Vicina sunt vitia virtutibus
Publié le 03/03/2022
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«
J/icina sunt vitia virtutibus
Les vices ressemblent aux vertus
Cette sentence, sous cette fo111111lation, est empruntée à saint Jérôme
(Altercatio Luciferiani et Ortodoxi, 15, 188 : cf.
aussi Dialogus adver.\' ,,.,, Pelagianos, 3, 11, 794 ), mais elle apparait déjà, avec quelques
variations mais toujours les mêmes allitérations, dans plusieurs passages de I'Jnstitutio Oratorio de Quintilien ( 1, 5, S ; 2, 12, 4 ; 3, 7, 25 ;
8.
3, 7 ; 10, 2, 16) et elle revient encore chez de nombreux autres
auteurs, classiques ou médiévaux (cf.
par exemple, Grégoire le Grand,
Homiliae in Evangelia, 32, 3 [PL 76, 1234c] ; Yves de Chartres,
Ep., 245 [Pl 162, 252a]; cf.
aussi Otto 1920; Weyman 66; 81 ~ 294;
Sonny 120; Sutphen 228 et Walther 33288b).
D'autres variantes
rompent le rythme allitératif, telle la fo1111\lle de Sénèque : Sunt
enim ...
virtutibus vitia confinia, cc il existe des vices qui confinent aux
vertus>> (Ep., 120, 8); certains auteurs l'illustrent par des exemples
significatifs (cf.
Tite-Live, 22, 12, 12 : les calomniateurs de Quintus
Fabius Maximus font passer sa prudence pour de la lâcheté: adfingens
\·icina virtutibus vitia,.
>), ou fournissent quelques variations amusantes (cf.
l'Ars amatoria d'Ovide [2, 662], qui conseille de dissimuler chaque défaut sous la
vertu qui lui ressemble le plus, vitium proximitate boni) ; et une autre
variante, enfin, souligne que certains vices imitent la vertu (cf.
Cicéron,
Partitiones Oratoriae, 23, 81 ).
En réalité, comme nous l'apprenait
Quintilien (3, 7.
25), cette sentence était une transposition de la
réflexion aristotélicienne sur la ressemblance des contraires
(cf.
Rhétorique, 1367a 32-b 3).
Dans la littérature grecque, ce motif
apparaît fréquemment chez les philosophes, surtout ceux de l'école
aristotélicienne et notamment dans les commentaires à l'Ethique de
Nicomaque, où les vices représentent les extrêmes dont la vertu est le
juste milieu (cf.
par exemple, Alexandre,'HBlKà rrpofJA,jµara, 118, 18;
158,4 ; 161, 1).
Grégoire de Nazianze (Funebris oratio in laudem
Basilii Magni, 64.
3) rappelle que selon plusieurs philosophes les vices
se fondent sur les vertus et sont pour ainsi dire leurs proches voisins,
ai KaKtaL.
Kal Eta( TTwç àyx(0vpoL (ce
passage étant repris dans le roman des Amours d'/smène et d'Jsménias
d'Eustathe Macrembolite, au douzième siècle [2, 74 T.]): cf.
aussi
Sextus Empiricus (Adversus Mathematicos, 11.
121 ).
qui constate que
l'homme qui cherche la vertu finit par se laisser entraîner par le vice
qui lui ressemble le plus; Sinesius (Oratio de regno, 6, 28: apETats
KaKtaL 'YfLTOVES-): Jean Damascène, Encomium in Sanctum Joannem
Chrysostomum, 96, 776 : Michel Psellos, Orationes panegyricae, 4,
S24 et le proverbe néogrec : To KaAo Kal To KaKo eivaL noÀÙ KoVTa.
Citons également une maxime de La Rochefoucauld ( 182), selon
laquelle les vices entrent dans la composition des vertus comme les poisons entrent dans la composition des remèdes : la prudence les
assemble et les tempère.
et elle s 'en sert utilement contre les maux de
la vie et un aphorisme de La Bruyère (Les caractères.
Du cœur, 72): //
n J' a point de vice qui n'ait une fausse ressemblance avec quelque
vertu, et qui ne s'en aide.
napa1T~n-~yaoL Tais- àpETais.
»
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