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Analyse de Gilda de Charles Vidor

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

Le décors est particulièrement intéressant dans ce film, Les décors propres à la nuit, que ce soit dans le casino ou dans la villa donnent une forte impression de huis-clos qui dramatise le récit, L'atmosphère en devient angoissante, rendent l'espace étroit voire ''carcéral'' ,Gilda est désignée par Ballin comme ''un canari'', Johnny la prive de toute liberté lorsqu'ils viennent de se marier en organisant ce qui va être son enfermement dans son nouvel appartement qu'il appelle en voix off sa ''cage'', Le film se concentre sur les trois personnages d'où cet usage particulier du huis-clos, La seule scène en extérieur est celle où Mundson s'évade en avion et simule sa mort et on a également quelques scènes dans la rue ( la rencontre incongrue de Johnny {text:soft-page-break} _avec Ballin et celle devant l'hôtel Centenario), Ce type de choix est typique d'un film noir où le monde est fermé, Les escaliers sont un éléments important du décors, Les escaliers sont un point névralgique et voient les déplacements des personnages, Les hommes surtout : ils montent, descendent, attendent quelqu'un en bas ou en haut des escaliers, Le fait qu'ils puissent se trouver soit en hauteur soit en bas des escaliers montre leur position qu'ils occupent alors dans l'échelle hiérarchique de la diégèse, Ainsi, on constate que Ballin est filmé le plus souvent en contre-plongée, en haut des escaliers comme pour signifier sa domination, et envie de domination, La situation : Johnny reprend sa place tandis qu'il le croit mort, il est alors filmé de la même façon voire montant les escaliers, Gilda vient, là encore, se démarquer : on ne la voit jamais monter les marches du casino et lorsqu'elle monte ceux de la villa c'est chaque fois en dévalant, Deux moments voient Gilda s'areter aux escaliers : le premier est une occasion pour elle de regarder de haut Johnny, en bas des escaliers, et le menacer d'une revanche qu'elle compte prendre ; la deuxième fois c'est encore avec Ballin, ils succombent à leur désir tandis que Ballin les aperçoit et dévale alors aussitôt les escaliers, Anne Benjamin émet une réflexion intéressante quant aux lieux : « Le film va, par ailleurs, établir un système d'opposition entre les espaces géographiques, Buenos Aires et Montévidéo seront opposés en bloc aux Etats-unis, Hors chez soi (lisez les USA) point de salut, L'homme que Gilda rencontre à Montévidéo lui fait d'ailleurs remarquer que rien ne sert de fuir «(,,,) L'espace du casino s'opposera aux autres espaces parce qu'il est affranchi de la Loi (le jeu est illégal en Argentine) « (Logique narrative et logique diégétique au cinéma : l'exemple de Gilda de Charles Vidor ),_ 

« ___Le film pose également des questions quant au genre, la forme spécifique du film même, Ce qui est sur c'est que Gilda suit la tradition de ce qu'on appelle les ''filmsnoirs'' dont les caractéristiques diégétiques sont aisément identifiables : ''une femme fatale'', des crimes, un passé trouble etc,,, Ainsi qu'une attention particulièreportée sur le travail du noir et blanc, qui malgré l'avènement du Technicolor reste le centre d'attention de nombreux cinéastes, Tous les éléments du film noir seretrouvent dans Gilda , Certes, le glamour de ce casino illégal est présent mais il cache des éléments moins honorables, qui sont passés sous silence.

On devine, enmême temps que Johnny, que le casino n'est pas le seul centre de revenu de Ballin, qui caches d'autres ''activités''.

Comme souvent dans les films noirs, la ''menacenazie'' est souvent en arrière-plan du récit ; à la célébration de la fin de la seconde guerre mondiale répond également l'existence d'associations frauduleuses.

En effet,Mundson n'a pas seulement profité de l'argent gagné en violant la loi anti-monopole mais également en passant un accord avec des Allemands (les deux que l'on voitau moment du diner entre les trois principaux protagonistes).

La relation entre Ballin et Johnny est celle de la dépendance, un rapport de domination est alors instauréentre ces derniers (de maitre à servant).

Un rapport trouble, ambigu comme bien souvent, On nous décrit, par ailleurs, par plusieurs personnages la « folie » qui animeMundson .

Voici donc le héros typique du film noir: il se présente sans passé, souhaite tout contrôler (il insiste plusieurs fois auprès de Johnny sur le fait qu'il exigeune obéissance aveugle), tout posséder, dominer le monde.

C'est un être intelligent, calculateur, cynique et exclusif .

Il organise avec une rigueur étonnante sa faussemort, assassine assez froidement l'Allemand venu lui demander des comptes et pousse au suicide un intermédiaire qu'il a ruiné sans en éprouver le moindre remord.Mais comme tout héros de film noir qui se respecte, il présente une faiblesse majeure: Gilda (derrière chaque grand homme se cache une femme, dit-on!), Le ''happy-end'' de la fin est assez original si l'on regarde d'autres films noirs tels que Les Tueurs de Robert Siodmak (la même année) dont le protagoniste principal est tué peuaprès le début du film, dans la fatalité la plus totale (le héros accepte une mort qu'il a ''mérité''), D'autres éléments rattachent Gilda à d'autres genres, En effet, Gildapourrait également être qualifié de film policier avec ses zones d'ombres, ses meurtres irrésolus, les disparitions soudaines de personnages, l'apparition d'autres plussombres,,, Sans oublier également les numéros musicaux de Gilda notamment, qui semblent se rapprocher du cabaret, du music-hall (que Rita connait assez bien parailleurs), Par ailleurs, certains moments de l'intrigue font penser à un mélo-drame : Gilda se met à terre en suppliant Farell à genoux de la laisser divorcer, de lalibérer, Le film contient également un élément scénographique des films de série B, comme le dit Charles Tesson dans son livre Photogénie de la série B et qu'ilappelle ''le secret devant la porte (la voiture)'' : « lorsque quelqu'un sort d'une maison, on cadre de face quand une voiture arrive latéralement, le personnage monte etla voiture sort hors-champs »,____3- __Gilda__, une pièce de théâtre ? ____Si l'on est un fan des pièces de Shakespeare, on ne peut ne pas remarquer une évidente ressemblance du film avec la pièce La nuit des rois , En effet, cette piècemet-en-scène toutes les orientations amoureuses sous la forme du travestissement, avec également des changements dans les rapports sociaux : maitre/serviteur,mari/femme/amant avec en arrière-plan le contexte du carnaval, De même, dans Gilda ce thème est un motif récurrent pendant tout le film, Effectivement, on peutcaractériser certaines figures : le clown représenté par l'oncle Pio, le roi par Ballin, la reine par Gilda, Johnny le fidèle, Et telle dans les pièces baroques : leschangements ponctuent et rythme le récit – ici, les masques tombent, Ainsi, Gilda est d'abord l'épouse du maitre, Ballin, puis celle du serviteur devenu maitre, Farell :elle perd alors aussitôt la supériorité qu'elle avait sur Ballin, en devenant prisonnière de son nouveau mari, Mais si l'on regarde d'un intérêt diégétique, on a une scènede carnaval dans le film où le drame atteint son point culminant : la reine devient une pute puis regagne son honneur, le roi est détrône, le serviteur prend la place dece dernier,,,Le carnaval est communément connu comme étant une période de fête, de jeu, de chants, de dégustations et de travestissement avant la période de jeun,d'abstinence, D'un point de vue plus moral, c'est Gilda elle-même qui nous le rappelle : elle pense que '' pour elle aussi, c'est le carnaval'' , Selon elle, son destin serait,après la période de faste, suivie d'une période de pénitence (abstinence rédemptrice donc), Elle sera effectivement mise-en-quarantaine avec son second mari, aprèsavoir profité de la richesse du premier, Même au niveau des éléments cinématographiques, on a une situation théâtrale :le premier mouvement de caméra semblemonter _ {text:soft-page-break} _du dessous de la scène pour nous donner à voir Johnny qui lance les dés en direction de la caméra, Même _certains personnagescomprennent que les amants se jouent mutuellement des rôles , on a en plus une belle mise-en-abyme , Ainsi, l'oncle Pio ainsi que le chef de police, Obregon, ontvisiblement hâte de voir la suite de la pièce qui se joue constamment sous leurs yeux, Le bouffon, oncle Pio, propose symboliquement des masques : une tête detaureau ou celle d'un bouffon pour Johnny ainsi que des têtes de cochons aux Allemands,,, Plus explicitement, dans les paroles de l'une des chanson que chante Gilda,on retrouve un lien fort avec le récit et les vrais sentiments de celle-ci :Combien de fois ai-je murmuré « Mon amour » ?/ Avant, ce n'était qu'une phrase que j'avais entendu au théâtre, je ne faisais que jouer un rôle / Mais maintenant,quand je murmure « Mon amour », ne comprends-tu pas que je le dis du fond du cœur ? (_Amado mio_ )Le chef de la police l'a bien comprit et le dit à Farell : « Tout cela n'était que de la comédie, et croyez moi vous vous très bien laissez prendre au jeu » , De plus,l'usage du triangle amoureux, très utilisé dans le cinéma nous ramène à un genre spécial du théâtre : le vaudeville, On a également, le deus ex machina (personne parlaquelle tout le nœud se résout à la fin) représenté par le bienveillant Oncle Pio, conseillant sagement et individuellement les amants durant tout le film ( serait-ce unphilosophe ?), qui tue la figure menacant le bien-être du couple à nouveau réuni et le chef de police qui taira les faits, Un autre motif théâtral est l'hybris (démesuredu héros) de Ballin que l'on voit courir à sa chute à cause de son désir effréné de pouvoir, rapprochant ainsi Gilda d'une tragédie, Certes, le fait de déguiser les faitspar de la comédie est également un moyen employé dans certains des films noirs, et pour dévier la censure : « _ they suggested, above all involve a play withappearances (,,,) They are, repeatedly, dramas of false appearances, in which we see the hero and heroine enacting forbidden desire, but in the end escaping anypenality for it because the enactement is revealed as only a false appearance (,,,) » (Richard Maltby, Hollywood cinema, traduction à la fin si nécésssaire)____1- ''star-system'' : Rita et la scène du ''strip-tease''____Un élément fort de ce cinéma Hollywoodien post-seconde guerre peut-être le développement considérable d'un ''star-system'', qui concourt au succès potentiel d'unfilm à sa sortie, Avant la sortie de Gilda, Rita Hayworth était connue certes mais ce film l'a clairement propulsée au rang de légende et d'icône mondiale de la beauté,son partenaire a également pu bénéficier de cette alchimie, La méconnaissance du passé des personnages, et notamment Gilda, alimente le fantasme et l'érotisme,Beaucoup de personnes confondent les deux personnages ce que Ophélie Wiel résume ici : _ {text:bookmark} Cette ressemblance troublante entre la personnalité del'actrice et celle de son personnage ( Rita est Gilda, sans aucune ambiguïté) porta tellement préjudice à Rita Hayworth qu'elle-même disait : « les hommess'endorment avec Gilda et se réveillent, déçus, avec moi.

» (http://www.critikat.com/Gilda.html), Cette image lui collera toujours à la peau : elle tenta de faire oublier''Gilda'' en tournant dans L_a dame de shanghai_ (son mari, qui en est le réalisateur, lui a fait également une radicale transformation physique) mais le public bouda lefilm, Edgar Morin explique ce phénomène dans son livre Les Stars : « La star détermine les multiples personnages de films; elle s'incarne en eux et les transcende,Mais ceux-ci la transcendent à leur tour : leur qualités exceptionnelles rejaillissent sur la star »Il serait, à présent intéressant de regarder la scène du strip-tease de Gilda, de plus près, qui lui a valut ce statut de légende du cinéma, de femme mythique, Gildaarrive sur scène et se donne en spectacle, en femme-vamp, Gilda arrive sur scène, en balançant son manteau l'air d'annoncer la tendance, avec une audace et uneassurance parfaite, La caméra la filme d'abord en plan d'ensemble puis demi-ensemble, depuis le public, Elle est tonique, dynamique ce que l'on voit à sa manière debalancer les bras, Avant la fin du premier refrain, elle fait un pas en arrière puis en avant ce qui pourrait signifier cette ambivalence qui l'anime, Puis, elle se retrouveles bras en l'air dévoilant ainsi la partie supérieure de sa poitrine (l'imagination devient ensuite de mise,,,) Elle devient animale : sur le mot ''quake'', elle donne uncoup de hanche, puis le célèbre moment où elle se relève, libérant sa chevelure féline, elle se cambre aussi sauvagement,,, Son visage, son grain de peau sont mis-en-valeur avec le plan serré qui ne cadre plus la robe, Son collier, ses gants, ses cheveux et ses épaules nues sont les seuls éléments visibles dans le cadre ce qui la rendencore davantage sensuelle,La caméra passe du plan rapproché-taille au plan épaules lorsqu'elle relance sa chevelure avec le bras, Elle s'avance dangereusement devant la caméra, sure d'elle etde son irrésistible sex-appeal, Johnny, est dans le public entre indignation et désir : il représente le voyeurisme du spectateur,{text:soft-page-break} Elle retire son premier gant, lentement, Le gant qui nous rappelle le baton-canne de Ballin qui, en réalité, est une arme dangereuse, C'est doncderrière les apparences que les personnages se cachent en ce temps de carnaval masqué (Johnny triche aux jeux, Ballin est reclu et observe les autres derrière desstores etc,,,),Lorsque la chanson s'achève, elle enlève son second gant puis son collier, Elle souhaite enlever sa robe et demande de l'aide, La réplique finale qu'elle empreinte estconnotée davantage en anglais et pourrait être une bonne synthèse du film : « I'm not very good at zippers » ou « je ne suis pas très douée avec les fermetures éclairs »(Elle avait déjà demandé l'aide de Ballin plutôt), ''Zippers'' en anglais veut aussi signifier ''braguette'',,,Gilda est nue derrière ses gants, et se révèle donc telle qu'elle est en les retirant : « Maintenant, ils savent tous ce que je suis » (à Johnny, après le numéro), C'estcomme si elle souhaitait donner une gifle à deux maris qui tour à tour la dédaignent, Johnny la giflera à la fin du numéro et c'est comme si c'était la société qui la. »

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