Hans Henny Jahnn 1894-1959 Lorsque Hans Henny Jahnn mourut, son oeuvre était encore presque entièrement inconnue du grand public.
Publié le 05/04/2015
Extrait du document
«
la purification par la peine et la souffrance, telle qu'elle est prônée par les religions établies,
ne peut rien arranger : “ Je me suis peu à peu convaincu qu'aucun choc, quelle qu'en soit la
forme spirituelle, n'est capable de changer la teneur de l'âme humaine.
L'homme ne corrige
pas ses instincts sadiques, il ne fait que prier un peu plus.
” Il est donc évident que, face à
la cruauté de l'existence, la foi en un ordre divin soit rejetée.
Jahnn ne voit la possibilité de
“ supporter l'horrible calvaire de la destinée individuelle ”, que dans l'offrande physique
totale de soi-même au monde et à ces reflets des événements que sont devenues la langue
et la musique.
Dans ce processus de trépas et de putréfaction, dans cette union de la vie et
de la mort, dans cette inéluctable destruction de toute vie qui réduit toute joie sitôt éclose à
néant, le mot est la seule chose qui puisse conférer à l'être humain une dimension dans le
temps.
C'est en 1919 que Jahnn publia sa première œ uvre dramatique : le Pasteur Ephraïm Magnus,
qui lui valut le prix Kleist.
Comme dans ses autres œ uvres, il y traite du problème de la
sexualité et des “ lois de la chair ” auxquelles nous sommes tous soumis.
Sa représentation
de l'amour fit scandale et les propos hérétiques sur la religion contenus dans la pièce
choquèrent tellement que l'on dut la retirer de l'affiche peu de temps après la première.
Dix ans plus tard, paraît son premier roman : Perudja. Jahnn a voulu ici écrire le roman d'
“ un homme d'une espèce nouvelle ”.
Le héros, un “ païen ” qui n'a pas encore été
contaminé par la morale contre nature du christianisme, s'abandonne à la violence
primitive de l'amour, à ses désirs et à ses instincts.
Financièrement indépendant grâce à la
protection d'un étranger, il rêve de la fondation d'un royaume de l'amour idéal, dans un
monde meilleur libéré des maux de la civilisation.
Cette œ uvre réformatrice, grâce à
laquelle toute souffrance doit être assistée, constitue le but suprême de sa vie.
Le roman
s'achève en une pacifique utopie, Perudja devient le maître de la terre et réussit à imposer
un ordre universel nouveau et, par là, une paix éternelle.
L’ œ uvre principale de Jahnn est constituée par le roman inachevé Fluss ohne Ufer : il s'agit
d'une trilogie dont seuls sont parus Das Holzschiff (1949 )et Die Niederschrift des Gustav
Anias Horn (1949-1950 ). Au cours d'un voyage, un meurtre est commis à bord du trois-mâts
“ Lais ” qui transporte une mystérieuse cargaison.
Ellena, la fiancée de Gustav Anias Horn
et seule femme à bord, est assassinée par le matelot de pont Alfred Tutein en proie à une
crise d'aliénation mentale.
Le jeune homme ne peut expliquer son geste, il a obéi à un
instinct caché au sujet duquel il ne peut donner aucun éclaircissement.
Alors que l'on
recherche le cadavre, une mutinerie éclate à bord et le bateau coule.
Les naufragés sont
sauvés et Anias Horn conclut un pacte de sang avec le meurtrier de sa fiancée qui lui a
avoué son forfait ; tous deux disparaissent, errent de continent en continent puis
s'établissent jusqu'à la mort du meurtrier dans une petite île finlandaise, où Anias Horn
compose de la musique et Tutein est marchand de chevaux.
À l'âge de quarante-neuf ans,
Horn relate ces événements ; il les décrit, les analyse, les pèse et les comprend.
Avec ce
roman, dans lequel l'auteur s'est efforcé de jeter les bases d'une nouvelle éthique, où il a
étudié avec angoisse les problèmes de la destinée et de la culpabilité et où il a été jusqu'au
fond des choses et du moi énigmatique, Jahnn a créé un chef-d' œ uvre de représentation de
la souffrance et de l'infamie mais aussi de la grandeur humaine..
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