il y a là tout un réalisme piquant, critique, lucide et gracieux, un art qui se plaît au trait japonais et sait se rire doucement de lui-même, comme fait Vallotton dans sa confession de La Vie Meurtrière, tragédie ironique - jusqu'à la bouffonnerie - de l'échec, de la gaffe, de la pauvre catastrophe quotidienne. Toute cette époque des Nabis, avec son ironie, son intimisme léger, la vivacité synthétique de son style, son amour des jardins, des feuillages, des eaux, des salons où une dame coud sous la lampe, des salles à manger où des fruits colorent une table près du fouillis floral d'une fenêtre ouverte, toute cette époque est merveilleusement caractéristique de l'esprit français. Et si la noble inquiétude de Maurice Denis, l'aisance décorative de Roussel, le style parfaitement élégant de Vuillard, la puissante sécheresse de Vallotton, si tous ces arts prééminents illustrent cette riche époque, peut-être le nom qui la domine est-il celui de Bonnard, magicien de la couleur, demeuré jusqu'à la fin de sa vieillesse capable d'une égale fraîcheur de réaction devant les miracles de la végétation et de la lumière. En 1905 se produit une révolution qui s'ajoute à cette constante suite de changements qui fait notre tradition : la révolution du fauvisme. Une révolution violente et salubre, qui recrée la peinture avec ses éléments premiers : l'arabesque de la ligne vivant pour elle-même et par elle-même, la couleur pure telle qu'elle jaillit du tube. Et aussi peu de références que possible à ce que notre sensibilité peut nous c...
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