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La théâtralité dans La Règle du Jeu

Publié le 10/08/2014

Extrait du document

 

La présence de spectacles — chantés, dansés, joués —à l'intérieur de ses films est une constante de rceuvre de Jean Renoir. Dans La Règle du jeu, il y a plusieurs spectacles auxquels participent les différents personnages. Ces spectacles jouent un rôle décisif dans la construction du film. Autour des personnages, le théâtre et la vie, l'imaginaire et le réel vont s'entrecroiser jusqu'à se fondre presque complètement.

 

Au-delà de ces séquences, la référence au théâtre est constante dans La Règle du jeu. L'existence des personnages, obligés de cacher ou de déguiser leurs sentiments, s'observant sans cesse les uns les autres, n'est-elle pas elle-même une sorte de théâtre ? La mise en scène de Renoir va souligner en permanence la théâtralité des rites, notamment ceux de la chasse et de la fête, sur lesquels repose cette société.

« Saint-Aubin en berger ...

Ce premier spectacle semble être un petit intermède sans signification particulière.

Pourtant, la chanson autour de laquelle est organisé le spectacle contient une allusion discrète, mais claire pour le public de l'époque, à la situation politique.

Cette chanson qui s'intitule En revenant d'la revue est un air très populaire aux accents nettement militaristes et revanchards 1.

Puis vient la Danse macabre de Saint-Saëns et son ballet de squelettes autour de la figure de la Mort.

L'allusion aux forces obscures qui se sont une fois de plus déchaînées, à la guerre qui est sur le point d'éclater devient plus évidente.

Suivra alors un dernier spectacle où, devant un décor représentant I' Arc de triomphe de Paris, quatre faux barbus portant chapeau melon entonnent une autre chanson populaire dont le titre est à lui seul tout un programme : Nous avons /'vé /'pied 2.

--·LA THEÂTRALISATION DE LA VIOLENCE Ces trois spectacles s'intercalent à l'intérieur d'une suite de scènes montrant sous divers angles les salons du château où se déroule la fête.

Celle-ci est peu à peu envahie par la montée de violence provoquée, d'une part, par la jalousie de Schumacher lancé à la poursuite de Marceau, d'autre part.

par l'affrontement entre les différents prétendants de Christine : Saint-Aubin, Jurieu, et son mari Robert.

1.

Extrait de la chanson qu'on entend : «Gais et contents, nous marchions triomphants/ En allant à Longchamp, le coeur à l'aise/ Sans hésiter, car nous allions fêter/ Voir et complimenter l'armée française.» Cette chanson fut écrite à la gloire du général Boulanger.

2.

Lever le pied: «se dit d'un dépositaire de fonds qui s'enfuit en emportant l'argent dont il avait la garde» (Petit Robert).

Par exten­ sion ,l'expression signifie «s'enfuir, abandonner son poste».

Après les accords de Munich, n'avait-on pas l'impression que beaucoup de Français avaient «l'vé l'pied» par rapport à Hitler ? L'allusion contenue dans cette chanson peut renvoyer à l'irrespon­ sabilité prévalant dans la micro-société filmée par Renoir.

109. »

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