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Jacques Audiberti 1899-1965 La poésie et le roman sont les deux chemins qui, plus ou moins conjugués, ont conduit Jacques Audiberti vers le théâtre.

Publié le 05/04/2015

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Jacques Audiberti 1899-1965 La poésie et le roman sont les deux chemins qui, plus ou moins conjugués, ont conduit Jacques Audiberti vers le théâtre. En eux résident les sources de sa richesse dramatique, parfois de son ambiguïté. Ces trois formes d'expression sont d'ailleurs traversées par un même courant d'énergie que ne modifie pas la particularité des genres littéraires et qui provient de la vitalité d'un langage où les mots sont comme fécondés par une réévaluation de leur plénitude. Significations, coloration, relief, double fond, mystère, absurdité d'un mot, apparaissent dans le langage d'Audiberti avec une égale force persuasive qui multiplie en les superposant les niveaux où chemine la pensée du lecteur ou du spectateur. Sans doute est-ce là l'effet d'une articulation de l'esprit essentiellement poétique. Et si l'on partage cette opinion que toute chose ne peut être réveillée de son inanimation mortelle que dans la mesure où la pensée s'en empare pour lui assigner une désignation, on comprend qu'Audiberti ait écrit (dans La Nouvelle Origine) que " la poésie est l'énergie du monde ", car nul autre langage que le langage poétique ne peut projeter les choses dans autant de directions. Mais il ne manque pas non plus de situer la poésie à l'écart de toutes les directions en disant qu'elle est " la différence entre l'absolu de l'inconnaissable et le mensonge de l'évidence ". On trouve, d'autre part, chez l'auteur d'Urujac et de La Nâ, un goût du réalisme en quoi se révèle une position ou plutôt un mouvement de la pensée opposé à celui de la pensée poétique, lequel dénote souvent une conduite de recu...

« montre soucieux de logique, mais avec une virtuosité de dialogue qui devait beaucoup contribuer à lui attirer, à partir de 1947, année de la création d'une de ses pièces les plus solides, Le Mal court (il avait alors quarante-huit ans), la faveur d'un public que ses poèmes et ses romans n'avaient guère suscitée. Dans l' œ uvre de tout écrivain, les thèmes les plus manifestes ne sont pas toujours ceux où réside son originalité véritable.

Il faut souvent la chercher dans une zone plus profonde, exprimée comme à son insu dans un courant souterrain de pensée et de hantise.

C'est là que se reflète obscurément sa plus secrète, parfois sa plus émouvante personnalité.

Un miroir est caché comme un piège dans les histoires inventées par les caprices de l'imagination : une autre histoire s'y déroule à l'image du rêveur inconscient que l'acte d'écrire n'empêche pas de rêver.

Dans le théâtre d'Audiberti, dominé par un esprit de liberté et de révolte, la raillerie à l'égard du pouvoir souverain (Le Mal court), de la loi (Quoat-Quoat), de la police (Le Ouallou), ou le goût du blasphème (La Hobereaute) ne doivent pas nous dissimuler la présence d'un tout autre ordre de préoccupations cristallisé autour d'un thème fondamental : l'angoisse de la solitude.

Nous la trouvons au revers du comique, comme au revers de la violence se cache une tendresse désenchantée. Il ne s'agit pas d'une angoisse métaphysique fondée sur l'irréductible séparation qui isole l'être de tout autre être en dépit d'une continuelle tentative de communication.

Un tel concept ne pourrait du moins s'insinuer dans l' œ uvre d'Audiberti que d'une façon sous-jacente et comme l'invisible motivation de toutes les situations dramatiques conduites vers ce même dénouement que leur apporte l'échec de l'amour.

Car, par-dessus tout, c'est l'homme privé de femmes qui s'impose comme le principal personnage d'une dramaturgie de la solitude.

On en découvre le prototype en Loup-Clair, héros d'un de ses plus curieux romans, Marie Dubois. Et si Loup-Clair semble passablement heureux avec son amour c'est que, lorsqu'il commença de s'éprendre de Marie Dubois, elle était déjà morte.

Il réapparaît sous les traits du docteur Félicien, dans La Fête noire, pièce d'une construction un peu hasardeuse mais d'une éblouissante écriture.

Pour l'homme esseulé, l'amour se transforme alors en passion vindicative et les désirs inassouvis en délire de férocité.

Le docteur Félicien égorge les femmes qui le dédaignent, tout comme Guy-Loup, dans Les Naturels du Bordelais, se voue à l'extermination des jeunes filles.

Quant aux petites filles, futurs objets de convoitise et de dépit, elles seront jetées en pâture au vieux baron Massacre, l'étrangleur de la Hobereaute. Ces quelques exemples montrent l'extrême pointe, et la plus acérée, d'un comportement consolateur et compensateur où l'homme se dédommage du tourment que lui infligent les femmes toujours inaccessibles en poussant jusqu'à ses ultimes conséquences le sadisme du principe de punition.

Mais en même temps, il ne peut se dérober à la fascination et à l'emprise qu'elles exercent sur lui.

La belle Hobereaute avec ses pouvoirs magiques nous est montrée dans “ sa splendide féminité juvénile ” comme “ une puissance de la nature… La forme charnelle de la vérité… Une fée… Une déesse ” et Alarica, la fière princesse du pauvre royaume de Courtelande, est, dans Le Mal court, “ la plus ravissante, la plus royale des créatures ” —la plus énergique et la plus effrayante aussi, revendiquant la puissance “ par l'assassinat si c'est nécessaire ”.. »

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