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La leçon du théâtre est au-delà des leçons. Eugène Ionesco.

Publié le 22/02/2012

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Eugène Ionesco a réuni en 1966 dans un livre intitulé Notes et contre-notes (Gallimard) un ensemble très large de textes qui, de manière un peu répétitive mais très didactique, expriment l'essentiel de son point de vue sur les problèmes du théâtre contemporain et plus précisément sur ses propres oeuvres dramatiques. Il s'agit de conférences, de notes, d'entretiens, de préfaces datées de la fin des années 1950 ou du début des années 60. L'un de ces textes, intitulé simplement « Bouts de réponse à une enquête» et privé de toute date, est l'occasion pour lui de revenir de manière très fragmentaire sur les questions qui se trouvent au centre de sa réflexion : la nature du théâtre, la fonction de la critique, l'attente du public, la nécessaire faculté créatrice qui doit, appartenir à l'auteur dramatique. Significativement, le texte s'ouvre et s'achève à la fois sur la question des rapports qui doivent s'établir entre le discours théâtral et le discours idéologique.
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« amusé à souligner les mises en scène et les lectures contradictoires de son oeuvre qui avaient été proposées : auxÉtats-Unis, la « rhinocérite » fut assimilée au conformisme et, en Union soviétique, on eut peur qu'on puisse ydécouvrir le souvenir du stalinisme.

De plus, nulle part dans la pièce, le message n'est véritablement explicite et lemystère de la cause et de la nature du mal qui frappe un à un les personnages de la pièce largement demeure.

C'estpourquoi l'on est amené, en fait, à considérer Rhinocéros autant comme une pièce métaphysique que comme unepièce politique, autant comme une pure farce que comme une véritable tragédie.

Le sens reste en suspens sans qu'ilsoit possible de le réduire au schéma préalable d'une idéologie : la leçon du théâtre est bien au-delà des leçons.lis- La position d'Ionesco est intéressante en ceci qu'elle se situe largement à rebours des convictions dramatiquesdominantes de son époque.

Il se refuse à un théâtre de pur divertissement : il méprise le boulevard.

Mais toutautant, il se refuse à emprunter la voie opposée d'un théâtre politique et didactique.

En fait, pour lui, les deuxgenres sont à réunir dans la même désapprobation car, par leur côté prévisible et stéréotypé, ils s'équivalent. Répondant à l'article de Kenneth Tynan évoqué plus haut, Ionesco écrivait : «...

je pense que des écrivains comme Sartre (auteur de mélodrames politiques), Osborne, Miller, etc., sont lesnouveaux « auteurs du boulevard », représentant un conformisme de gauche qui est tout aussi pitoyable que celuide droite.

Ces écrivains n'offrent rien que l'on ne connaisse déjà, par les ouvrages et discours politiques.» Au-delà des noms qui viennent d'être cités, le principal adversaire d'Ionesco est le théâtre brechtien dont lesconceptions dominent les débats sur l'esthétique dramatique en France dans les années 1960.

Dans un article publiépar Le Figaro littéraire du 12 mars 1971 et repris en 1977 dans Antidotes, Ionesco déclare :«Je n'aime pas Brecht, justement parce qu'il est didactique, idéologique.

Il n'est pas primitif, il est primaire.

Il n'estpas simple, il est simpliste.

Il ne donne pas matière à penser, il est lui-même le reflet, l'illustration d'une idéologie, ilne m'apprend rien, il est redite.

D'autre part, l'homme brechtien est plat, il n'a que deux dimensions, celles de lasurface, il n'est que social : ce qui lui manque, c'est la dimension en profondeur, la dimension métaphysique.

Sonhomme est incomplet et il n'est souvent qu'un pantin.»Plus que la réalité du théâtre brechtien, cette déclaration trahit d'abord la profonde incompréhension de celui-ci parIonesco.

Elle permet de saisir cependant l'un des débats essentiels du théâtre contemporain partagé entre lavolonté de s'engager dans les luttes politiques et le désir de ne pas se réduire aux mots d'ordre idéologiques.. »

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