Le cinéma comique (Exposé – Art & Littérature – Collège/Lycée)

« le maître incontesté, tentant dans Arsenic et Vieilles Dentelles (/lrsenic and Old Lace, Frank Capra , 1944) de masquer les crimes d'une charmante vieille dame qui se trouve être sa tante.

Il y a ceux qui essaient de remettre de l'ordre , et ceux qui cultivent le désordre : dans cette dernière catégorie, W.

C.

Fields est dans les années 1930 le héros de plusieurs satires des valeurs familiales américaines.

On citera notamment Les Joies de la famille (The Man on the Flying Trapeze , 1935) et Mine de rien (The Bank Dick , 1940} où, père ivrogne, il menace d'un pot de fleurs sa petite fille qui ne le respecte guère.

Hellzapoppin (1941), de Henry C.

Patter , avec Ole Olsen et Chuck Johnson , joue également sur les joies du désordre et des tabous qui tombent, préparant la voie aux facéties d'un Jerry Lewis , apparemment plus apprécié en Europe qu'aux États-Unis .

Spécialisé dans les rôles de maladroit , il déclenche des catastrophes (Le Dingue du palacejThe Bel/boy, 1960) auxquelles succède quelquefois une apparence de triomphe : Dodeur Jerry et Mister Love (The Nutty Professor , 1963) le voit ainsi absorber une sorte de potion magique qui le transforme en séducteur d'opérette- mais les effets secondaires compliquent ses succès féminins ...

sans parler du retour brutal à sa condition première de rat de laboratoire .

LES ÉCOLES EUROPÉENNES En Europe, le cinéma comique reste longtemps dans l'orbite du théâtre.

EN fRANCE Les grands noms des années 1930 sont Sacha Guitry (Le Roman d 'un tricheur , 1936) et Marcel Pagnol (César, 1936) , deux hommes de théâtre passés derrière la caméra.

De grands acteurs comme Raimu et Louis Jouvet s'imposent à une époque dont le chef­ d'œuvre reste sans doute Drôle de drame (1937), de Marcel Carné : sur un scénario et des dialogues de Jacques Prévert , Michel Simon et Louis Jouvet, Jean-Louis Barrault et Françoise Rosay s'en donnent à cœur joie.

Fernandel apparaît à la même époque, jouant les jeunes premiers ...

avant de devenir le grand comique français des années LE TOURNAGE LE PLUS CATASTROPHIQUE Buster Keaton (Le Cameraman), Henry C.

Patter (Hellzapoppin) et Blake Edwards (La Party) ont imaginé avec délices et, sans doute, terreur, les mésaventures qui peuvent survenir lors d'un tournage.

Mais parfois la réalité dépasse la fiction .

Deux films comiques sont en compétition pour le prix du tournage le plus catastrophique.

Playtime , de Jacques Tati, nécessita trois ans de tournage, vit son budget multiplié par six, ses coûteux décors détruits; enfin, il sortit, mais ne reçut qu'un accueil réservé.

Quant à l'adaptation de Don Quichotte entreprise par Terry Gilian, elle a vu Jean Rochefort- en charge du rôle­ titre- tomber gravement malade pendant le tournage, cependant que des scènes étaient perturbées par des avions à réaction et qu'un déluge ruinait le décor.

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Le film, qui a bénéficié du plus gros budget de l'histoire du cinéma européen, ne sortira sans doute jamais.

f------------- 1 Dirigé par Gérard Oury ou Jean Girault, 1950 grâce au personnage de Don Camillo (Le Petit Monde de Don Camillo, Julien Duvivier , 1952) .

Jacques Tati, qui donne Jour de fête en 1949 , s'impose avec Les Vacances de Monsieur Hu/at (1953) et Mon oncle (1958) comme le créateur du personnage de Hu lot- pipe , parapluie , grand corps maladroit qu'il ne sait où placer , avec ses jambes en compas arpentant un monde dérisoire.

L'ECOLE ANGLAISE Spécialisée dans l'humour grinçant, elle apparaît dans les années 1940 .

Dans oblige (Kind Hearts and Coronets , 1949) , de Robert Hamer , l'irrésistible Alec aes;aotJset!S, qui entre et modernité regard sur la de l'Italie (Totà, Pepino et la mauvaise femm ejTotà, Peppino ela malafemmina , Camillo Mastrocinque, 1956).

LES ANNEES 1960 Zazie dans le métro , de Louis Malle (1960), avec Catherine Demangea! et Philippe Noire! , voit l'annexion du comique par les cinéastes de la Nouvelle Vague; les premiers films de Godard et certains Truffaut (Les Quatre Cents Coups, 1959) jouent eux aussi des ressorts du comique , mais le rire n'est pas l'élément central.

À cet égard, la manière plus traditionnelle des films d'Audiard et Lautner (Les Tontons Louis de Funè s n'a pas eu la chance, comme Totà, de rencontrer son Pasolini; mais son perfectionnisme et son extraordinaire présence scénique font assurément de lui l'éga l des grands acteurs du muet.

PARODIES ET TABOUS Le cinéma comique européen des années 1950-1960 reste ainsi porté par des acteurs, plus que par des réalisateurs .

Le tournant 1968 va contribuer à redistribuer la donne .

Roman Polanski donne en 1967 Le Bal des vampires, une parodie de film d'horreur qui atteste le regain d'inté rêt de réalisateurs d'ava nt-garde pour le comique.

Un an plus tard, La Party (The Party , 1968) du Britannique Blake Edwards associe ainsi un réalisateur et un acteur qui se retrouveront dans la série des Panthère rose : la maladresse de Peter Sellers impose un rythme lent qui est l'un des charmes de leur comique.

Woody Allen, enfin, est l'un des premiers comiques télévisuels à s'imposer sur grand écran.

Des facéties de Ba nanas (1971, avec Louise Lasser) ou Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe ...

(Everything you A/ways Wanted ta Know About Sex, but Were Afraid ta Ask, 1972 ) aux œuvres plus ambitieuses que sont Annie Hall (1975 , avec Diane Keaton), Manhattan (1979 , avec Marie Hemingway) ou La Rose pourpre du Caire (Purple Rose of Coiro , 1985 , avec Mia Farrow ), Woody Allen fait du comique l'instrument d 'une critique sociale et d'une analyse psychologique extrêmement fines, jouant des ressorts de l'humour juif new-yorkais pour se moquer gentiment de l'intelligentsia prétentieuse , des psychanalystes et des névrosés qui peuplent le New York des années post-soixante-huitardes.

Moins raffiné sans doute, mais plus explosif, le comique parodique trouve ses grandes heures avec les films de Mel Brooks (Frankenstein Junior /Young Frankenstein, 1974 ) ou The Rocky Harrar Pidure Show (1975), de Jim Sharman, avec Susan Sarandon et Tim Curry .

La bande anglaise des Monty Python, qui a elle aussi fait ses débuts à la télévision, donne en 1971 un film connu en France comme La Première Folie des Monty Python (And Now For Something Complet/y Different) , qui impose un humour absurde pour le moins ravageur, s'attaquant par la bande à tous les tabous de la société anglaise.

Les Monty Python parodient les films historiques avec Sacré Graal (The Ho/y Grail, 1974) et les adaptations cinématographiques des Évangiles avec La Vie de Brian (Brian 's Lite, 1979).

Plus récemment, c'est le mythe de James Bond qui en prend pour son grade, avec les facéties kitsch d'Austin Powers (lay Roach , 1999 , avec Mike Myers ) ou de Johnny English (Peter Howitt , 2002, avec Rowan Atkinson ) .

Les tabous tombent : La Grande Bouffe (Marco Ferreri , 1973 , avec Philippe Noiret) et La Cage aux folles (Édouard Molinaro , 1973, sur un scénario de Jean Poiret , avec Ugo Tognazzi et Michel Serrault) vont à la rencontre des tabous sociaux, pour en explorer le ressort comique.

On pourrait rattacher à cette veine l'épopée scatologique de La Soupe aux choux (198 1 ) de Jean Girault, avec Louis de Funès , Jacques Villeret et Jean Carmel.

DU SPLENDID À AUJOURD'HUI Dans les années 1970 émerge une nouvelle génération, représentée en France par la troupe du Splendid: son chef-d'œuvre est sans nul doute Le père Noël est une ordure, de Jean-Marie Poiré.

Venus du café-théâtre, Michel Blanc , Josiane Balasko, Christian Clavier , Gérard Jugnot , Dominique Lava nant et Thierry Lhermitte caricaturent les relations sociales et les caractères , poussant au noir le portrait d 'une société laissant souvent affleurer une malveillance dont la révélation est à la clé du comique.

Jouant lui aussi sur la mise à nu d 'une certaine sauvagerie, Étienne Chatilliez donne avec La vie est un long fleuve tranquille (1987 ) un portrait de la France moderne qui rappelle crûment l'exis tence de classes sociales très différentes.

Le bonheur est dans le pré (1996) joue également du contraste entre des mondes que tout semble opposer , la ville et la campagne cette fois-ci .

Avec Trois Hommes et un couffin (1985), Coline Serreau obtient pour sa part un très gros succès en interrogeant la répartition des rôles entre hommes et femmes : à nouveau, ce sont les lignes de partage traditionnelles de la société qui sont explorées -le comique révèle et interroge leur brouillage , leur éventuelle disparitio n, leur surprenante réapparition ...

Les Visiteurs (1993) de Jean-Marie Poiré, avec Jean Reno et Christian Clavier , s'inscrivent dans la même interrogation des contradictions et des hypocrisies du monde moderne, soutenue ici par les ressorts comiques de la scatologie et des anachronismes.

L'Italien Nan ni Moretti fait ses débuts à la mêm e époque, réalisant à la manière de Woody Allen des films dont il est le principa l interprète, et qui explorent la chute ou l'enlisemen t des grandes identités collectives : la religion avec La mess e est finie (La messa e finit à , 1986, avec Margherita Lozano ), le communisme avec Palombe/la rossa (1989, avec Asia Argenta ).

Là encore, le comique sert de révélateur aux doutes et aux paradoxes de la modernité .

Mais il continue aussi ...

à faire rire simplement : Un poisson nommé Wanda (/l Fish Ca/led Wanda, 1988), de Crichton , avec ...

_.''"'" '~ Lee Curtis , des productions hollywoodiennes comme Le Flic d e Beverly Hill (The Beverly Hill Cop, 1984) de Martin Brest, avec Eddy Murphy , ou encore la série des Police Academy apparaissent comme des modèles de films sans autre prétention que de faire rire des millions de spectateurs.

En France, Le Diner de cons (1998), de Francis Veber, La vérité si je mens (2001) de Thomas Gilou , ou plus ITP récemment Astérix et Obélbc.

Mission Cléopâtre (2002), d'Alain Chaba~ ont eux auss i obtenu des recor ds de fréquentation : plus que centenaire , le cinéma comique se porte mieux que jamais .. »