Elio Vittorini 1908-1966 Né à Syracuse, d'un cheminot sicilien, Elio Vittorini représente dans la littérature italienne contemporaine la grande protestation des hommes du Sud, tenus jusqu'alors dans une sorte d'esclavage à base d'ignorance, d'injustice et de misère.
Publié le 05/04/2015
Extrait du document
«
“ humains ”.
L'“ humanité ” de ces personnages consiste dans une sorte de respect sacré
des objets de première nécessité, et voilà qui est juste et conforme à la vérité profonde de la
vie.
La grande fugue sur le mot “ homme ” éclate dans Conversation en Sicile, faite des voix
alternées de “ l'homme Ézéchiel ”, et de “ l'homme Porphyre ”, et de l'aiguiseur de
couteaux, et du gnome Colombo, le cabaretier, et enfin de l'auteur lui-même, revenu pour
quelques jours dans son pays natal.
Ils boivent sous la voûte sombre du gnome Colombo,
là où “ il n'y avait que le vin nu à travers les siècles, et des hommes à nu dans tout le passé
du vin ” ; ils boivent, immergés nus “ dans la matrice de nudité du vin ”.
“ Mais moi, dit
l'auteur, je ne pouvais pas le boire ce vin ; à cause de tout le passé humain en moi, je
sentais que ce n'était pas une chose exprimée de l'été et de la terre, mais une triste, triste
chose fantôme exprimée des cavernes des siècles.
Et quoi d'autre pouvait-il y avoir dans
un monde toujours offensé ? Des générations et des générations avaient bu, avaient versé
leur douleur dans le vin, cherché dans le vin la nudité, et une génération buvait dans
l'autre, dans la nudité de morne vin des générations passées, dans toute la douleur
versée.
”
Toute cette admirable Conversation en Sicile est traversée de symboles qui annoncent la
résurrection prochaine de la pureté originelle.
Dès le début, le narrateur, debout sur le
pont du bateau qui le conduit en Sicile, se grise du fromage qu'il mange à l'air cru, et d'en
sentir, dans la bouche, “ entre le pain et l'air fort, la saveur blanche et pourtant âpre, et
antique, avec les grains de poivre comme de soudains grains de feu sur la langue ”.
L'image du feu réapparaît, hispanisme rouge et ardent (le début de Conversation a été écrit
sous le coup des premiers massacres de la guerre d'Espagne), quand la mère du narrateur,
humble paysanne de Sicile, enveloppée d'un châle rouge, prend conscience de la mort d'un
de ses fils soldats, et se dresse “ le visage rouge, feu et flamme avec la couverture sur les
épaules ”.
A côté de la couleur, il y a les sons, non moins aigus et brûlants, “ cette plainte interne,
comme un sifflet ”, qui a poussé l'écrivain à entreprendre son voyage en Sicile, ou cette
musique de cornemuse, leitmotiv du voyage.
Puis voici les symboles de l'aiguiseur, qui
cherche partout épées ou canons à affûter, dents ou ongles, “ ciseaux, poinçons, couteaux,
piques et arquebuses, mortiers, faux et marteaux ; canons, canons, dynamite ” à rendre
aigus et régénérateurs du monde ; et enfin le symbole des symboles, trouvaille de
“ l'homme Porphyre ”, l'eau vive, qui seule peut “ laver les offenses du monde et
désaltérer le genre humain offensé ”.
Le feu, le sifflet, les lames de couteaux et d'épées, l'eau vive : tout ce qui brûle, point, mord,
tout ce qui met à découvert la nudité élémentaire de l'homme, l'absolu de l'homme, la
seule part qui compte en lui, la seule part dont une culture moderne ait à rendre compte, la
part vraie et pauvre, longtemps masquée par les superstructures psychologiques de la
culture bourgeoise, et qui a été remise à jour, par une correspondance symbolique, dans un
pays justement lui-même pauvre et tendu, de par sa pauvreté, dans une exigence de vérité
immédiate et essentielle..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- La littérature italienne contemporaine par Alan Chatham de Bolivar La littérature italienne est une mosaïque de talents contemporains de Trieste à la Sicile avec des auteurs dont la vogue ne se dément pas, des patriarches au plus jeunes.
- Baïkonour (cosmodrome de), la plus grande base de lancement d'engins spatiaux au monde, située à 400 km au sud-ouest de la ville de Baïkonour, dans la République du Kazakhstan.
- Vittorini, Elio - littérature.
- Expliquer ce passage de Lamartine en rappliquant soit à son œuvre, soit à toute la littérature de son époque (avertissement de Jocelyn, 1836) : « Il y a, quoi qu'on dise, une grande impuissance ou un grand égoïsme dans cet isolement contemplatif que l'on conseille aux hommes de pensée dans les temps de labeur ou de luttes. La pensée et l'action peuvent seules se compléter l'une l'autre. C'est là l'homme. »
- Divertissement: Les hommes n'ayant pu guérir la mort, la misère, l'ignorance, ils se sont avisés, pour se rendre heureux, de n'y point penser. [ Pensées (1670), 168 ] Pascal, Blaise. Commentez cette citation.