La littérature alchimique
Publié le 06/03/2022
Extrait du document
«
Dans son article sur la littérature alchimique, [Réf.
PP] Véronique Adam questionne
l'aspect marginal de son écriture, ainsi que des savoirs qui la permettent, ceci entre la moitié
du XVIe siècle et le début du XVIIe.
Selon Franck Greiner, entre 1583 et 1646, les points de
vue sur la datation et la qualification de littérature alchimique divergent un peu.
Attardons-nous un petit instant d'abord sur la PP marginalité politique PP car la quête de
la transmutation des métaux en or, conçue comme une chimère, constitue un reproche
récurrent à l’encontre de l’alchimie, qui se développera sur ce terrain miné.
Le point culminant étant, en PP 1666PP , l’interdiction de Colbert qui frappe l’Académie
des sciences, dont peut être banni tout savant pratiquant une chimie qui viserait à fabriquer
la pierre philosophale.
L'alchimie sera, par conséquent, exclue des champs symboliques des
pouvoirs, et politique et scientifique.
Elle accumule ensuite les condamnations de célèbres
savants, à l'instar de PP Lémery PP quelques années après et PP Bayle PP au début du
XVIIIe siècle, qui jugea ridicules cette quête et la revendication de sa réalisation.
Revenons-en maintenant à Adam, historienne de la littérature, qui pointe l'ambiguïté de
cette marginalisation car également interne : les procédés rhétoriques qui visent à susciter
l’antipathie du lecteur, désignés comme PP captatio malevolentiae PP par le grand écrivain
italien Umberto Eco, contribuent largement à ce phénomène.
Et même si elle n'est pas
souhaitée mais plutôt subie, (des points de vue politique, littéraire ou rhétorique) elle n'en
est pas moins revendiquée par les auteurs eux-mêmes.
La marginalisation active du texte
alchimiste conjugue trois formes : un discours volontairement obscur et différent, une
élection de quelques happy few savants et une exclusion assumée des ignorants.
Ainsi, au
lieu de bannir l’alchimie, on en exclut certains lecteurs.
Mais à quel moment de son histoire, la littérature a commencé à côtoyer l'alchimie ?
Alors ce qui frappe déjà, lorsqu’on examine un assez grand nombre de romans médiévaux,
c’est le contraste entre la fréquence de la magie, de l’astrologie et de la médecine, et la
quasi-absence de l’alchimie.
Cette absence s’explique très probablement par la situation de
l’alchimie dans la culture de l’Occident chrétien : l’alchimie y est en effet inconnue jusqu’à
ce qu’apparaissent, au milieu du XIIe siècle, les premières traductions latines de traités
d’alchimie arabe.
Il faut donc un certain délai avant que l’alchimie commence à être
assimilée en Occident et devienne pratique romanesque, du traité en histoire imaginaire
illustrée , par exemple.
Cependant, c'est bien par la littérature et la peinture que cette marginalisation a commencé à
opérer, notamment à travers la figure des puissants et de leur représentation de l'alchimie.
Car de nombreux hommes d'état en Europe s'intéressaient, par cupidité, à ses avancées et les
alchimistes qu'ils sollicitaient avaient plutôt intérêt à se cacher et même à dissimuler leur
savoir, leurs modèles et leurs livres...
pour ne pas subir le courroux jailli de l'échec du
fantasme de ces puissants, ce qui leur aurait valu une mise au cachot en bonne et due
forme ! C'est d'ailleurs ce qu'évoque l'œuvre de Tristan L'Hermite que vous présentera
Nathan dans quelques instants.
Mais attention, les alchimistes n'étaient pas tous des êtres innocents et purs : ils
nourrissaient une autre PP marginalité PP , parallèle, cette fois PP sociale PP , en
contribuant directement à véhiculer d'eux-mêmes une image d'usurpateurs violents et.
»
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