Ce passage de l'état de nature à l'état civil produit dans l'homme un changement très remarquable, en substituant dans sa conduite la justice à l'instinct. Rousseau. Commentez cette citation.
Publié le 17/01/2022
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Ce passage de l'état de nature à l'état civil produit dans l'homme un changement très remarquable, en substituant dans sa conduite la justice à l'instinct, et donnant à ses actions la moralité qui leur manquait auparavant. C'est alors seulement que, la voix du devoir succédant à l'impulsion physique et le droit à l'appétit, l'homme, qui jusque-là n'avait regardé que lui-même, se voit forcé d'agir sur d'autres principes, et de consulter sa raison avant d'écouter ses penchants. Quoiqu'il se prive dans cet état de plusieurs avantages qu'il tient de la nature, il en regagne de si grands, ses facultés s'exercent et se développent, ses idées s'étendent, ses sentiments s'ennoblissent, - son âme tout entière s'élève à tel point, que si les· abus de cette nouvelle condition ne le dégradaient souvent au-dessous de celle dont il est sorti, il devrait bénir sans cesse l'instant heureux qui l'en arracha pour jamais, et qui, d'un animal stupide et borné, fit un être intelligent et un homme.
Vous supposez, ainsi que ceux qui traitent de ces questions, que l'homme apporte avec lui sa raison toute formée, et qu'il ne s'agit que de la mettre en oeuvre. Or, cela n'est pas vrai;. car l'une des acquisitions de l'homme, et même des plus lentes, est. la raison.
[ ... ]
L'homme qui, privé du secours de ses semblables et sans cesse occupé de pourvoir à ses besoins, est réduit en toute chose à la seule marche de ses propres idées, fait un progrès bien lent de ce côté-là: il vieillit et meurt avant d'être sorti de l'enfance de la raison.
«
320 • La dissertation de philosophie
figurent dans les différents écrits politiques de Rousseau et
tout spécialement dans
Du contrat social ou Principes du
droit politique
(1762).
L'examen de ces textes politiques conduit
à enrichir la
vision du passé de l'humanité propre à Rousseau.
En effet,
on
s'en tient souvent au pan négatif de cette vision, résumée
par la formule : l'homme naît bon ; la société le déprave.
Mais Rousseau, en dépit de cette affirmation, et contraire
ment à l'opinion commune, présente comme éminemment
positif le processus de socialisation qui conduit de
l'homme
des premiers âges à l'homme civilisé.
L'homme qui, à l'état de nature, n'obéissait
qu'à l'ins
tinct, acquiert, au contact de ses semblables, tout ce qui le
distingue de l'animal : le sens du devoir,
l'amour de la vertu,
!a raison.
Contrairement à ses prédécesseurs, Rousseau ne
situe pas la sociabilité à l'origine
de'la société, mais à son
terme.
La raison, qui n'existait qu'à l'état virtuel dans le
cœur de l'homme primitif, ne devient une composante de
l'être humain que lorsque celui-ci se met à fréquenter ses
semblables.
L'homme ne s'extirpe de l'animalité pour
accéder véritablement
à l'humanité qu'au contact des autres
hommes.
Rousseau exprime cette idée à plusieurs reprises et •
en particulier au début du
Contrat social :
« Ce passage de l'état de nature à l'état civil produit
-1
dans l'homme un changement très remarquable, en "' •
substituant dans sa conduite
la justice à l'instinct, et
donnant à ses actions
la moralité qui leur manquait
auparavant.
C'est alors seulement
que, la voix du devoir
succédant à l'impulsion physique et
le droit à l'appétit,
l'homme, qui jusque-là n'avait regardé que lui-même, se
voit forcé d'agir sur d'autres principes, et de consulter sa
raison avant d'écouter ses penchants..
»
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- Rien n'est si doux que lui (l'homme) dans son état primitif, lorsque, placé par la nature à des distances égales de la stupidité des brutes et des lumières funestes de l'homme civil et borné également par l'instinct et par la raison à se garantir du mal qui le menace, il est retenu par la pitié naturelle de faire lui même du mal à personne, sans y être porté par rien, même après en avoir reçu. Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes. Commentez
- Le principe fondamental de toute morale […] est que l'homme est un être naturellement bon, aimant la justice et l'ordre ; qu'il n'y a point de perversité originelle dans le coeur humain, et que les premiers mouvement de la nature sont toujours droits […]. Dans cet état [de nature] l'homme ne connaît que lui ; il ne voit opposé ni conforme à celui de personne ; il ne hait ni n'aime rien ; borné au seul instinct physique, [l'homme] est nul, il est bête : c'est ce que j'ai fait voir dans
- Rousseau " Conscience, conscience, conscience ! instinct divin, immortelle et céleste voix ; guide assuré d'un être ignorant et borné, mais intelligent et libre ; juge infaillible du bien et du mal, qui rend l'homme semblable à Dieu, c'est toi qui fais l'excellence de sa nature et la moralité de ses actions. " (Rousseau, Émile ou De l'éducation, 1762, livre IV, GF-Flammarion, 1966, p. 378). Commentez cette citation.