Emphase, faste et propagande : ascension et crises du cinéma européen des années 20
Publié le 24/03/2019
Extrait du document
Vers 1920, le film muet s'émancipe d'un point de vue esthétique et revendique une forme artistique autonome. les plus grands pays producteurs de cinéma en Europe sont l'Allemagne, la France et l'Union soviétique. Sous le signe de la révolution, certains gouvernements accordent beaucoup d'importance à cette forme de propagande. Pour le grand public, le film est surtout un moyen de divertissement.
L, UFA (Universum Film Aktien Gesellschaft), l'usine à rêves de
! Neubabelsberg aux portes de Berlin, est un trust qui vise à unifier les forces vives de l'industrie du cinéma. À l'initiative du général Erich Ludendorff, I'UFA est créée en 1917 avec des capitaux privés et publics pour réaliser des films de propagande.
La monarchie et l'empire s'effondrent, mais pas I'UFA. Dès 1920, elle exporte vers les États-Unis de grands films foisonnant de décors et de costumes comme Madame Dubarry, Anne Boleyn ou Carmen. Le producteur inspiré Erich Pommer rejoint I'UFA. Lors d'une crise financière en 1926, les compagnies américaines Metro-Goldwyn-Mayer et Paramount, gagnent en peu de temps une forte influence, au détriment des producteurs allemands. L'année suivante, l'industriel et magnat de la presse allemand Alfred Hugenberg, réussit à faire de I'UFA le premier groupe cinématographique d'Europe.
«
Une
scène du film Le Golem.
Le metteur en scène,
Paul Wegener, tient aussi le rôle principal.
Buiiuel, ainsi que le premier film de Jean
Cocteau, Le Sang d'un poète.
Quant à Abel Gance, il représente un
marginal plein de fantaisie technique qui
a l'ambition de projets gigantesques.
La
grande aventure de sa vie est Napoléon
(1927), conçu comme une fresque, dont
seul le premier épisode, regorgeant
d'audaces visuelles, de scènes à grand
spectacle, d'images délirantes, est tourné.
Quelques séquences en triple écran,
disparues puis retrouvées, ont été
réintégrées dans une version complète,
quelque temps avant la mort d'Abel
Gance, par l'historien et cinéaste anglais
Kevin Brownlow.
URSS :films révolutionnaires.
Connaissant
son pouvoir de propagande, Lénine dit du
cinéma qu'il est >.
Les premières productions
cinématographiques il caractère de
propagande parviennent aux soldats de
l'armée Rouge, cantonnés loin de Moscou
et de Leningrad.
Dans la jeune Union
soviétique, de grands talents cinémato
graphiques s'épanouissent, tels Serge
Eisenstein, Vsevolod Poudovkine et Dziga
Vertov.
Dziga Vertov est le créateur du Kino
Pravda (Cinéma vérité) et tourne les
premières séquences d'actualités.
Des
centaines de cadreurs lui livrent le
matériel.
Dans le manifeste de son groupe
d'action, Kinoglaz (Ciné-œil), Vertov
expose son credo : il pénètre dans le taillis
de la vie et en corrige l'image que l'œil
humain perçoit imparfaitement.
Il donne la
priorité aux images-documents sur la
mise en scène et le jeu des acteurs
professionnels.
Le film de Vertov intitulé
La Sixième partie du monde, tourné en
1926, qui traite de la construction de
l'économie soviétique, est un exemple
admirable de sa technique de montage et
de trucage.
Eisenstein, qui est décorateur de la
section théâtrale du front, tourne en 1924
son premier film La Grève, et reçoit
ensuite une commande pour une œuvre
sur la révolution de 1905.
Dans un
scénario en huit parties, il choisit un
unique épisode : c'est ainsi que naît un
grand classique du cinéma, Le Cuirassé
Potem kine (1925), exemplaire dans la
radicalité de ses séquences et de ses
coupures.
Pour son film suivant, Octobre
(1928), Eisenstein ne renoue pas avec le
succès international que lui avait valu Le
Cuirassé Potemkine.
Peu avant son
achèvement, l'œuvre doit être modifiée :
Léon Trotski est tombé en disgrâce et tout
doit être revu.
Un troisième metteur en scène impor
tant de cette phase très créative du film
soviétique est Vsevolod Poudovkine, qui
tourne des films muets très touchants
comme La Mère (1926�, La Fin de Saint
Pétersbourg (1927) et Tempête sur l'Asie
(1928).
Autres pays.
Les réalisateurs anglais
subissent déjà pendant la Première
Guerre mondiale la rude concurrence des
États-Unis, si bien que la production
recule considérablement en qualité et en
1 quantité.
Une loi sur le cinéma datant de
1927 met sur pied un système complexe
qui rend la situation encore plus grave :
elle oblige les propriétaires de salles de
cinéma à présenter des films britanniques,
incitant ainsi la production de films artisti
quement médiocres.
Dès 1925, Alfred Hitchcock tourne ses
premiers films.
Chantage est le premier
film parlant du cinéma britannique, et
impose son auteur comme un maître du
thriller obsessionnel.
Le film docu
mentaire trouve en la personne de John
Grierson un brillant organisateur pour
plusieurs dizaines d'années.
En 1929,
Grierson réalise un remarquable
documentaire, Drifters (chalutiers) sur la
pêche au hareng en mer du Nord.
Le Danois Carl Theodor Dreyer, qui
traite les sentiments sans compromis,
tourne en France La Passsion de Jeanne
d' Arc (1928), un chef-d'œuvre pourtant
sans succès commercial.
Les immenses studios que les produc
teurs italiens ont construits avant 1914,
restent inemployés dans les années 20.
Si
le régime de Mussolini promeut le film en
tant qu'instrument de propagande, il faut
attendre la fin des années 20 pour que
des metteurs en scène comme Alessandro
Blasetti (Sole, en 1929), et le spécialiste de
la comédie Mario Camerini (Les Hommes,
quels mufles, en 1932) présentent à nou
veau des films à succès.
Le jeune Vittorio
De Sica, qui sera plus tard l'un des pères
du néo-réalisme, commence sa carrière
cinémat ographique en 1922 comme
comédien dans L'Affaire Clemenceau.
Dans le film de Friedrich Wilhelm Murnau, Nosferatu le vampire (1921-1922), Max Schreck joue le rôle
principal, celui du comte Orlock alias Nosferatu.
43.
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