Le Roman italien par Aldo Rossi Florence Un des principaux facteurs qui contribuent
Publié le 05/04/2015
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Le Roman italien par Aldo Rossi Florence Un des principaux facteurs qui contribuent à différencier les lettres italiennes de celles des autres pays (même lorsqu'il s'agit de pays limitrophes, comme la France) est l'extrême décentralisation de l'Italie ; celle-ci, en effet, ne compte pas une, mais plusieurs capitales culturelles ; et la café-society - pourtant puissante - de Rome ou les grandes maisons d'édition de Milan fournissent un tableau à peu près complet de l'état actuel de la situation. Les lettres italiennes ont, en fait, suivi le sort commun de la culture européenne la plus évoluée ; mais, en dépit de tous les apports cosmopolites dont elles ont pu bénéficier ces temps derniers, elles continuent à trouver leur expression la plus authentique et la plus valable dans des modèles essentiellement régionaux. Aussitôt après la Libération se sont propagées, en Italie comme ailleurs, des théories sur l'engagement en littérature, et le " néo-réalisme ", qui suscitèrent de grands espoirs. Au cours des vingt années que dura le régime fasciste, on pensait mal et l'on écrivait fort bien (prose d'art), ou l'on s'exprimait dans un langage obscur (hermétisme), en ne se permettant que quelques rares allusions, d'ailleurs déguisées, à la réalité présente. Dans l'euphorie de la liberté reconquise, on s'attacha surtout au témoignage pris sur le vif, à la prise de conscience d'une série d'événements dramatiques qui portaient l'homme à douter de sa propre humanité, comme la guerre et la Résistance - reflets de circonstances exceptionnelles qui, dans le dénuement matériel général, bouleversaient les destinées les plus diverses que la mort, toujours présente, rendait éminemment précaires. Mais ce fut là un feu de paille : de la plupart des oeuvres romanesques, poétiques ou théâtrales qui firent prime durant ces dix Années, presque aucun souvenir ne subsiste aujourd'hui. Il manquait à ces productions littéraires le cachet d'un style définitif. La " mimesis " du réel tentée par un Ginseppe Berto (Il cielo è rosso), un Dante Arfelli (I superflui) ou un Sivio Micheli (Pane duro) était gauche, soutenue par une créativité de tout repos. Seuls parvinrent à émerger les auteurs qui, comme Cesare Pavese ou Rocco Scotellaro, le jeune poète prématurément disparu, avaient misé sur des thèmes plus complexes. En outre, les oeuvres les plus valables sur le plan narratif (qui étaient représentées non pas par des romans, mais par les films de Roberto Rossellini, de Vittorio de Sica, etc.) ont perdu, avec le temps et l'évolution des circonstances auxquelles elles étaient étroitement liées, une bonne part de leur mordant. Il va sans dire que ce phénomène s'est produit aussi bien à l'étranger - en France, par exemple - qu'en Italie, pour les raisons dont Sartre a donné une si pénétrante analyse dans la troisième partie de l'ouvrage intitulé Qu'est-ce que la littérature ? Ce qui, en revanche, demeure une prérogative de la situation des lettres italiennes est " l'aisance " avec laquelle se sont constituées des " écoles ", des " manières " circonscrites à une région - voire à une ville - et dotées de caractéristiques bien particulières, avec dés tendances de même type et un substratum culturel commun, sans parler des régionalismes d'ordre purement linguistique. On pourrait adopter, notamment en ce qui concerne les oeuvres narratives et les essais, un mode de classification strictement géographique. Considérons par exemple les écrivains piémontais : on s'apercevra bientôt que l'oeuvre d'un romancier connu, comme Cesare Pavese, ne prend toute sa signification et sa valeur que si on la replace dans le contexte dans lequel son auteur l'a élaborée. L'atmosphère des romans de Pavese est empreinte d'un stoïcisme austère, introspectif et farouche presque jusqu'à la misanttropie, que l'on retrouve - avec des accents et une qualité humaine différents - chez le maître de Pavese, Augusto Monti, chez son compagnon Giaime Pintor et chez ses deux disciples d'élection, Italo Calvino et Beppe Fenoglio. L'oeuvre de ces écrivains piémontais est marquée par un dépouillement voulu, une rigueur formelle, une pudeur dans l'expression qui exclut toute affectation, toute mièvrerie ; et même si Pavese, bien que s'articulant au terroir, aux célèbres Langhe (c'est-à-dire au monde des " lourdauds ", par opposition à celui des " droits "), demeure malgré lui tributaire de ses modèles paniques et néo- romantiques, un Calvino et un Fenoglio sont parvenus en revanche à acquérir vis-à-vis d...
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