Catégorie : Anthologie
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Les droits de la critique (1607). Boileau (Satire IX)
Tout Paris pour Chimène a les yeux de Rodrigue.L'Académie en corps a beau le censurer :Le public révolté s'obstine à l'admirer.La satire en leçons, en nouveautés fertile,Sait seule assaisonner le plaisant et l'utile,Et, d'un vers qu'elle épure aux rayons du bon sens,Détromper les esprits 'des erreurs de leur temps.Elle seule, bravant l'orgueil et l'injustice,Va jusque sous le dais faire pâlir le vice,Et souvent sans' rien craindre, à l'aide d'un bon mot.Va venger la raison des attentats d'un sot...
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EPITRE A RACINE: Sur l'utilité des ennemis
Plus on veut l'affaiblir, plus il croît et s'élance :Au Cid persécuté Cinna doit sa naissance;Er peut-être ta plume aux censeurs de PyrrhusDoit les plus nobles traits dont tu peignis Burrhus.Moi-même, dont la gloire, ici moins répandue,Des pâles envieux ne blesse point la vue,Mais qu'une humeur trop libre, un esprit peu soumis,De bonne heure a pourvu d'utiles ennemis,Je dois plus à leur haine, il faut que je l'avoue,Qu'au faible et vain talent dont la France me loue.Leur venin, qui sur moi brûle...
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FROISSART (1337-1410). Dévouement des six bourgeois de Calais.
elle en sa chambre, et les fit habiller, et leur donna largement à dîner.Puis elle donna à chacun six nobles, et les fit conduire hors de l'armée, en sûreté. (Liv. I, ch. Lxvi.) QUESTIONS D'EXAMEN I. — L'ensemble. — Nature du morceau : une narration. — Narration d'un grand intérêt dramatique. — Quels sont lespersonnages mis en présence, — du côté des Calaisiens ? du côté des Anglais ? Dans quel but les six bourgeois ont-ils consenti à aller remettre, en chemise et la corde au cou, les clefs de C...
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MAROT (1497-1544). A son ami Lyon
Ce gros lien. Vrai est qu'il y songeaAssez longtemps, mais il le vous rongeaSouvent, et tant qu'à la parfin tout rompt,Et le Lion de s'en aller fut prompt,Disant en soi : « Nul plaisir en effetNe se perd point, quelque part où soit fait. »Voilà le conte en termes rithmassez,Il est bien long, mais il est vieil assez,Témoin Ésope et plus d'un million.Or viens me voir pour faire le Lion,Et je mettrai peine, sens et étudeD'être le Rat, exempt d'ingratitude :J'entends, si Dieu te donne autant d'affai...
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Querelle de plaideurs. (Les Plaideurs, acte I, sc. vii.) de RACINE
Je n'en vivrais, monsieur, que trop honnêtement:Mais vivre sans plaider, est-ce contentement?CHICANEAUDes chicaneurs viendront nous manger jusqu'à l'âme,Et nous ne dirons mot! Mais, s'il vous plaît, madame,Depuis quand plaidez-vous?LA COMTESSEIl ne m'en souvient pas;Depuis trente ans au plus.CHICANEAUCe n'est pas trop.LA COMTESSEHélas!CHICANEAUEt quel âge avez-vous? Vous avez bon visage.LA COMTESSEHé! quelque soixante ans.CHICANEAUComment! c'est le bel âgePour plaider.LA COMTESSELaissez faire :...
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Le Misanthrope. « Il faut parmi le monde une vertu traitable » (Le Misanthrope, acte I, sc. 1.)
Il faut fléchir au temps, sans obstination;Et c'est une folie, à nulle autre seconde,De vouloir se mêler de corriger le monde.J'observe, comme vous, cent choses, tous les jours,Qui pourraient mieux aller, prenant un autre cours;Mais, quoi qu'à chaque pas je puisse voir paraître,En courroux, comme vous, on ne me voit point être.Je prends tout doucement les hommes comme ils sont :J'accoutume mon âme à souffrir ce qu'ils font;Et je crois qu'à la cour, de même qu'à la ville,Mon flegme est philosophe...
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PAUL BOURGET. La petite Adèle
villages éloignés de tout centre important); Les observations de l'auteur au sujet de l'esprit d'imitation et de latimidité vous paraissent-elles exactes? Avez-vous pu faire vous-même des observations analogues? II. — L'analyse du morceau. — Distinguez les différentes parties du morceau : a) Henriette Scilly rencontre la petiteAdèle avec sa bonne; b) Portrait de l'enfant (traits physiques); c) Jeu auquel elle joue; d) Henriette veut parler àl'enfant; — extrême timidité de cette dernière; e) R...
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RENÉ BAZIN (1853-1932). Le Labour. La Terre qui meurt
QUESTIONS D'EXAMEN I. L'ensemble. — Une scène de labour, qui sert de cadre à un épisode dramatique.... Le lecteur, prévenu par leschapitres précédents, sait que François, le fils cadet, est déjà engagé dans une compagnie de chemin de fer, qu'ilest à la veille de son départ, et qu'il se propose, aujourd'hui même, d'avertir son père. Nous attendons avec unesorte d'angoisse le moment où François se décidera à parler. II. — L'analyse du morceau. — Description du labourage, en termes à la rois techni...
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La mort de Sylvestre (1886). Pêcheur d'Islande - LOTI
disparut tout à fait dans les eaux dorées, on vit les yeux du petit-fils mourant se chavirer, se retourner vers le frontcomme pour disparaître dans la tête. Alors on abaissa dessus les paupières avec leurs longs cils, et Sylvestreredevint très beau et calme, comme un marbre couché.... (Pêcheur d'Islande, Calmann-Lévy, éditeur.) QUESTIONS D'EXAMEN I. — L'ensemble. — Nature du morceau : une narration. — Narration pleine d'intérêt et empreinte d'un profondsentiment de pitié. — Le jeune...
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La bataille. (Le Cid, acte IV, sc. III.) - Corneille
Sont demeurés sans gloire au milieu des ténèbres,Où chacun, seul témoin des grands coups qu'il donnait,Ne pouvait discerner où le sort inclinait!J'allais de tous côtés encourager les nôtres,Faire avancer les uns et contenir les autres,Ranger ceux qui venaient, les pousser à leur tour :Et ne l'ai pu savoir jusques au point du jour.Mais enfin sa clarté montre notre avantage;Le Maure voit sa perte et perd soudain courage.Et, voyant du renfort qui nous vient secourir,L'ardeur de vaincre cède à la pe...
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JEAN RICHEPIN (1849-1926). La plainte du bois.
I. — L'ensemble. — Pièce qui témoigne d'une admirable imagination poétique. — Quelle idée générale est développéedans la première partie ? — dans la seconde ? Montrez que le poète, dans sa réponse, reprend les principauxarguments invoqués par le bois; Ne fait-il pas preuve d'une observation exacte, en parlant du bois qui siffle, détone,gémit et se tord? A quelle faculté laisse-t-il un libre essor dans le reste de la pièce ? Indiquez quelques-unes desbelles images de la première partie;...
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Pension bourgeoise (1834). Goriot. Balzac
(Le Père Goriot, I.) QUESTIONS D'EXAMEN I.— L'ensemble. — Nature du morceau : une description. — Description d'une pension bourgeoise, résultant d'uneobservation attentive et minutieuse. — Montrez que l'auteur, aux regards de qui rien n'échappe, indique à la fois lestraits saillants et les plus petits détails; Il est des détails caractéristiques (en signaler quelques-uns), mais n'est-ilpas aussi de menus détails qui auraient pu être négligés ? (quelques exemples); A quel défaut peut donner lieu...
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Hamilcar sauve le petit Hannibal (1862). Salammbô
Hamilcar, d'un bond, s'était jeté sur l'esclave; et en lui couvrant la bouche de sa main, il criait encore plus haut : «C'est le vieillard qui l'a élevé! il l'appelle mon enfant ! il en deviendra fou! Assez ! assez! » Et chassant par lesépaules les trois prêtres et leur victime, il sortit avec eux, et un grand coup de pied referma la porte derrière lui.Hamilcar tendit l'oreille pendant quelques minutes, craignant toujours de les voir revenir. Il songea ensuite à sedéfaire de l'esclave pou...
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Le Petit Chose (1868). Histoire de Bamban. Daudet
Il me regarda d'un air triste et soumis, son oeil suppliait ; mais je fus inexorable et la division s'ébranla, le laissantseul, immobile au milieu de la rue.Je me croyais délivré de lui pour toute la journée, lorsque, au sortir de la ville, des rires et des chuchotements àmon arrière-garde me firent retourner la tête.A quatre ou cinq pas derrière nous, Bamban suivait la promenade gravement.« Doublez le pas », dis-je aux deux premiers.Les élèves comprirent qu'il s'agissait de faire unes niche au...
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ÉMILE ZOLA (1840-1902). Épisode de la bataille de Sedan. La Débâcle
La charge fut reprise, le 2e escadron s'avançait dans une furie grandissante, les hommes couchés sur l'encolure,tenant le sabre au genou, prêts à sabrer. Deux cents mètres encore furent franchis, au milieu de l'assourdissanteclameur de tempête. Mais, de nouveau, sous les balles, le centre se creusait, les hommes et les bêtes tombaient,arrêtaient la course de l'inextricable embarras de leurs cadavres. Et le 2e escadron fut ainsi fauché à son tour,anéanti, laissant la place à ceux qui le suivaien...
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Le roman idéaliste et psychologique : GEORGE SAND - Les laboureurs
1. — L'ensemble. — Nature du morceau : une admirable description de labour. — Justifiez le titre : les laboureurs;Combien de tableaux de labour distinguez-vous dans cette description? Montrez qu'il y a cependant unité dans lemorceau; En quoi vous parait consister cette unité? (impression produite; la caractériser). II. — L'analyse du morceau. — Distinguez les différentes parties de la description : a) Le cadre du paysage; b) Lestrois tableaux de labour (le vieillard ; — son fils; — le jeune homm...
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AUGUSTE BARBIER (1805-1882). La cavale
(Iambes : l'Idole, III, A. Fayard, éditeur.) QUESTIONS D'EXAMEN 1. — L'ensemble. — Une vigoureuse satire contre Napoléon. — A qui s'adresse le poète? (remarquer la brusqueapostrophe du début); Sous la figure de quel animal représente-t-il la France? Montrez qu'il suit cette comparaison,sans défaillance, du commencement à la fin du poème; L'image est-elle pittoresque? Vous paraît-elle juste? (raisonsà l'appui); Quel est le cavalier? Ce dernier accorde-t-il quelque repos à la cavale exténuée?...
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THÉOPHILE GAUTIER (1811-1872). Ce que disent les hirondelles.
Auront filé sous notre essaim,Plaines brunes, pics blancs, mers bleues,Brodant d'écume leur bassin! »Avec cris et battements d'ailes,Sur la moulure aux bords étroits,Ainsi jasent les hirondelles,Voyant venir la rouille au bois.Je comprends tout ce qu'elles disent;Car le poète est un oiseau;Mais captif, ses élans se brisentContre un invisible réseau !Des ailes! des ailes! des ailes!Comme dans le chant de Ruckert,Pour voler là-bas avec elles,Au soleil d'or, au printemps vert. (Émaux et Camées, Fas...
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FRANÇOIS COPPÉE (1842-1908). Petits bourgeois
(Les Humbles, A. Lemerre, éditeur.) QUESTIONS D'EXAMEN I. — L'ensemble. — Un tableau de la vie familiale, révélant la calme existence de petits bourgeois, hier marchands,retirés à la campagne, dans la maison de leurs rêves. — Quel est le cadre de ce tableau? (Un jardin, avec maisond'habitation, à l'extrémité du faubourg, près des champs...) ; D'où, et à quelle époque de l'année, le poète a-t-ilobservé le tableau? (Du chemin, et par une belle journée d'été...); Quels sont les traits saillants du...
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La Nuit de mai (1838). LA MUSE. Musset (Poésies nouvelles.)
Lorsque le pélican, lassé d'un long voyage,Dans les brouillards du soir retourne à ses roseaux,Ses petits affamés courent sur le rivage,En le voyant au loin s'abattre sur les eaux.Déjà, croyant saisir et partager leur proie,Ils courent à leur père avec des cris de joie,En secouant leurs becs sur leurs goitres hideux.Lui, gagnant à pas lents une roche élevée,De son aile pendante abritant sa couvée,Pêcheur mélancolique, il regarde les cieux.Le sang coule à longs flots de sa poitrine ouverte.En vai...