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La Règle du jeu : Une comédie ou un drame ? (Renoir)

Publié le 09/08/2014

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Une comédie

ou un drame ?

La Règle du jeu est un film qui associe des registres opposés, comédie et drame, oscillant sans cesse entre un ton léger et un ton plus grave. Ce mélange des registres et des tons est souligné par Jean Renoir qui définit le film comme une «fantaisie dramatique« ou un «drame gai«.

UN PROJET DE COMÉDIE

À la recherche d'un ton nouveau

 

La Règle du jeu résulte du désir de Jean Renoir d'aborder un genre nouveau. De La Chienne (1931) à La Bête humaine (1938), tous ses films précédents pourraient être classés dans la catégorie des drames : drames réalistes et même drames à forte connotation sociale. Il suffit d'énumérer les écrivains dont le cinéaste a adapté les livres à l'écran pour percevoir cette unité de ton : Zola (Nana et La Bête humaine), Gorki (Les Bas-fonds), Maupassant (Une partie de campagne), Flaubert (Madame Bovary), Simenon (La Nuit du carrefour), auxquels il faut ajouter des écrivains réalistes moins connus aujourd'hui comme Georges de la Fouchardière (La Chienne) ou Roger Fauchois (Boudu sauvé des eaux).

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« connus ou moins connus, se déroulaient dans les mêmes «décors plantés pour la romance : ports crépusculaires, routes sans fins, impasses maléfiques, la zone et ses talus pelés».

Tous ou presque présentaient les mêmes personnages de marginaux venus des bas-fonds de la société : «Marlous et putains, entraîneuses et mouchards, proxénètes et barbeaux, tueurs et insoumis».

Délaissant les personnages d'ouvriers ou de marginaux, Renoir va prendre le contre-pied de ses films précédents en choisissant de dépeindre «un milieu extrêmement riche, extrêmement mondain ; pas un milieu de parvenus, mais de bonne, authentique et ancienne bourgeoisie».

li le fera en utilisant un ton plus léger, un ton de comédie et même de «divertissement», comme le précise le texte d'introduction qui figure après le générique* du film 1.

Une sensation plus qu'un projet Dans son autobiographie, Jean Renoir raconte qu'à l'époque où il commençait à réfléchir à ce nouveau projet, il se mit à écouter beaucoup de musique de la fin du xv11• siècle et du xv111• siècle, notamment ce qu'il appelle la «musique baroque française» : «Couperin, Rameau, tout ce qui va de Lully à Grétry2».

«On passe une soirée à écouter des disques et ça finit par un film, écrit le cinéaste.

Je ne veux pas dire que la musique baroque française m'ait inspiré La Règle du jeu, mais elle a contribué à me donner l'envie de filmer des personnages se remuant suivant l'esprit de cette musique3.» À l'origine de La Règle du jeu, il y a donc moins un projet (conscient, formulé) qu'un désir, une sensation auxquels le cinéaste n'a pas encore donné de forme.

Petit à petit, celle-ci va se préciser, d'abord à partir de la 1.

«Ce divertissement n'a pas la prétention d'être une étude de moeurs», lit-on notamment sur le premier carton* qui suit le générique.

2.

François Couperin (1668-1733).

Jean-Philippe Rameau (1683- 1764), Jean-Baptiste Lully ou Lulli (1632-1687).

André-Modeste Grétry (1741-1813), compositeurs français.

3.

Ma vie et mes films, op.

cit., p.

154.

Voir aussi sur ce point le chapitre 13, «La musique», p.

124-125.

94. »

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