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Maximilien de Robespierre par François Furet Personne n'est moins digne de confiance que ses sectateurs, si ce n'est ses détracteurs.

Publié le 05/04/2015

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Maximilien de Robespierre par François Furet Personne n'est moins digne de confiance que ses sectateurs, si ce n'est ses détracteurs. Ils sont tous à chercher dans cette vie de quoi justifier leurs sentiments, à l'affût du moindre signe qui " annonce " l'homme qu'ils vénèrent ou qu'ils détestent. Pour que Robespierre soit le héros éponyme de la Révolution ou le cruel tyran de la Terreur, il faut qu'il ait été un enfant prodige ou un monstre naissant. Ce n'est qu'un enfant sage, un monstre de conformité. Un personnage de Simenon plutôt que de Michelet. Sa jeunesse est une anticipation de la France républicaine ; Robespierre est cet enfant pauvre sauvé par l'école et par l'étude. Il n'a plus de mère, un père intermittent, mais l'évêque d'Arras lui fait obtenir une bourse pour Louis-le-Grand, le meilleur collège de l'Ancien Régime, la pépinière de l'Establishment. Il y passera douze ans, de 1769 à 1781, de la cinquième à la licence en droit, entre onze et vingt-trois ans. Douze ans d'internat, anonymes comme les murs de la rue Saint Jacques et comme la régularité de son application : " Il rapportait tout à l'étude, écrit l'abbé Proyart, il négligeait tout pour l'étude. L'étude était son dieu. " De cette adolescence scolaire, nous n'avons guère autre chose que le récit tardif de cet abbé Proyart, alors sous-principal du collège. Ces souvenirs écrits juste après Thermidor sont destinés à montrer ce que cette enfance annonce des " crimes " de l'homme ; ils soupçonnent le pire dans l'apparence du zèle. Mais il est probable qu'ils touchent, dans un langage naïf, à une vérité profonde : cet enfant sans enfance est en effet tout zèle, tout application ; mais, en dedans, c'est l'humiliation, le secret, la méfiance, la promesse de s'en sortir. Ces débuts dans la vie s'oublient moins encore que les autres. Son professeur de rhétorique, qui le cajole, lui trouve " la physionomie romaine " : compliment suprême ! A cette époque, les élèves de l'enseignement secondaire apprenaient l'histoire dans les marges de Cicéron : ils l'ignoraient donc presque tout entière, mais connaissaient sur le bout du doigt la conjuration de Catilina, les campagnes de César, ou la fin de la République romaine. Avec le latin, ils apprenaient d'abord un type de discours, qui traverse pendant des siècles nos annales judiciaires et administratives, et qui va s'épanouir dans nos annales politiques avec la Révolution. Mais ils y puisaient aussi une morale que, par une étonnante revanche posthume, le paganisme romain fournit au catholicisme jésuite des Lumières : étrange produit que cette rencontre d'une culture encore familière et d'une religion déjà bourgeoise. Au XVIIIe siècle, les enfants et les adolescents de l'Europe cultivée meublent leurs imaginations avec Verrès et Cicéron, César et Brutus. Les meilleurs latinistes sont aussi les écoliers les plus vertueux : Robespierre a dû être l'un d'eux. L'excellence scolaire, dans son cas, est une identification exemplaire au modèle. Mais quand Brutus rentre dans sa famille, nanti du diplôme, le monde qui
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