Alienis me coloribus adornare
Publié le 05/03/2022
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Alienis me coloribus adornare
Se parer des couleurs d'autrui
Cette locution qui désigne les personnes qui, par vaine gloire et besoin
de tenir toujours le premier rôle, n'hésitent pas à s'attribuer les mérites
d'autrui, est attestée par saint Jérôme (Pr~face au De Spiritu Sancto de
Did)·me, 108 ; cf.
Rutin, Apologia in Sanctum HieronJ•mum, Pl 21,
603b).
On en lit une reprise plus tardive dans les Epistulae de Godefroy
de Breteuil de Sainte-Barbe (20 [Pl 205, 847c]).
L'origine de cette
expression est une fable d' Esope ( 103 Hausrath : cf.
Phèdre, 1, 3 et
Horace, Ep., 1, 3, 18-20): un geai, pour s'embellir (chez Esope, pour se
faire élire roi des oiseaux) vola un jour les plumes des autres oiseaux et
s'en orna en se pavanant: mais les aubes oiseaux, outrés, tirent cercle
autour de lui et lui arrachèrent chacun la plume qui leur revenait.
Dépouillé de la sorte, le geai apparut aussi laid qu'il l'était auparavant,
mais plus ridicule encore - de là la proverbialité d'expressions du type
Cornix Aesopi (saint Jérôme, Ep., 108.
15) et Graculus Aesopius
(Braulion de Saragosse, Ep.• 11 [PL 80, 657b]).
pour désigner l'amogance effrénée et l'orgueil; Tertullien (Adversus Valentinianos.
12, 4)
utilise la fo111t'1le Gragu/us Aesopi dans un contexte très différent, à propos du Christ, qui, selon les Valentiniens, serait le résultat d'une opération d'assemblage; cf.
l'expression inverse Meisque me co/oribus esse
pingendum, (saint Jérôme,
Epistula adversus Rujinum.
3.
41 ).
Dans les écrits latins du Moyen-Age
et de l'époque moderne.
la locution revient parfois, avec une allusion
explicite à la fable d'Esope: cf., par exemple, la Reprobatio nefandi sermonis editi per Radulphum de Stephanus de Sancto Georgio (340) et
l'épitre Defoe/ici et infoelici Republica envoyée au sénat de Bruges par
le jurisconsulte Franciscus Goethalsius et publiée à Louvain en 1567.
La
fable d'Esope prit également une valeur proverbiale dans la littérature
grecque : cf.
par exemple, Lucien, Pseudologiste, S et Eusèbe,
Praeparatio Evange/ica, 10, 4, 27.
C'est également de la fable de Phèdre
que provient la locution Gloriari alienis bonis, ) : pa1111i les reprises littéraires, cf.
La Fontaine (4, 19 qui remplace
la comei Ile par la pie) ; Salvator Rosa (Sat.• 2, 438 sq.
: S 'avesse a depor
le penne altroi, I resterebbe d'Esopo la cornacchia), et un des Caractères
de La Bruyère (Du mérite personnel, 40), où apparaît un oiseau qui se
pare de plumes qui ne sont pas les siennes..
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