Boniface VIII par Jean Favier Professeur à la Faculté des Lettres et
Publié le 05/04/2015
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Boniface VIII par Jean Favier Professeur à la Faculté des Lettres et Sciences humaines, Rouen Benedetto Caetani naquit vers 1232 dans la petite ville d'Anagni, d'une famille de moyenne noblesse ; sa mère était, croit-on, soeur du pape Alexandre IV, cependant qu'un autre oncle de Benedetto était évêque de Todi. C'est donc comme chanoine de Todi que le futur Boniface VIII apparaît dans l'histoire alors que, âgé d'une vingtaine d'années, il étudiait le droit dans cette ville d'Ombrie auprès du maître Bartole. Nous le suivons ensuite lorsqu'il va compléter sa formation juridique à Spolète, puis à Bologne, où il reçoit l'enseignement des plus grands canonistes du temps. Quelques années plus tard, il s'établit comme avocat dans le voisinage de la cour pontificale. Sa carrière sera, là, fort brève. Le futur pape Martin IV, le cardinal Simon de Brie, lui ouvre en effet l'accès de la diplomatie pontificale : en 1264, il emmène Benedetto Caetani à Paris, où une légation va négocier l'établissement de Charles d'Anjou, frère de saint Louis, dans le royaume de Naples. L'année suivante, le cardinal Fieschi emmène à son tour Caetani en Angleterre et en Écosse. Quelque temps plus tard, l'avocat diplomate est nommé notaire du pape, ce qui est une assez haute fonction, et diverses missions lui sont confiées. En 1281, sa compétence et ses services sont récompensés : il est fait cardinal. Médiateur entre Charles d'Anjou et Pierre d'Aragon dans les affaires napolitaines, puis entre le roi Denis de Portugal et le clergé de son royaume, Caetani prend une part sans cesse croissante à la politique pontificale. En mars 1290, Nicolas IV l'envoie auprès de Philippe le Bel pour inciter ce roi à faire sa paix avec l'Aragon. La concorde entre les princes chrétiens apparaît déjà au futur pape comme le seul moyen de réaliser la Croisade, cette Croisade qu'il ne manque pas de prêcher au cours de son séjour à Paris. Mais Caetani profite de cette mission pour se mêler des affaires proprement françaises. Il arbitre le conflit qui opposait le clergé aux officiers et aux juges royaux dont les empiétements se multipliaient au préjudice de l'Église. Non sans brutalité, il brise l'espoir qu'avaient les évêques et curés français de voir révoquer le privilège accordé par la papauté aux Franciscains et aux Dominicains dont les prédications et les confessions causaient au clergé paroissial un très réel dommage matériel. Bien plus, le légat exalte les mérites des Frères, " le seul membre sain que l'on puisse trouver dans l'Église ". Quant aux prétentions des maîtres séculiers de l'Université, qui se permettaient de discuter les ordres pontificaux, le légat les taxe de présomption, de hardiesse criminelle, voire de frivolité. Il accable même les maîtres de son mépris : " Ces gens se figurent que nous les regardons comme des savants ! Nous les tenons bien plutôt pour des fous. Ils ont rempli le monde du poison de leur pédantisme... " Les docteurs et le haut clergé français n'oublieront pas. Lorsque, le 5 juillet 1294, les cardinaux, las d'un conclave qui se prolongeait en vain depuis deux ans, au grand scandale de la Chrétienté, firent de Pietro da Morrone le pape Célestin V, la cour de Rome se mit à vivre une étrange histoire. Devenu pape, l'ermite des Abruzzes ne sut résister ni aux sollicitations de l'ordre qu'il avait fondé - les " Célestins ", dira-t-on bien vite - ni à celles du parti angevin dont les tenants étaient à la cour pontificale les cardinaux Colonna. Ce religieux humble et pieux, qui avait longtemps hésité avant d'accepter le souverain pontificat, manquait totalement de sens politique. Malgré sa bonne volonté, il multiplia les maladresses. On se servit de lui pour des manoeuvres dont la complexité dépassait son entendement. On fit de lui le soutien de Charles d'Anjou, c'est-à-dire d'un prince dont les ambitions italiennes étaient immenses. L'indépendance pontific...
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