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Lorsqu'on emploie trop de temps à voyager on devient enfin étranger en son pays. [ Discours de la méthode ] Descartes, René. Commentez cette citation.

Publié le 22/02/2012

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« incohérent, de ses préjugés, elle le prépaie à conquérir la liberté de sa pensée; mais, par elle-même, l'expérience ne luienseigne que la variété des erreurs humaines ou des apparences de la nature; elle ne lui fournit pas la vérité.

La vérité ne setrouve nulle part toute faite, pas même dans les ouvrages des hommes qui l'ont possédée.

La vérité se t'ait dans chaqueesprit par une synthèse originale ; elle est l'organisation vivante des données de l'expérience en une conceptionharmonieuse sous la loi inflexible de la raison.

Et ainsi après avoir employé quelques années à étudier dans le livre dumonde, et à tâcher d'acquérir quelque expérience, il prend un jour la résolution d'étudier aussi en lui-même et d'employertoutes les forces de son esprit à choisir les chemins qu'il devrait suivre. C'est le 10 novembre 1619 que Descartes comprend enfin l'obligation qui s'impose à lui de renoncer à toutes les opinions qu'iltient de sa naissance, de ses parents, de ses précepteurs, de son milieu, des hommes enfin et de lui-même (car il a souventjugé sans réfléchir et encombré ainsi son esprit d'idées incertaines), de s'abstenir, en un mot, de toute affirmation, jusqu'aujour où il sera capable de produire en lui-même et par lui-même l'intuition infaillible du vrai. Mais avant de faire table rase de ses préjugés, Descartes croit devoir prendre quelques précautions indispensables. D'abord celui qui trouve sa maison mal construite serait bien imprudent de la jeter à bas sans s'être instruit dans l'art del'architecture et sans avoir tracé le plan de sa nouvelle habitation.

Si incertaines que soient nos connaissances, nous nedevons y renoncer qu'après nous être assuré les moyens d'en découvrir de plus certaines.

Aussi Descartes ne rejettera-t-il pastoutes les opinions qui se sont, peu à peu glissées en sa créance q j il n'ait employé assez de temps à faire le projet del'ouvrage qu'il entreprend et à chercher la vraie méthode pour parvenir à la connaissance de toutes les choses dont son espritsera capable.

Il ne conçoit pas de réforme de la science, sans une réforme préalable de la méthode. Mais il ne suffit pas d'avoir appris la théorie de l'architecture pour être bon architecte : il faut avoir pratiqué l'art dont onconnaît les règles.

De même pour construire la science conformément aux lois de la vérité, ce n'est pas assez d'avoirdéterminé dans son esprit les règles de la méthode, il faut avoir pris l'habitude de les appliquer, il faut s'être exercé à ysoumettre son jugement.

Avant donc de reprendre en entier l'œuvre de la science, Descartes croit bon, non seulement de semunir d'une méthode, mais encore de s'en rendre l'usage à ce point familier qu'il ne puisse plus manquer d'en observer lespréceptes. « Et enfin, ajoute Descartes, comme ce n'est pas « assez, avant de commencer à rebâtir le logis où « l'on demeure, que del'abattre, et de faire provision de matériaux et d'architectes, ou s'exercer « soi-même à l'architecture, et outre cela d'en avoir« soigneusement tracé le dessin, mais qu'il faut « aussi s'être pourvu de quelque autre où l'on « puisse être logécommodément, pendant le temps « qu'on y travaillera; ainsi, afin que je ne demeurasse point irrésolu en mes actionspendant que « la raison m'obligeait de l'être en mes jugements, « et que je ne laissasse pas de vivre dès lors le « plusheureusement que je pourrais, je me formai « une morale par provision qui ne consistait qu'en « trois ou quatre maximes.

»Tout remettre en question, voilà le seul moyen d'arriver à la certitude.

Mais comment agir, si l'on doute de tout? Agir, n'est-cepas se décider pour un parti que l'on sait le plus agréable ou le meilleur? et si l'on n'est assuré de rien, on ne se décidera plusà rien, on n'agira plus.

Mais ne plus agir, c'est encore agir, c'est laisser agir pour nous la nature et les autres hommes, c'estabandonner la direction de notre vie au caprice de forces ou de volontés étrangères à nous; c'est s'exposer aux piresinfortunes.

S'il n'y a aucun inconvénient à prolonger indéfiniment des doutes purement spéculatifs, combien les réflexionsintempestives peuvent nuire à notre action! Ainsi, en attendant qu'il ait reconstruit la science et, avec la science, la morale,Descartes conformera sa vie à un certain nombre de règles pratiques qui constitueront une morale provisoire. Malgré toutes les précautions dont il va s'entourer pour ne point faillir à sa tâche, Descartes se rend compte de l'audace deson dessein et des dangers qu'il court.

S'il ne recule pas, c'est qu'il se sent l'âme forte.

Il ne conseillerait pas au premier venude suivre son exemple.

Tous les hommes ne sont pas en mesure de parvenir jusqu'à la certitude, après avoir ouvert leurpensée au doute.

Quand on a renoncé aux croyances qui n'ont d'autre fondement que l'habitude et que l'on se met en quêted'affirmations certaines, il faut procéder avec méthode.

Mais la méthode implique une certaine modération de la volonté.Nous ne devons pas nous laisser emporter par trop d'ardeur dogmatique et juger avant que la raison le permette.

D'autrepart, une volonté trop faible ne donnera pas à l'intelligence cette impulsion sans laquelle la pensée, inerte, resteperpétuellement identique à elle-même.

Presque tous les esprits pèchent, soit par excès, soit par défaut d'initiative.

Les unsaffirment impétueusement ce qu'ils ne comprennent pas, les autres craignent toujours d'affirmer.

Aussi la majorité deshommes doit-elle se contenter de suivre les indications qu'une élite lui fournit, sans les discuter.

Il serait dangereux que tousrenouvellent le libre examen des opinions traditionnelles.

Combien d'entre nous ne sont faits que pour la croyance, non pourla science ! Ceux-là ne gagnent rien à s'affranchir de l'autorité des grands esprits.

Si la science ne se passe pas de liberté, ilfaut bien que la plupart des hommes se passent de science. Descartes croit, pour sa part, pouvoir échapper au double péril du jugement téméraire et du scepticisme.

Mais il est un autreinconvénient de son entreprise qu'il n'envisage pas sans quelque inquiétude.

La limite qui sépare la science de l'action estindécise.

Toute réflexion de l'intelligence se traduit en quelque mesure par une réforme de la vie.

Est-il possible de renoncerà toutes les opinions traditionnelles en matière spéculative sans toucher en même temps non seulement à la morale, mais à. »

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