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Lénine par Hélène Carrère d'Encausse Maître de Recherche à la Fondation Nationale des Sciences Politiques Le destin de Lénine, de son véritable nom Vladimir Ilitch Oulianov, son existence, se confondent avec la révolution, aussi loin qu'on les considère.

Publié le 05/04/2015

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Lénine par Hélène Carrère d'Encausse Maître de Recherche à la Fondation Nationale des Sciences Politiques Le destin de Lénine, de son véritable nom Vladimir Ilitch Oulianov, son existence, se confondent avec la révolution, aussi loin qu'on les considère. A cela il y a plusieurs raisons. Parce qu'au moment de sa naissance, en 1870, le mouvement révolutionnaire, qui a commencé à se manifester en Russie avec la tentative manquée de coup d'État de décembre 1825, s'accélère et passe du stade de la réflexion à celui des premières organisations. Parce qu'aussi progressivement, tandis que Vladimir Oulianov grandit, la Russie rurale commence à découvrir le capitalisme. A cause du milieu qui est le sien aussi. Fils d'un universitaire que son éducation et ses fonctions ont élevé à la noblesse héréditaire, le futur Lénine appartient à cette société d'intellectuels, l'intelligentsia où va se recruter le mouvement révolutionnaire. Et, en premier lieu, celui qui fut son premier modèle, son frère, Alexandre, pendu le 8 mars 1887 à vingt-deux ans pour avoir voulu répéter sur Alexandre III le meurtre d'Alexandre II. La tragédie familiale et l'évolution générale de son pays se sont combinées pour pousser très tôt le jeune Vladimir Oulianov sur la voie de la révolution. Si ce choix était plausible, inévitable presque, compte tenu du moment et des circonstances, rien n'annonçait en revanche que le jeune étudiant qui découvre alors sa vocation révolutionnaire deviendrait en peu d'années le fondateur d'un parti d'un type nouveau, entièrement orienté vers la conquête du pouvoir. Un travailleur acharné, passionné, servi par une remarquable intelligence et une très grande maîtrise de soi et de ses moyens, tel apparaîtra Lénine à tous ceux qui l'ont approché, de l'enfance à 1923. Dans son enfance heureuse à Simbirsk, où son père est responsable de l'enseignement, Vladimir Oulianov étonne ce dernier par son aptitude à combiner les exercices sportifs et les progrès intellectuels. Après une interruption d'études de près de trois ans où il découvre Marx, Vladimir Oulianov rattrape en quelques mois un programme de quatre ans et est reçu à ses examens de droit, premier sur cent trente-quatre candidats. Ce succès lui permet de s'inscrire au barreau de Pétersbourg. Mais déjà d'autres intérêts l'appellent. A peine arrivé dans la capitale, il a noué des liens avec les milieux révolutionnaires. Dès 1893, sa personnalité et ses idées l'imposent dans le petit cercle qu'il va animer et, très vite, il devient une personnalité marquante du marxisme pétersbourgeois ; " sur le terrain ", il lutte par tous les moyens, il organise l'éducation politique des ouvriers. En même temps il combat des idées qui lui paraissent dangereuses pour le mouvement révolutionnaire et tout d'abord celles des populistes qui croient que la paysannerie et ses institutions traditionnelles détiennent la clé de l'avenir russe. Oulianov n'est pas moins méfiant envers les marxistes-légaux dont le chef de file est Pierre Strouvé, qui, contrairement aux populistes, mettent l'accent sur le nécessaire essor du capitalisme, mais interprètent Marx en termes uniquement économiques. Pourtant, dès cette époque, Oulianov est réaliste avant tout. Il accepte une " alliance " momentanée avec les marxistes-légaux pour lutter contre les populistes. Son prestige est tel qu'il est mandaté en 1895, à Genève, pour y discuter du développement du mouvement ouvrier russe avec les fondateurs du marxisme russe, Plekhanov et Axelrod, avec qui il met sur pied la collaboration des marxistes de l'intérieur et de ceux qui sont exilés. Projet qui fait de Vladimir Oulianov le représentant officiel en Russie des prestigieux " pères du marxisme russe ". Mais Oulianov est arrêté, condamné à la déportation en Sibérie. Les mois passés en prison - décembre 1895 à février 1897 - sont fructueux. Entouré de livres, il écrit Le Développement du capitalisme en Russie. De même sera heureux l'exil sibérien. Oulianov y restera jusqu'au 29 janvier 1900, en compagnie d'une jeune révolutionnaire, Nadejda Kroupskaia, qu'il a épousée, et de sa mère. Son activité est inlassable. Il chasse, patine, joue aux échecs, donne des consultations juridiques aux paysans, traduit avec sa femme la Théorie et Pratique du Trade Unionisme des Webb, écrit son propre livre et lit énormément. La masse considérable des faits et des chiffres qu'il utilisera par la suite pour étayer ses travaux, ses discours, il l'accumulera alors. Surtout, il suit de près la situation du mouvement ouvrier russe. La création au Congrès de Minsk, en 1898, du PSDOR (Parti Social Démocrate Ouvrier Russe) est un tournant capital. Un parti ouvrier existe ainsi en Russie. Peu importe que tout son Comité central ait été arrêté. Oulianov, lorsqu'il est libéré en 1900, est prêt à assurer la relève. Et d'abord à créer l'indispensable outil de liaison : un journal. En août 1900, Vladimir Oulianov commence une nouvelle vie. Il s'installe à l'étranger, parce que là seulement, loin des surveillances policières, il peut publier un journal. Sans doute ce n'est pas simple en exil non plus. Venu d'abord à Genève se placer sous l'autorité de Plekhanov, il découvre tout à la fois les conflits qui ravagent l'émigration et son désaccord tactique avec

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