Lucrèce par Pierre Guéguen Le grand Lucrèce, esprit sain, raison offensive, intelligence cosmique, n'en incarne pas moins ce monstre romantique moderne que l'on appelle un Poète Maudit, comme le fut Rimbaud, ou, dernier en date, Artaud.
Publié le 05/04/2015
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Lucrèce par Pierre Guéguen Le grand Lucrèce, esprit sain, raison offensive, intelligence cosmique, n'en incarne pas moins ce monstre romantique moderne que l'on appelle un Poète Maudit, comme le fut Rimbaud, ou, dernier en date, Artaud. Ses contemporains plus jeunes, auxquels son génie a servi : Virgile, Horace, ne l'ont pas nommé, ayant secrètement horreur de son impiété ; mais la malédiction qu'il porte est autrement grave que la méconnaissance et le silence, car il s'agit d'une fatalité intérieure qui l'aurait dévoré lui-même et poussé au suicide. En vérité, on en est réduit à des conjectures ; mais les conjectures, ici, agitent de lourdes draperies tragiques. Nous ne possédons qu'un texte biographique sur Lucrèce, composé plus de quatre cents ans après sa mort par un Père de l'Église, saint Jérôme. Après avoir bu un philtre d'amour qui lui fit perdre la raison, il écrivit quelques ouvrages dans les intervalles de sa folie, et se tua, de sa propre main, à quarante-quatre ans. Ovide évoque les sorcières expertes en bouillons d'herbes magiques, en liquides de cavales en chaleur. Et Horace dit de Canidie, sa maîtresse, qu'elle tirait des philtres du sang d'un petit enfant enterré vivant. Au cas où philtre il y eût, l'important serait de savoir si l'on fit boire le philtre au poète à son insu, ainsi qu'il advint pour Tristan et Iseut, ou s'il le but volontairement, s'il le commanda lui-même. Bref, l'intérêt est mieux qu'historique : psychique. On peut se demander si l'amour ne laissait pas à Lucrèce une impression d'incomplétude allant jusqu'à l'angoisse. Il était dès lors logique qu'en épicurien sévère il cherchât, par un philtre approprié, beaucoup moins à se donner une volupté qu'à éviter la souffrance, point essentiel de la doctrine. Bien que le De Natura n'ait rien qui ressemble à une confession ou à un journal intime, c'est pourtant lui qu'il faut interroger. On n'y a pas manqué. Dès qu'il s'agit d'un dérangement dans les rouages subtils de l'amour ou que l'horloge sonne la névrose, on trouve toujours, au XXe siècle, un psychanalyste de service. Un grand psychiatre et un lettré, le docteur Logre, a étudié l'Anxiété de Lucrèce dans un livre remarquable qu'on ne peut négliger, moins pour en adopter toutes les conclusions que pour voir les vers du poète latin prendre une physionomie nouvelle à la faveur des lumières sourdes, des feux de fouille étranges de la psychanalyse. Lucrèce est naturellement affligé du complexe oedipie...
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