Le cinéma
Publié le 05/09/2014
Extrait du document
«
opération de cadrage : dans le viseur, celui qui filme choisit ce qui sera inclus ou non dans le plan.
Nous
croyons donc au réalisme des vagues déferlant même si au-delà du cadre, la mer disparait brutalement.Cette
part invisible de l'image est appelée hors-champ et entretient un rapport singulier avec la réalité.
S'il suffit que
la caméra pivote vers la gauche ou vers la droite pour que cette portion invisible de la mer apparaisse enfin
devant nos yeux, le hors-champ implique tout de même que le spectateur effectue un travail de l'imaginaire
pour supposer cette présence continue de la mer, au-delà du visible.161Le cinéma extrait de la réalité un
fragment de forme plus ou moins rectangulaire définissant un espace découpé entre ce qui est vu et ce qui ne
l'est pas, ainsi que leurs communications : un personnage qui rentre ou sort du champ, un mouvement de
caméra qui découvre finalement la plage au bord de l'eau,...
Ce qui est visible un instant peut très bien
disparaitre une fois franchi les bords de l'écran.Si le cinéma est de l'espace, il est également du temps.
Un film
d'une heure trente par exemple ne montre jamais un seul plan, une seule image qui va englober toute l'histoire.
Autrement dit, nous pouvons balayer un temps réel de plusieurs années en quelques secondes, quand entre
deux plans, un titre indique : « deux ans plus tard ».
Le spectateur enregistre l'information et effectue le
changement de valeur temporelle.Si nous voyons dans un plan un homme regarder vers la gauche et dire «
Comment allez-vous ? » auquel répond un raccord sur une femme regardant vers la droite et disant : « Je vais
très bien », le spectateur va automatiquement déduire que le temps entre les deux plans est continu.Si nous
voyons par contre un plan d'un homme s'en allant le long d'une route précéder un plan où cet homme est
attablé alors qu'il fait nuit, nous allons imaginer que quelques heures se sont déroulées dans le cut.
Ce temps
invisible entre les deux plans est appelé ellipse.Si le cinéaste au moment de son montage veut filmer une
conversation, il sait qu'il pourra utiliser deux plans avec deux personnages dont l'un pose une question et
l'autre répond.
Le spectateur comprendra d'emblée que les plans sont simultanés.
Cela signifie que le cinéaste
et le spectateur perçoivent le plus souvent la même durée dans l'enchainement des plans.
Pour le dire
autrement, le cinéma est un langage, un ensemble de règles plus ou moins partagées.Le rapport à la réalité
peut donc être perçu comme ressemblant parce que les vagues à l'image renvoient à la mer réelle ; il
n'empêche que des conventions existent.
Ce qui est vu est donc un espace inventé par le cadre et intégré à une
durée construite par les raccords entre les plans.Derrière ces deux idées a priori contradictoires se cachent.
»
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