Johann Paul Friedrich Richter, dit Jean-Paul 1763-1825 " Ce fut en l'année
Publié le 05/04/2015
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«
Légende dorée , elles furent ravies de se voir enfin comprises.
Leur adulateur devint l'homme
couvert de femmes.
Ce dont il fut parfois bien embarrassé, car de les rêver le satisfaisait.
De leur cortège, Goethe et Schiller, fondateurs et illustrations du classicisme weimarien, lui
tinrent-ils rigueur ? Leur rencontre, malgré de mutuelles politesses, accrut la distance qui
déjà les séparait.
Goethe traitait Richter de “ génie hircocerf ” (“ ein tragelaphisches
Genius ”).
Mêlée d'estime et de dédain, la formule pourrait être appliquée d'une manière
toute laudative.
Le génie de Jean-Paul, c'est ce profond romantisme qu'il capte aux sources de la Création
et qu'il renvoie à celle-ci dans un élan d'amour inextinguible.
L'hircocerf, c'est ce qu'il y a
en lui de baroque, au meilleur et au pire sens.
Du baroque, en effet, il n'est pas coupé
comme le serait un écrivain français de la même époque.
L'Aufklärung n'est pas arrivée à
recouvrir partout l'âge précédent, et Gottsched n'est pas Boileau, ce n'est qu'un pion.
Flamboyant, le baroque trouve ainsi sa plus luxuriante manifestation dans la personne de
Richter.
L'agilité des images, la symphonie de la prose, c'est le cerf courant et bramant
dans les grands bois.
Mais appelant aussi le bouc pour d'inavouables accouplements et
pour d'horribles parturitions : une tératologie de fautes contre le goût — des fautes ? des
crimes plutôt, parce qu'elles sont inconscientes.
Fautes ou crimes qu'il a ensuite revendiqués dans un traité, Cours préliminaire d'esthétique
(1804), qui, bien qu'il ait été traduit en français, a été peu pratiqué de ce côté-ci du Rhin.
Il
devrait être pourtant le bréviaire des humoristes.
Mais, comme elle a dégradé le mot esprit
en lui faisant signifier le simple enjouement que réclame la bonne société, la langue
française a réduit l'humour au calembour et au paradoxe piquant.
Si Willy est humoriste,
Jean-Paul ne l'est pas.
L'humour de celui-ci est d'ordre tragique.
Avec un sourire empreint
d'affectueuse indulgence, il montre à l'homme le néant des choses qui, vues d'un
observatoire situé à l'Infini, apparaissent en effet d'une mesquinerie dérisoire et toutes
confondues dans la même médiocrité.
“ Pour lui, il n'y a pas de sottise individuelle, pas de
sots, mais seulement de la sottise et un monde sot.
Différent des saillies du plaisant
vulgaire, il ne met pas en évidence une folie individuelle.
Il rabaisse la grandeur et exalte
la petitesse, mais différent aussi de la parodie et de l'ironie, c'est en plaçant le grand à côté
du petit, en même temps que le petit à côté du grand, et en les anéantissant ainsi l'un
l'autre, car devant l'infini tout est égal et tout n'est rien.
” L'humour résulte de la
confrontation de l'Idéal avec le réel, de l'Infini avec le fini.
Dès lors, on comprend que les
péchés contre le goût commis par l'humour, surtout quand il se sent encore fils de
l'humeur, ne soient relevés que par une critique vétilleuse.
Le Français, né classique et sociable, est plus sensible que l'Allemand à la débauche
philologique de Jean-Paul, à son mépris de l'ordre et de la composition, à ses affronts
égotistes.
Qu'il n'oublie pas cependant les richesses de cette œ uvre gigantesque ! Ni la
prédiction de Ludwig Borne qui dans un somptueux éloge funèbre déclarait : “ Il attend
son peuple lent aux portes du vingtième siècle.
” Stefan George a répondu présent lorsque
s'ouvrit le siècle.
La France — malgré les efforts d'Albert Béguin, d'Edmond Jaloux, de Jean
Cassou — Jean-Paul l'attend encore un siècle et demi après sa mort.
Lui seul peut nous
révéler, en ces temps d'apocalypse, la poésie de l'anéantissement et du cosmos en révolte.
L'auteur du “ Discours prononcé par le Christ mort du haut de l'édifice des mondes pour.
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