Ah ! insensé qui crois que je ne suis pas toi. Victor Hugo
Publié le 03/10/2018
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► Les romantiques ont parfois été accusés d’accorder trop d’importance à leur «moi». Victor Hugo se défend contre cette accusation dans la préface de son recueil de poèmes intitulé Les Contemplations (1856). Il n’y a là nul égocentrisme, nul égoïsme, explique-t-il, car le poète n’exprime pas seulement ce qui se passe dans son âme, mais aussi ce que ressentent les autres hommes.
Ayant expliqué que son livre pourrait s’appeler Les Mémoires d’une âme, étant « Une destinée écrite au jour le jour », il enchaîne :
«Est-ce donc la vie d’un homme? Oui, et la vie des autres hommes aussi. Nul de nous n’a l’honneur d’avoir une vie qui soit à lui. Ma vie est la vôtre, votre vie est la mienne, vous vivez ce que je vis ; la destinée est une. Prenez donc ce miroir et regardez-vous-y. On se plaint quelquefois des écrivains qui disent « moi ». Parlez-nous de nous, leur crie-t-on. Hélas ! quand je vous parie de moi, je vous parie de vous. Comment ne le sentez-vous pas ? Ah ! insensé qui crois que je ne suis pas toi.
«
..,.
«Chacun a sa façon de regarder la nuit», dit magni
fiquement Victor Hugo.
Chaque être comme chaque
feuille est unique.
Et chacun, aujourd'hui plus que
jamais, tient
à sa singularité.
Mais
ce caractère unique et irremplaçable de chacun
peut aller de pair avec un fond de sentiments et de pen
sées commun
à tous les hommes d'une même culture ou
même de l'humanité entière.
Grâce
à ce fond commun,
des hommes fort différents de l'auteur peuvent
se
reconnaître dans ce qu'il écrit.
Simenon était ravi de
savoir que ses romans, pourtant bien ancrés dans
le ter
roir, faisaient vibrer dans
le désert asiatique des lec
teurs qui vivaient sous la tente entourés de chameaux.
«La destinée est une» disait Victor Hugo.
L'expres
sion vraie du particulier débouche sur l'universel.
A cette explication peut s'en superposer une autre.
Du
fait de sa grande sensibilité, l'écrivain dispose parfois de
l'aptitude
à se mettre dans la peau des autres.
Il exprime
ainsi
ce qu'ils ne savent pas, eux, exprimer.
«Il y a en
moi un fond de grossièreté qui me permet de compren
dre
les paysans et de pénétrer loin dans leur vie» écrit
Jules Renard dans son Journal.
André Gide (Journal,
29 mai
1923) évoque aussi cette aptitude du créateur qui
lui permet de s'identifier
à autrui, pour souligner qu'elle
peut induire des erreurs d'interprétation:
«Le triomphe de l'objectivité, c'est de permettre au
romancier d'emprunter le
"je" d'autrui.
J'ai donné le
change pour avoir bien réussi ; certains ont pris chacun
de mes livres pour des confessions successives.
Cette
abnégation, cette dépersonnalisation poétique qui me
fait ressentir les joies et
les douleurs d'autrui beaucoup
plus vivement que les miennes propres, nul n'en parle
aussi bien que Keats
(Lettres).>>
A la subjectivité du poète n'évoquant que son moi,
mais évoquant des échos dans
le moi des autres, fait
place l'objectivité de celui qui est capable de s'appro-.
»
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- « On se plaint quelquefois des écrivains qui disent moi. Parlez-nous de nous, leur crie-t-on. Hélas! quand je vous parle de moi, je vous parle de vous. Comment ne le sentez-vous pas? Ah! insensé qui crois que je ne suis pas toi! » (Victor Hugo.)
- Victor Hugo a écrit dans la préface des Contemplations (1856) : On se plaint quelquefois des écrivains qui disent moi. Parlez-nous de nous, leur crie-t-on. Hélas ! quand je vous parle de moi, je vous parle de vous. Comment ne le sentez-vous pas ? Ah ! insensé, qui crois que je ne suis pas toi. Vous discuterez cette affirmation en prenant pour exemples un ou plusieurs des poèmes romantiques que vous connaissez le mieux.
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