Le déclin du romantisme par Denis Saurat Professor Emeritus de l'Université de Londres On peut fixer raisonnablement la fin de la mode romantique en France vers 1840.
Publié le 05/04/2015
Extrait du document
Le déclin du romantisme par Denis Saurat Professor Emeritus de l'Université de Londres On peut fixer raisonnablement la fin de la mode romantique en France vers 1840. C'est l'année de la publication des Rayons et les Ombres, qui contenait un des plus grands poèmes romantiques, la Tristesse d'Olympio. Mais, en 1843, c'est la chute des Burgraves et le triomphe de la Lucrèce de Ronsard. C'est la fin du romantisme au théâtre. Il est vrai que ce qui lui succéda était un classicisme bien plus faux encore que le romantisme déjà vieilli et artificiel. On a écrit que le 7 mars 1843 a été le Waterloo du romantisme puisque les Burgraves furent sifflés. Peut-être plus significatif encore est le long silence de Hugo entre 1843 et 1853. En 1853, il y aura les Châtiments et en 1856 les Contemplations. Mais dans les Châtiments comme dans les Contemplations il y a bien autre chose que du romantisme. Il y a cependant beaucoup de romantisme, et peut-être même que l'essentiel est romantique, mais ce n'est plus le romantisme qui allait tout emporter entre 1820 et 1830. De même chez les grands écrivains de la période, Gérard de Nerval, Baudelaire, Emily Brontë et sa soeur Charlotte, les Browning, entre 1840 et 1880, l'essentiel du romantisme existe toujours, mais parfois déguisé, et la forme est tout à fait changée. Pourquoi une mode littéraire finit-elle ? Il est très probable que la raison est à la fois très profonde et très superficielle. C'est que le public se fatigue à la fois de certains sujets et de certaines formes d'art, et veut à tout prix du nouveau, ce que Baudelaire a très simplement exprimé : Il me faut du nouveau, n'en fût-il plus au monde. Le public de 1840 a, en effet, assez du romantisme. Remarquons d'ailleurs que les vrais classiques en France, depuis le Cid en 1636, jusqu'à Phèdre en 1677, n'avaient duré que deux générations. En Europe, on peut considérer que le XVIIIe siècle est déjà tout miné par le préromantisme. Les Français, d'ailleurs, étaient en retard pour la mode romantique, car en Europe le romantisme commence avec Blake vers 1790 et n'existe plus guère après la mort de Byron. Goethe vieillissant n'est déjà plus romantique. Le romantisme français est une survivance, mais la réputation des Français devint telle qu'ils donnèrent le change encore pendant vingt ans. En fait, les Français n'ont pas vraiment été romantiques. Lamartine, le plus pur romantique de tous, peut-être le seul véritable romantique par le sentiment, est extrêmement classique dans sa forme et dans ses idées. Il est souvent une sorte de Boileau redevenu jeune, passionné et vivant. Victor Hugo, lui-même, n'est romantique que parce que c'est la mentalité à la mode. En son âme, il est épique, cynique et plutôt réaliste. Ses sentiments sont ...
« par Denis Saurat Professor Emeritus de l'Université de Londres. »
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- John Milton par Denis Saurat Professor Emeritus de l'Université de Londres Milton est, après Shakespeare, le plus grand poète de l'Angleterre ; il est, après Dante, le plus grand poète épique de la culture chrétienne.
- Le Préromantisme par Denis Saurat Université de Londres Le passage du classicisme au romantisme occupe tout un siècle, le XVIIIe.
- François Guizot par Douglas Johnson Professeur d'Histoire de France à l'Université de Londres François-Pierre-Guillaume Guizot est un des plus célèbres hommes d'État et peut-être le plus grand historien de la France au XIXe siècle.
- Expliquez et commentez ce portrait satirique, d'un jeune romantique : Jusqu'à ce jour, Daniel Jovard avait eu un front, mais à peu près comme M. Jourdain parlait en prose, sans s'en douter; il n'y avait pas fait la moindre attention. Ce front n'était ni très haut ni très bas, c'était tout naïvement un honnête homme de front qui ne pensait pas à autre chose. Daniel résolut de s'en faire un front incommensurable, un front de génie, à l'instar des grands hommes d'alors. Pour cela, il se r
- A la fin de l'âge romantique, le grand critique russe Biélinski a affirmé que l'idéal, la beauté, la poésie n'avaient aucune place dans l'oeuvre d'art : seul importait qu'elle fût un fidèle miroir de la réalité. Cinquante ans plus tard, Anatole France écrit : « L'artiste doit aimer la vie et nous la montrer belle. Sinon nous en douterions. » A l'aide d'exemples empruntés à vos lectures, vous direz si, à votre avis, l'artiste, et spécialement l'écrivain doit nous présenter une image idé