Jean Atlan 1913-1960 Un peintre est unique quand son oeuvre, forme et contenu, nous apporte une vision picturale inhabituelle, en rupture avec tout ce qui, dans le domaine des arts, se relie, à des degrés divers, à un style, à une école, à une tradition.
Publié le 05/04/2015
Extrait du document
«
quelque chose d'essentiel : ce rythme barbare qui est en lui et qui plonge au plus épais de
ses profondes convictions spirituelles, où la philosophie positive se mêle aux croyances et
aux superstitions.
Atlan, peintre mystique ? Oui, mais un mystique charnel, chez qui la frénésie, la passion
tentent de conjurer puis de retentir sur la connaissance des mondes secrets qui nous
habitent et nous hantent.
L' œ uvre, rude, est à l'opposé de la séduction.
Le noir total du graphisme rayonne d'une
manière souveraine, conditionnant la toile, jusqu'à l'envoûtement.
Les signes se gravent
dans une matière batailleuse, qui ne fait qu'ajouter à l'intensité, à l'âpreté des formes.
Les
huiles, les pastels, les craies, leurs mélanges luttent avec des fonds de toile grossière dont
la texture entre résolument dans le jeu de la composition, en est un des éléments majeurs.
Les ocres, les bleus, les rouges, les jaunes sont comme des couleurs cuites à même la braise
et qui flamboient dans les ténèbres.
Pour nous accorder avec cette peinture qui parfois a l'air de se désunir en sarabande, il faut
se dire qu'avant toute autre préoccupation, le geste créateur de Jean Atlan est projection de
vie prodigieuse.
L'élan brise souvent les frontières de la toile, les recule bien au-delà.
Le
sentiment plastique habituel est dépassé.
L'image évoluera dans l'espace du mural.
Le
grandiose est son emblème avec ses réussites audacieuses et avec ses outrances, où les
gaucheries et les lourdeurs deviennent par la force naturelle des choses les marques même
d'un génie en proie.
Que nous ayons devant nos yeux les craies, les pastels, les détrempes
sur papier ou bien les vastes panneaux à l'huile, toutes les œ uvres sont à la même échelle
de grandeur humaine et monumentale.
Sa peinture ne serait certainement pas à l'aise à
côté des Renaissants italiens mais elle retrouverait sa pleine respiration si l'on pouvait
l'accrocher dans une salle où voisineraient les Nègres, les Précolombiens, les Assyriens, les
Égyptiens, les Romans : peinture amodée parce que de tous les temps, peinture hautement
solitaire, fragment durable de passion ardente.
Cet artiste, né à Constantine, juif à la manière africaine, mort à Paris en 1960, poète
visionnaire aussi bien dans sa peinture que dans ses écrits : Initiation des mortes ,Autres
Soleils et autres Signes (1941), nous aurait offert d'autres épanouissements dans son œ uvre
plastique.
Les années 1955-1959 virent sa maturité et son succès...
Il semblait se diriger vers
plus de chatoiement dans les couleurs, vers une matière plus “ civilisée ” où la
métamorphose des signes continuait à s'opérer dans une constante unité, variante infinie
d'une même modulation farouche.
Ce révolutionnaire total, ce flagellant des formes, n'a jamais procédé que par lentes
métamorphoses.
Il ne connaît pas les brusques ruptures spectaculaires ni les changements
subits et à l'opposé.
Il traque son œ uvre en rampant dans l'obscur, il bondit, il terrasse,
s'assure de sa prise et il repart en rampant, parfois fait retour, poursuivant la même quête
dans le même empire ténébreux de dieux et de démons mêlés, qu'il fouille inlassablement
au plus profond.
Jean Atlan participe en entier.
Il se moule étroitement aux divers mondes du végétal et de
l'animal et du minéral.
Ambiguïté, polyvalence des hiéroglyphes, où les éléments mâles.
»
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