Le bonheur est une idée neuve en Europe Saint-Just

« 36 1 Bonheur Mais ce serait une erreur totale que de croire que le bonheur prophétisé par Saint-Just est celui auquel no­ tre époque aspire.

Dans un texte ultérieur, le Rapport sur les factions de l'Etranger du 23 ventôse an II, Saint­ Just précise très clairement ce que doit être le bonheur authentique; non pas le bonheur des «corrupteurs de l'humanité», mais un bonheur fondé sur la vertu, le «bonheur de Sparte et celui d'Athènes dans ses beaux jours».

Il affirme : «Le bonheur que nous vous offrîmes n'est pas celui des peuples corrompus; ceux-là se sont trompés, qui atten­ daient de la Révolution le privilège d'être à leur tour aussi méchants que la noblesse et que les riches de la monarchie; une charrue, un champ, une chaumière à l'abri du fisc, une famille à l'abri de la lubricité d'un brigand, voilà le bonheur.

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Le bonheur dont Saint-Just annonce la naissance en Europe est celui que peut goûter une humanité ver­ t'lieuse, vivant dans l'harmonie et la sécurité, grâce à cette république que la Révolution s'est promis de met­ tre en place .

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Avec beaucoup de justesse, Albert Camus fait remarquer dans L'Homme révolté que, si l'idée de bonheur semblait neuve à Saint-Just, c'est que, pour lui, l'histoire s'arrêtait à Brutus.

Entre le tyrannicide de la république romaine et le régicide de la Révolution française, rien qu'un grand vide historique sans intérêt et sans signification.

Le bonheur ne pouvait consister que dans le retour à la perfection du modèle antique.

C'est traiter bien sûr avec beaucoup de désinvolture la réalité historique et la nature humaine que d'occulter ainsi presque deux mille ans d'histoire.

Le bonheur n'est sans doute d'aucune époque et de toutes à la fois, car il n'est rien d'autre que l'attitude que nous choisis-. »