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Homère par Émile Mireaux Membre de l'Institut Toute l'Antiquité a vécu dans la familiarité des oeuvres homériques.

Publié le 05/04/2015

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Homère par Émile Mireaux Membre de l'Institut Toute l'Antiquité a vécu dans la familiarité des oeuvres homériques. Elle n'eût pas toléré de ne pas savoir exactement qui avait été Homère. Ce qu'elle ignorait, c'est-à-dire tout, ou peu s'en faut, elle l'a donc imaginé. Elle a d'ailleurs bien fait les choses : elle nous a légué sur Homère huit notices ou biographies. La plus connue fut écrite environ le second siècle ap. JC, et placée sous le nom d'Hérodote. Le faussaire a tissé sa trame romanesque en puisant peut-être à de vieilles légendes locales, mais surtout dans les récits homériques eux-mêmes, et notamment dans L'Odyssée. D'après lui, le poète serait né à Smyrne six cent vingt-deux ans exactement avant l'expédition de Xerxès (soit en 1102 av. JC). Après avoir exercé dans sa patrie d'origine la profession de maître d'école, il aurait longuement voyagé dans tout le monde grec à la suite du marchand Mentès jusqu'au moment où il serait tombé définitivement aveugle à Colophon. Cette infirmité, qui aurait décidé de sa vocation poétique, lui aurait valu le surnom d'Homère, qui signifierait aveugle, étymologie d'ailleurs fort suspecte. Sa destinée d'aède errant l'aurait conduit dans les cités de l'Eolide et finalement à Chios où il aurait composé L'Iliade et L'Odyssée. De ce récit romanesque, deux traits seulement sont sans doute à retenir. Le premier concerne l'île de Chios. Il existait à Chios, à l'époque historique, un clan, un genos des Homérides, lignée de chanteurs et de poètes où le nom d'Homère était vraisemblablement traditionnel. Ce clan devait remonter à une vieille famille de chantres et de récitants attachés à quelque temple et traditionnellement familière avec les lois du rythme poétique et les aventures des héros et des dieux. Le second trait concerne la cécité d'Homère. L'auteur de l'hymne homérique à Apollon Délien s'y met en scène lui-même : c'est un aveugle et il habite l'île rocheuse de Chios. Il est bien tentant d'autre part de voir un portrait dans l'aède de L'Odyssée, l'aveugle Démodocos. Quoi qu'il en soit, cet Homère légendaire a vécu pendant plus de deux millénaires dans l'imagination des hommes. Et puis il s'est évanoui. Il a fait place à la poésie homérique collective. Scaliger dès le XVIe siècle, après lui Perrault, l'abbé d'Aubignac, puis Vico avaient déjà mis en doute l'unité des compositions homériques. Un rude coup fut porté au système de l'unité, en 1795, par les Prolégomènes de Wolf. C'est à Wolf, en effet, qu'il faut faire remonter le système qui présente les épopées homériques comme des assemblages de morceaux primitivement distincts artistement combinés par des arrangeurs artificieux qui auraient tardivement composé les deux magnifiques mosaïques que seraient L'Iliade et L'Odyssée. Ce système a été porté à son point de perfection, si l'on peut dire, par les tenants de l'école analytique allemande. La matière de l'épopée aurait été fournie par un vaste répertoire anonyme de récits versifiés de caractère national et populaire où retentirait l'écho déformé et amplifié des luttes et des aventures qui avaient éveillé l'inspiration des premiers chanteurs. Quelques poètes plus ambitieux auraient d'abord fondu ces chants primitifs en de petites épopées plus complexes. Les derniers arra...

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