EXPLICATION LINEAIRE N° 20 « L’HUITRE » - FRANCIS PONGE, LE PARTI PRIS DES CHOSES
Publié le 15/11/2024
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EXPLICATION LINEAIRE N° 20 « L’HUITRE » - FRANCIS PONGE, LE PARTI
PRIS DES CHOSES
Introduction
:
Francis Ponge poète contemporain du XX siècle auteur qu'on peut rapprocher du mouvement surréaliste,
publie en 1942 ,un recueil intitulé le parti pris des choses rassemblant 32 petits poèmes en prose consacrés
aux choses les plus ordinaires , les plus banales ,décrivant des éléments de la vie quotidienne.
Il s'agit des
choses au sens large , c'est à dire d'animaux (crevettes, papillons), des minéraux (le galet) des objets (le
cageot, la bougie) des comestibles (le pain, l'orange).
Il tente ainsi d'offrir une autre vision des choses en
leur conférant une fonction et une beauté nouvelles.
Il refuse le lyrisme, et l'utilisation d'un langage
artificiel.
La poésie doit venir de l'objet décrit.
Regarder et dire le monde en poésie, à travers l’étude d’un
poème, « L’huître », pose un regard neuf porté sur les choses banales dès lors qu’on les observe
attentivement , qu’on les nomme autrement et nous interroger sur la façon dont un objet du quotidien
peut-il se transfigurer grâce au travail d’un artiste sur le langage et devenir un sujet poétique.
La description mime l’objet lui-même (on parle alors de mimesis) en un mouvement décroissant allant du
plus grand (l’extérieur) au plus petit (la perle).
Précisément, « L’huître », ce « monde opiniâtrement clos »
que le poète s’efforce d’ouvrir, fait l’objet d’une ouverture au jour de la parole.
Or il s’agit de refaire ce
« monde », de le recréer poétiquement (la poésie, en grec, c’est la création), ce qui ne l’est pas, on le
verra, sans risque.
Problématique
On se demandera donc en quoi ce poème permet une réflexion sur le langage ? / Comment la poésie
transcende le réel ? / Comment ce poème montre la mimésis de l’objet et de la création poétique ?
Mouvements du texte
Le poème « L’huître » peut se découper en trois mouvements correspondant aux trois paragraphes qui
épousent la forme de l’objet même.
-
Le premier paragraphe, le plus long, décrit l’objet dans son apparence extérieure : l’objet
-
Le second, plus court, en révèle l’intérieur : tout un monde
-
Le dernier, constitué d’une seule phrase, évoque la perle que le mollusque sécrète : la perle
PREMIER MOUVEMENT : L’OBJET
L'huître, de la grosseur d'un galet moyen, est d'une apparence plus rugueuse, d'une couleur moins unie,
brillamment blanchâtre.
Ce premier paragraphe entreprend de décrire l’objet dans sa forme extérieure, tel qu’il apparait
quand on le voit.
La formulation emprunte sa simplicité aux dictionnaires et l’usage du présent de
l'indicatif relève de ce type d’ouvrage > Forme, taille et couleur sont donc les premiers éléments
évoqués dans ce qu’on pourrait encore hésiter à qualifier de poème.
Toutefois les mots et groupes de mots qui suivent le verbe « être » suggèrent un tâtonnement
linguistique s'efforçant d’appréhender l’objet.
En effet, on trouve un parallélisme « d’une
apparence plus rugueuse » / « d’une couleur moins unie » (préposition + article + nom + adverbe +
adjectif).
Au sein de cette figure s’en trouve une autre : l’antithèse (« plus » vs « moins »).
Différence et
similitude invitent à la définition et à son ajustement.
Mais surtout la fin de la phrase
(« brillamment blanchâtre ») offre une juxtaposition qu’il convient d’interroger.
L’adverbe est
connoté positivement, alors qu’au contraire l’adjectif avec son suffixe « -âtre » est péjoratif.
C'est un monde opiniâtrement clos.
L’assonance en « a » suggère même l’exclamation admirative et justifie qu’on s'intéresse d’un peu
plus près à cet objet dont même l’orthographe est intéressante.
En effet, Ponge joue sur
l’orthographe des mots : « huître » tout d'abord puis « blanchâtre » et « opiniâtrement » (et plus
loin « verdâtre »).
La présence de l’accent circonflexe sur la voyelle appelle ces mots.
On le voit à
nouveau, la forme et le fond coïncident.
Pourtant on peut l'ouvrir : il faut alors la tenir au creux d'un torchon, se servir d'un couteau
ébréché et peu franc, s'y reprendre à plusieurs fois.
Les doigts curieux s'y coupent, s'y cassent les
ongles : c'est un travail grossier.
Les coups qu'on lui porte marquent son enveloppe de ronds
blancs, d'une sorte de halos.
À cette brève description succède tout un passage que l’adverbe « pourtant » indique et qui a pour
objectif d’ouvrir l'huître afin de découvrir littéralement « un monde ».
À cet effet, de nombreux efforts sont à fournir.
Nous avons affaire à la phrase la plus longue du
passage qui énumère une série d'infinitifs (« tenir », « se servir », « s’y reprendre »).
La chose ne va
donc pas de soi.
On retrouvera une autre énumération dans la phrase suivante (« s’y coupent », « s’y cassent ») à
laquelle s’ajoute une allitération du son [k] indiquant la difficulté de l’entreprise.
Cette allitération
précède et poursuit cette brève énumération : « curieux », « coups qu’on lui porte », « marquent ».
Il est intéressant de noter que le poète semble absent de son poème (nul présence d’un « je »).
On
trouve cependant des pronoms indéfinis « on » (« on peut l’ouvrir », « les coups qu’on lui porte »)
qui conviennent au caractère impersonnel du style employé dans les dictionnaires, modes d’emploi
et autres encyclopédies (à rapprocher des présentatifs comme « c’est » ou des tournures
impersonnelles comme « il faut »), mais qui peut tout autant impliquer le lecteur.
Quoi qu’il en soit, la scène de l’ouverture semble bel et bien vivante.
Les adjectifs « franc » et
« curieux » personnifient tour à tour le couteau et les doigts.
L'huître même semble vivre et semble
dotée d’un caractère opiniâtre (le mot signifie étymologiquement « attaché à ses opinions ».
Dans
son acception récente, le terme signifie « entêté », « tenace »).
Dès lors, la description cède le pas à
une scène de combat (ce que laisse entendre le mot « coups » dans la dernière phrase du passage).
Pourtant, il s’agit surtout d’un « travail », à la fois littéralement....
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